Qu’ont en commun Nadja Michael, Stanislas de Barbeyrac, Iris Vermillion, Peter Bronder ? Des carrières en Europe pavées de succès divers et… un rendez-vous commun à São Paulo en septembre 2014 pour une série de Salomé de Richard Strauss.
Une version scénique qui n’a donc rien à envier aux plus grandes scènes du vieux continent puisque la représentation confirme les promesses du programme de la soirée. Nadja Michael propose une incarnation brulante et adolescente de la princesse Judée. La voix a les défauts qu’on connait : disparate d’un registre à un autre et pas exempte d’accidents de justesse. Toutefois l’artiste brille, comme toujours, par un engagement de tout instant.
Prophète métis coiffé de rastas, Mark Steven Doss rivalise de présence scénique et d’endurance vocale. La tessiture est maîtrisée de bout en bout et le personnage vit entre ferveur, autorité et dégout. Habitués de Vienne ou de Berlin, Iris Vermillion et Peter Bronder croquent le couple royal avec justesse que seuls un manque de projection pour l’une et une fatigue grandissante pour l’autre viennent ternir. Après la confirmation aixoise en Tamino, Stanislas de Barbeyrac reprend le rôle du capitaine de la garde du palais d’Hérode. S’il est impeccable vocalement on regrette que le metteur en scène ne soit pas allé au-delà du cliché du jeune homme enamouré.
© Desireé Furoni
C’est d’ailleurs la mise en scène de Livia Sabag qui laisse plus perplexe. Elle se présente sous des décors classiques composés de rochers établis en deux étages, l’étage inférieur réservé aux personnages principaux et le supérieur aux différents commentateurs (gardes, nazaréens, juifs…). On comprend mal pourquoi l’accès au palais se fait par un escalier laissant penser que nous sommes sur le toit. D’autant que la citerne du prophète se trouve de facto au même endroit que la salle de fête. Quelques effets paraissent accessoires comme ces rochers coulissants qui laissent apparaitre un harem où viendront danser des jeunes femmes au moment de la danse des sept voiles. Un espace reconverti en fond de citerne juste avant la décollation de Jokanaan que l’on voit se tenir immobile et serein. Certaines idées sont en revanche fertiles, comme ce ballet de sept danseurs qui portent une femme habillée comme Salomé. Ainsi pendant qu’Hérode poursuit chacune des danseuses de ses avances, on devine le désir qui occupe l’esprit en transe de la jeune princesse : le corps démultiplié d’un homme jeune et fort, tel que le prophète lui est apparu plus tôt.
John Neschling fait pencher la balance de son orchestre homogène et bien en place du côté du lyrisme, parfois aux dépens de l’équilibre avec la scène. Il faut dire que toutes les voix souffrent d’une légère sourdine dès qu’elles se déplacent vers le fond de scène. C’est bien plus dû au dispositif scénique qui offre peu de possibilité de renvoi du son, qu’à la magnifique salle années 1920 du Theatro Municipal.