Lorsque c’est Joyce DiDonato qui tient le rôle titre de Maria Stuarda à la Deutsche Oper Berlin, il importe peu que l’oeuvre soit donnée en version de concert. Au contraire, les prouesses vocales n’en sont que plus palpables.
Si d’entrée de jeu, Carmen Giannattasio, dans le rôle d’Elizabeth Ière place la barre très haut en affichant un engagement vocal fort et une grande générosité de moyens, tant par ses aigus fulgurants que par le spectacle de ses appâts, elle se fait voler la vedette dès que Marie Stuart apparaît. Son attitude ensuite semble tenir plus du cabotinage que de l’interprétation, ses vocalises et ses trilles paraissant escamotées notamment lorsque les deux protagonistes s’affrontent dans leur duo fatal.
Il faut reconnaître que face à elle, Joyce DiDonato figure la perfection lyrique incarnée. Pour une version de concert son jeu n’en est pas moins crédible, se traduisant par une multitude de mimiques significatives. Son chant et son phrasé, toujours délicats et aboutis, laissent entendre des sons filés dans les aigus d’une chatoyance extrême, les cadences et autres difficultés techniques sont abordées sans force ni relâchement, le tout est parfaitement maîtrisé.
Malheureusement, face à elles, nous retrouvons dans le rôle de Leicester un Joseph Calleja diminué. Après un premier aigu qui vire au couac, le ténor s’interrompt pour invoquer une indisposition de dernière minute. Il passe le reste de la soirée à étouffer des toussotements de circonstance et chante avec une grande économie de moyens. En comparaison, le Talbot de Marco Mimika affiche une santé vocale d’autant plus insolente qu’elle n’est animée d’aucune nuance, à tel point qu’il préfère passer soudain en mode sourdine plutôt que d’écraser ses partenaires lorsqu’il prend part au grand sextuor du premier acte.
Comme souvent chez Donizetti, les belles pages musicales sont réservées aux premiers rôles tandis que les personnages secondaires (Davide Luciano en Sir William Cecil et Christina Sidak en Anna Kennedy) n’ont pas vraiment l’occasion de briller le temps des quelques répliques qu’ils donnent aux deux reines.
L’orchestre et le choeur de la Deutsche oper conduits par Paolo Arrivabeni offrent un terrain musical délicat et sans affèterie qui concourt à mettre en valeur les ciselures vocales des championnes sans jamais les reléguer au second plan.
Au moment des saluts, l’applaudimètre et le lancer de bouquets penchent définitivement pour la diva américaine.