A l’issue des représentations, à Venise, de l’Occasione fa il ladro, à l’automne 1812, le jeune Rossini (il n’a pas encore 21 ans) reçoit commande par La Fenice d’un nouvel opera, seria cette fois. C’est le théâtre qui choisit l’argument, qui sera adapté du Tancrède de Voltaire. Le livret est confié à Gaetano Rossi et tout se prépare sous les meilleurs auspices. Pour l’occasion, à Venise, on veut bien se lamenter sur Tancrède, mais pas voir la fin tragique de l’original. Une fin heureuse est donc concoctée, à laquelle une reprise de l’œuvre quelques mois plus tard à Ferrare remédiera intelligemment. Malheureusement, ce 6 février 1813, la première est interrompue au beau milieu du second acte par l’indisposition de la contralto Malanotte-Montresor, qui chante le rôle-titre, et de celle de la Manfredini-Guarmani, qui chante Amenaide. Il faudra attendre le 11 février pour que l’œuvre soit créée intégralement, remportant un très grand succès, y compris auprès de Stendhal, pour qui tout ceci constituait davantage une promesse qu’un aboutissement : « Ce qui frappe, c’est la jeunesse. Tout y est simple et pur. C’est le génie dans toute sa naïveté. C’est le génie vierge encore » (Vie de Rossini). En voici l’un des moments forts, l’entrée en scène de Tancrède, couronné par le fameux « Di tant palpiti », ici par l’une de celles dont ce fut l’un des rôles fétiches, Marylin Horne, en plein Rossini revival à la fin des années 70.