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Un jour, une création : 24 avril 1931, le chef-d’oeuvre consumé d’Albéric Magnard.

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24 avril 2018
Un jour, une création : 24 avril 1931, le chef-d’oeuvre consumé d’Albéric Magnard.

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À l’occasion des 90 ans de la création posthume de Guercoeur d’Albéric Magnard, voici l’article revu et augmenté que nous lui avions consacré il y a quelques années. 

Albéric Magnard compte parmi les grands compositeurs français les plus injustement méconnus voire même oubliés, malgré quelques merveilleux chefs-d’œuvre, trop rarement donnés, en musique de chambre ou symphonique. Il n’a réalisé que deux opéras dont un créé voici 90 ans et qui ressemble beaucoup à un oratorio, Guercœur. Composé entre 1897 et 1901 sur un livret conçu par le compositeur, il n’a jamais été créé du vivant de Magnard. La partition a hélas connu le même sort que son auteur, dont on sait qu’il a voulu empêcher, les armes à la main, un détachement allemand d’envahir sa propriété de Baron sur Oise. Les uhlans allemands y ont donc mis le feu avec son occupant le 3 septembre 1914. 

L’ami de Magnard, Guy Ropartz, reprendra donc la partition pour piano chant et l’orchestration, reconstituée grâce à ses souvenirs. Il en avait en effet dirigé l’acte III à Nancy en 1908 et Gabriel Pierné l’acte I deux ans plus tard. Ce 24 avril 1931, c’est François Ruhlmann qui dirige l’orchestre de l’Opéra de Paris, lui qui avait déjà créé l’autre opéra de Magnard, Bérénice, en 1911.

Le livret, très désabusé, jette un regard très pessimiste sur les effets des révolutions, jugeant qu’elles ne sont qu’un cycle inévitable : un tyran les suscite, il est renversé, le peuple qui le renverse ne sait pas quoi faire de son triomphe, court à l’anarchie, oublie les principes de liberté et de tolérance puis réclame un nouveau tyran pour remettre de l’ordre. Magnard était lui-même très épris des idées républicaines et de ses grands principes contre toute forme de dictature ou d’intolérance.

Guercœur, c’est en effet l’histoire d’un héros tué au combat contre un vilain tyran.  Il erre au paradis mais regrette la vie sur terre et en particulier l’amour de Giselle. Toutes les ombres du Paradis ont beau lui promettre qu’il s’illusionne, la Vérité l’autorise à retourner sur terre pour se rendre mieux compte. Revenu chez lui, il voit que sa femme a surtout été très heureuse de se précipiter dans les bras de son meilleur ami Heurtal et que le peuple libéré du tyran grâce au sacrifice de Guercœur se conduit en foule cruelle et anarchique. Heurtal se verrait d’ailleurs bien en fédérateur dictatorial de ce fatras qui l’acclame en rejetant le souvenir de Guercœur. Giselle applaudit mais l’apparition de son ancien amant la foudroie. Il lui pardonne au nom de la bonté et elle se sentira donc encore plus légitime à le trahir… Le peuple acclame Heurtal et même l’apparition de leur ancien libérateur n’y change rien. Ils veulent une nouvelle dictature et lynchent Guercœur, qui meurt (à nouveau) en demandant à la Vérité de pardonner son orgueil. Recueilli au paradis, il s’en remet à la Vérité et à l’Espoir.

La création, à l’opéra de Paris, est un succès, mais qui ne durera pas. Seule l’initiative heureuse d’un enregistrement – unique à ma connaissance – de l’opéra en 1986 sous la direction de Michel Plasson et avec l’incomparable José van Dam dans le rôle titre, redonnera une vie hélas éphémère à ce chef-d’œuvre, dont voici un court extrait de l’acte II.

 

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