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Die Zauberflöte — Bruxelles (Bozar)

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Spectacle
19 novembre 2012
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Wolfgang Amadeus MOZART Die Zauberflöte Singspiel en deux actes Livret de Emanuel Schikaneder créé à Vienne au Theater Auf der Wieden le 30 septembre 1791

Pamina Miah Persson Tamino Topi Lehtipuu Sarastro Marcos Fink Königin der Nacht Burçu Uyar Papageno Daniel Schmutzhard Papagena Sunhae Im Première Dame Inga Kalna Deuxième Dame Anna Grevelius Troisième Dame Isabelle Druet Monostatos Kurt Azesberger Premier prêtre / officiant Thomas Bauer Second prêtre Joachim Buhrmann Drie Knaben Florianer Sängerknaben Rias Kammerchor Akademie für Alte Musik Berlin Direction musicale René Jacobs Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, lundi 19 novembre 2012, 19h00

 

Sur la scène du Palais des Beaux-Arts et devant une salle comble, René Jacobs à la tête des meilleures troupes baroques du moment a livré à un public joyeux et passionné, une version très divertissante du chef d’œuvre de Mozart, pleine de vie et d’humanité, sans épanchement ni sentimentalisme.

 

Dès l’ouverture, le tempo, la légèreté de l’orchestre et l’accentuation des contrastes plongent le spectateur dans l’atmosphère d’une comédie burlesque. C’est cet aspect de la Flûte, cette vision au premier degré qui sera privilégié tout au long de la représentation, au détriment d’une lecture plus philosophique. Au fil du concert, le jeu des chanteurs, particulièrement soigné, leur verve individuelle et collective, leur jeunesse, leur plaisir d’être en scène et leur maîtrise de la partition feront de ce spectacle une très belle réussite, sans que jamais l’économie de moyens se fasse sentir.

 

Pas de décor, pas d’accessoire, pas de mise en scène, et pourtant toute l’action est représentée ! Les chanteurs entrent et sortent, bougent beaucoup autour de l’orchestre, tantôt devant tantôt derrière, de sorte que l’œil est autant stimulé que l’oreille. Accordant une attention particulière au texte – que le public suit en traduction dans le livret qu’on lui a remis à l’entrée – maîtrisant les transitions parfois difficiles entre texte et musique, voix parlée et voix chantée, la direction de Jacobs fourmille de détails amusants, de petits ornements, de trouvailles quasi improvisées qui donnent à l’œuvre un souffle nouveau et un irrésistible attrait théâtral. Le rôle quasi soliste de la percussionniste, la très imaginative et pourtant imperturbable Marie-Ange Petit, placée en vedette dans la loge Royale (excusez du peu) assure une véritable spatialisation de la partition; elle pimente son rôle de toute une série de bruitages particulièrement suggestifs, gouttes d’eau, hululements d’oiseaux de nuit et autres coups de tonnerre, renforçant encore cet aspect théâtral.

 

La distribution reprend pour partie celle que Jacobs avait réunie lorsqu’il enregistra l’œuvre pour Harmonia Mundi en 2010 : privilégiant jeunesse et spontanéité, fuyant tout vedettariat, elle cherche à recréer cet esprit de troupe qui devait sans doute animer les acteurs du Théâtre Auf der Wieden lors de la création en 1791, où le talent et les qualités des uns renforcent celui des autres.

 

Comme à l’accoutumée, c’est Papageno qui se taille la part du lion : Daniel Schmutzhard, sous des dehors adolescents, incarne l’oiseleur avec une tendresse irrésistible qui ne manque pas de toucher le public. On tremble, on espère, on trépigne avec lui. Le Tamino de Topi Lehtipuu, forcément plus aristocratique, pêche un peu par manque de caractérisation; la voix est belle, riche en séductions mais pas très puissante – peut-être pas au meilleur de sa forme. Miah Persson accentue le côté infantile du rôle de Pamina, ce qui sied bien à la farce, mais n’incite pas à rencontrer les aspects plus philosophiques du livret. Hystérique à souhait, avec un vibrato un peu large et peu de précision dans l’intonation mais une remarquable efficacité dramatique, Burçu Uyar incarne la reine de la nuit avec panache, déclenchant par ses aigus sensationnels l’enthousiasme mérité du public. Les trois dames lui emboîtent le pas dans le même ton, avec parfois quelques difficultés à suivre ensemble le tempo endiablé du chef…

 

Voix noble et bien timbrée, Marcos Fink campe un Sarastro conciliateur, accueillant, très humain; en Monostatos, Kurt Azesberger pousse jusqu’au comique et à la caricature son rôle de vieux lubrique. Remportant eux aussi toutes les faveurs du public, les très touchants enfants du Florianer Sängerknaben avec leurs petits cols marins endossent les rôles des trois jeunes garçons avec beaucoup de conviction, d’exactitude et d’engagement, là où on ne trouve souvent que fadeur, hésitations et fausses notes.

 

La réalisation orchestrale, enfin, est remarquable à bien des égards : elle donne à chaque pupitre, voire à chaque musicien, une identité propre, lui laissant une part d’improvisation dans l’ornementation (ou du moins c’est ce qu’il semble; comment savoir quelle est la part du chef et la part du musicien dans tout cela ?) tout en contribuant à la qualité de l’ensemble. Elle permet une lisibilité parfaite de la partition grâce à des contrastes très marqués; elle offre des temps de suspension là où le déroulement dramatique l’exige, renforçant ainsi l’écoute des auditeurs et leur attention au texte; elle assure une cohérence parfaite entre instrumentistes et chanteurs. On ne s’ennuie pas un instant malgré l’absence de mise en scène; on se féliciterait même de n’avoir à subir ni fastidieux symbole maçonnique, ni pyramide de carton-pâte…

 

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