Forum Opéra

La Bohème — Marseille

Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
5 janvier 2012
Une belle cohérence

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

Giacomo PUCCINI

La Bohème
Opéra en quatre actes
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica
D’après le roman Scènes de la vie de Bohême de Henri Murger
Créé à Turin, Teatro Regio, le 1° février 1896

Production de l’Opéra de Monte-Carlo, de l’Opéra-Théâtre de Saint-Etienne
Et de l’Opéra Royal de Wallonie

Mise en scène
Jean-Louis Pichon
Décors
Alexandre Heyraud
Costumes
Frédéric Pineau
Lumières
Michel Theuil

Mimi
Nathalie Manfrino
Musetta
Gabrielle Philiponet
Rodolfo
Ricardo Bernal
Marcello
Marc Barrard
Colline
Nicolas Courjal
Schaunard
Igor Gnidii
Benoît
François Castel
Alcindoro
Antoine Normand
Parpignol
Wilfried Tissot

Enfants de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône
Direction
Samuel Coquard
Chœurs de l’Opéra de Marseille
Chef des chœurs
Pierre Iodice
Orchestre de l’Opéra de Marseille
Direction musicale
Mark Shanahan

Marseille, Opéra municipal, 5 janvier 2012, 20h

 

 

Parti pris apparemment incongru pour cette version de La Bohême, où l’action, censée commencer et finir dans une mansarde, se déroule en fait sur les toits de Paris. Pourtant, si on ne se braque pas, la lecture proposée est d’une cohérence évidente : le réalisme, sans être absent, sera secondaire, comme le metteur en scène Jean-Louis Pichon s’en explique dans le programme de salle.

 

Le décor unique composé par Alexandre Heyraud consiste donc en un moutonnement de toits couronnés de verrières au sein desquels serpentent des passages – invisibles depuis le parterre – qui deviendront autant de voies de circulation pour les personnages. Quelques accessoires, dont la qualité peut étonner, en font le logis des quatre étudiants ; mais pour Jean-Louis Pichon la dèche initiale n’est que la conséquence périodique des excès de ces fils de famille. Au deuxième acte, exit les accessoires ; dans un espace dégagé au centre  d’où un escalier s’élance vers le Sacré Cœur de Montmartre – toile peinte – quelques tables et chaises composent de part et d’autre la terrasse du café Momus. Au troisième acte, le décor des toits représente la zone frontière entre la ville et ses faubourgs, avec un réverbère. L’auberge où Mimi est venue trouver Marcello est proche mais invisible. Au dernier acte, enfin, on retrouve évidemment les accessoires du premier.

A qui ne l’a pas vu, ce décor unique peut sembler une contrainte insupportable et une trahison des intentions des librettistes. A la lettre, sans doute. Mais c’est tout le talent de Jean-Louis Pichon de surmonter l’écueil, car ce que l’on voit n’est manifestement pas le fruit du hasard ou de la chance. D’abord les accessoires sont situés de la manière la plus propice aux évolutions des personnages et aux situations. Ensuite les chanteurs bougent assez pour animer l’espace et  faire oublier ce que peut avoir d’incongru cet appartement sur les toits. Enfin on perçoit nettement le travail sur le texte avec ses prolongations dans les jeux de scène – la chute de la clef, au premier acte, le mouvement violent de Rodolfo au second – qui, bien que rapides, préparent les scènes à venir, et dans les inventions qui créent un contexte, comme les prostituées du troisième acte ou le contrôle des sergents à qui les ouvriers doivent montrer patte blanche. Ainsi l’exploitation du décor par la mise en scène fait oublier la question de sa légitimité.

 

Les chanteurs jouent le jeu du naturel dans l’artifice, avec plus ou moins de bonheur. Le quatuor masculin est à peu près irréprochable. Si François Castel semble désormais à ses limites dans son apparition en Benoît, la vigueur de Nicolas Courjal et d’ Igor Gnidii est entière. Respectivement Colline et  Schaunard ils sont parfaits tant vocalement que scéniquement, et leur prestation donne une impression de spontanéité délectable. Auprès d’eux Marc Barrard, moins juvénile d’allure, compose un Marcello évidement très soigné mais manquant un peu d’éclat dans la projection. Ce n’est pas le cas de Ricardo Bernal, dont çà et là quelques sons un peu voilés ne parviennent pas à ternir l’insolente facilité dans l’aigu ; familier du rôle de Rodolfo, crédible physiquement, il interprète le personnage avec sensibilité et justesse, sans aucune lourdeur vocale ou scénique. Chez les dames, Gabrielle Philiponet force un peu sur la nervosité de Musetta, qu’elle tire vers l’hystérie dans le défi du second acte, mais la projection et la musicalité sont sans faille. Au premier acte Nathalie Manfrino semble tentée par les afféteries qu’on lui a connues, avec des ralentissements excessifs et des prises d’aigus risquées ; fort heureusement elle y renonce au deuxième acte et atteint dans les deux derniers la justesse de ton qui lui permet d’émouvoir sans rechercher l’effet.

Les costumes de Frédéric Pineau mélangent le sobre et l’inhabituel, dans un réalisme revu et corrigé. La coupe et les accessoires sont ceux de l’époque de la création mais les tissus et les couleurs relèvent d’un parti pris de fantaisie, avec une débauche de satin de couleurs vives et un déchaînement sur Musetta dont les falbalas sont dignes des chiens savants. Ainsi vêtus les chœurs évoquent plus le Carnaval que la Noël, mais leurs mouvements colorés animent l’espace au deuxième et permettent de pallier les contraintes que le décor impose aux déplacements. Les éclairages de Michel Theuil sont d’ailleurs très attentifs à les valoriser, comme ils auréolent les solistes.

Dans la fosse, Mark Shanahan retrouve l’orchestre qu’il avait dirigé dans Jenufa. La battue est métronomique, ce qui ne va pas sans quelque décalage avec le plateau ; cependant il obtient des musiciens une belle discipline, un contrôle du son sans à coups et scande la partition avec une énergique précision. Le lyrisme est tenu en lisière : ce qu’il faut, rien de plus. Cet Irlandais qui a étudié à Londres aurait-il fait sienne la réserve britannique ? La Bohême est écrite à l’heure des souvenirs ; un rien d’abandon supplémentaire ne siérait-il pas ? Au moins cette belle exécution technique s’accorde-t-elle à la mise en place impeccable de Jean-Louis Pichon. La cohérence est hélas assez rare pour être saluée !

 

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

3

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Détails

Giacomo PUCCINI

La Bohème
Opéra en quatre actes
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica
D’après le roman Scènes de la vie de Bohême de Henri Murger
Créé à Turin, Teatro Regio, le 1° février 1896

Production de l’Opéra de Monte-Carlo, de l’Opéra-Théâtre de Saint-Etienne
Et de l’Opéra Royal de Wallonie

Mise en scène
Jean-Louis Pichon
Décors
Alexandre Heyraud
Costumes
Frédéric Pineau
Lumières
Michel Theuil

Mimi
Nathalie Manfrino
Musetta
Gabrielle Philiponet
Rodolfo
Ricardo Bernal
Marcello
Marc Barrard
Colline
Nicolas Courjal
Schaunard
Igor Gnidii
Benoît
François Castel
Alcindoro
Antoine Normand
Parpignol
Wilfried Tissot

Enfants de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône
Direction
Samuel Coquard
Chœurs de l’Opéra de Marseille
Chef des chœurs
Pierre Iodice
Orchestre de l’Opéra de Marseille
Direction musicale
Mark Shanahan

Marseille, Opéra municipal, 5 janvier 2012, 20h

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle