Forum Opéra

Gurrelieder — Paris (Pleyel)

arrow_back_iosarrow_forward_ios
Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
14 mars 2014
Le triomphe de Salonen

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

Arnold Schoenberg

Gurrelieder
Œuvre pour voix et orchestre sur des textes de Jens Peter Jacobsen
Création le 23 février 1913 au Musikverein de Vienne sous la direction de Franz Schreker

Waldemar
Robert Dean Smith
Tove
Katarina Dalayman
Waldtaube
Michelle De Young
Le paysan
Gabor Bretz
Le bouffon Klaus
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke
Récitante
Barbara Sukowa

Chœur de Radio France
Direction
Matthias Brauer
Chœur de la Radio de Leipzig
Direction
Philipp Ahmann
Chef de chœur
Howard Arman
Préparation du chœur de la Radio de Leipzig
Denis Comtet

Orchestre Philharmonique de Radio-France
Direction musicale
Esa-Pekka Salonen

Paris, Salle Pleyel, le samedi 14 mars 2014, 20 heures

 

« Qu’on se promène de nuit dans une grande ville : partout on entend des instruments se faire violer avec une fureur solennelle – le tout entremêlé de sauvages hurlements. Qu’est-ce donc ? Les adolescents, qui sont en train de faire leurs dévotions à Wagner. » L’amer constat de Nietzsche (Wagner provoque la « corruption du goût » et la « corruption des idées » de la jeunesse) a un fond de vérité : le wagnérisme, avec toutes les poses et les imitations qu’il implique, a servi de table d’apprentissage à maints compositeurs dont les premières œuvres datent de la fin du XIXe siècle. Débuts de Bruckner, de Mahler, de Pfitzner, placés sous l’égide, momentanément indépassable, du Leitmotiv. Débuts aussi de Schoenberg qui entreprit, à 25 ans à peine, l’écriture de ses gigantesques Gurrelieder. Comme il se doit, les musiciens forment une foule compacte (150 instrumentistes, 160 choristes, 6 solistes), au service d’une trame où l’amour se mêle à la mort, dans un statisme hautement symbolique qui regarde sans vergogne vers Tristan. Les Gurrelieder sont pourtant bien plus qu’un pêché de jeunesse. Les textures sonores minérales (le prélude !), qui raffinent heureusement les boursouflures que l’on perçoit encore par moments, montrent un art trop puissant pour avoir Wagner comme seule aube : les chœurs, dans la troisième partie, ont un parfum « Sturm und Drang » qui n’est pas sans rappeler le Schumann des Scènes de Faust, auquel une bonne dose d’expressionisme aurait été ajoutée opportunément.

Le romantisme, le Jugendstill, la seconde école de Vienne et jusqu’aux prémisses de l’atonalisme : c’est donc tout cela qu’il faut saisir, dans les Gurrelieder, et c’est tout cela que les interprètes doivent laisser entendre. Pour guider l’Orchestre Philharmonique de Radio-France dans cette tâche hors-norme, qui mieux qu’Esa-Pekka Salonen ? On sait le talent incomparable du chef-compositeur pour rendre limpides les partitions les plus délicates. Prompte à construire une véritable narration musicale, sa battue, tout à la fois précise et passionnée, sécurise et galvanise dans un même mouvement des musiciens chauffés à blanc, portés à un niveau exceptionnel, chez eux dans le déploiement de sonorités oniriques comme dans le brutal martellement des passages les plus percussifs de l’œuvre, enchaînant les climats, dans l’interlude qui précède « Tauben von Gurre », avec une virtuosité stupéfiante. Une même excellence anime les forces conjuguées des chœurs de Radio-France et de la Radio de Leipzig, que des parties extrêmement divisées ne perdent jamais : le chœur final, dans ces conditions, est de ces moments de musique qui vous laissent hagard.

C’est des solistes que viennent alors les seules réserves à exprimer. Presque personne, depuis Ben Heppner, n’a su trouver le mélange de lyrisme et d’héroïsme, l’aisance dans l’aigu comme dans le grave qu’exige Waldemar ; on ne saurait dire si Robert Dean Smith y est parvenu, dont la voix émerge à peine du maelström sonore. Si Katarina Dalayman n’a pas ce problème, et si elle montre, une fois de plus, une magnifique texture de timbre, on rêverait, dans l’idéal, d’une Tove au chant plus lyrique – et au Si aigu plus libre. Grande voix aux intonations parfois engorgées, Michelle De Young réussit, heureusement, un Lied ambigu et inquiétant, superbement engagé. Tandis que Gabor Bretz et Wolfgang Ablinger-Sperrhacke apportent une touche bienvenue d’ironie et de burlesque à l’ensemble, Barbara Sukowa saisit, ce soir comme dans son enregistrement avec Claudio Abbado, tout ce que Pierrot Lunaire doit à la partie du récitant. Triomphe d’une salle comble et comblée : c’est bien le moins.
 
 

 

 

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

3

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Détails

Arnold Schoenberg

Gurrelieder
Œuvre pour voix et orchestre sur des textes de Jens Peter Jacobsen
Création le 23 février 1913 au Musikverein de Vienne sous la direction de Franz Schreker

Waldemar
Robert Dean Smith
Tove
Katarina Dalayman
Waldtaube
Michelle De Young
Le paysan
Gabor Bretz
Le bouffon Klaus
Wolfgang Ablinger-Sperrhacke
Récitante
Barbara Sukowa

Chœur de Radio France
Direction
Matthias Brauer
Chœur de la Radio de Leipzig
Direction
Philipp Ahmann
Chef de chœur
Howard Arman
Préparation du chœur de la Radio de Leipzig
Denis Comtet

Orchestre Philharmonique de Radio-France
Direction musicale
Esa-Pekka Salonen

Paris, Salle Pleyel, le samedi 14 mars 2014, 20 heures

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle