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Un jour, une création : 5 mars 1883, Henry VIII au sirop ?

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5 mars 2020
Un jour, une création : 5 mars 1883, Henry VIII au sirop ?

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C’est le directeur de l’Opéra, Vaucorbeil, qui propose à Saint-Saëns un livret tiré de la pièce de Calderon de la Barca, Le schisme d’Angleterre qui deviendra Henry VIII pour l’Opéra. Il est vrai qu’il l’avait déjà soumis à Gounod et que ce dernier ne l’avait pas retenu. Saint-Saëns, lui, ne refuse pas ce qui peut lui donner une nouvelle occasion de prouver qu’il est un grand compositeur lyrique à celui qui n’avait pas voulu faire entrer son Samson et Dalila pour la Grande boutique. Quoi de mieux pour cela qu’un sujet de type « Grand opéra », en héritier de Meyerbeer et de Verdi ? Le compositeur se met au travail à l’été 1881. Il lui faudra 18 mois pour en venir à bout. Quatre actes, une histoire bien connue et déjà visitée par les théâtres lyriques, mais des éclats finalement bien sages. Saint-Saëns propose une partition plus subtile que spectaculaire. Malgré des répétitions à couteaux tirés entre chanteurs, compositeur et directeur de l’Opéra, la création, voici 137 ans, se passe très bien. On parle beaucoup de l’œuvre, par des polémiques – un incident lors du 1er tableau de l’acte III, au moment de l’air du Légat du pape, qui conduira Saint-Saëns à retirer le tableau entier. On en parle aussi pour le critiquer parfois vertement. En la matière, Debussy n’est pas le dernier. Il souligne surtout qu’il y a quelque incohérence à mettre en scène un « tigre assoiffé de sang » en lui faisant chanter « des cantilènes trop sucrées propres à attendrir un enfant ». Gounod, lui, n’a pas ces préventions. Il consacre à l’œuvre un long article dans La nouvelle revue, qui se termine ainsi : « Voilà donc, mon cher Saint-Saëns, ton nom désormais attaché à l’une des œuvres qui auront le plus honoré l’art français et notre Académie nationale de musique. Pour ceux qui t’ont connu enfant (et je suis un de ceux-là), ta destinée était certaine ; tu n’as pas eu d’enfance musicale. Infatigablement couvé par ton intelligente et généreuse mère, tu as eu, tout de suite, pour nourriciers les maîtres du grand art ; ils t’ont fait robuste et ferme dans ta voie. Depuis longtemps déjà, la renommée avait devancé pour toi cette popularité dont le théâtre semble avoir le privilège exclusif ; il ne manquait plus à ton autorité que la consécration d’un éclatant succès dramatique ; tu la tiens aujourd’hui. Va donc maintenant, cher grand musicien ; ta cause est victorieuse sur toute la ligne. Parce que tu as été fidèle à ton art, l’avenir sera fidèle à ton œuvre. Dieu t’a donné la lumière et la main d’un maître : qu’il te les conserve longtemps, pour toi comme pour nous tous ». L’histoire, cependant, n’a pas fait justice à cette partition, peut-être trop tardive pour ce qu’elle voulait être ou trop subtile pour ceux qui voulaient qu’elle fût grandiose. Un regain d’intérêt, cependant, a semblé surgir au début des années 2000, mais il n’a pas fait florès. Il n’a cependant pas empêcher la reprise d’une production du Théâtre impérial de Compiègne à Barcelone en 2001 avec dans le rôle de Catherine d’Aragon, rien moins que Montserrat Caballé. Certes son français est des plus hésitant, certes la voix n’est plus ce qu’elle avait été, certes l’extrait est honteusement tronqué, mais c’est quand même la Caballé et dans une œuvre rare d’un grand maître.

 

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