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Un jour, une création : 16 septembre 1966, opéra maudit ou opéra mauvais ?

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15 septembre 2020
Un jour, une création : 16 septembre 1966, opéra maudit ou opéra mauvais ?

Infos sur l’œuvre

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Le défi est de taille en ce début d’année 1966 pour Samuel Barber. À 56 ans, on lui commande une œuvre lyrique inédite pour l’inauguration du nouveau Metropolitan Opera de New York, construit dans le Lincoln Center, vaste centre culturel de Big Apple. L’argument choisi se base sur Antony and Cleopatra de Shakespeare mais les choses se gâtent d’emblée lorsqu’on décide de confier à la fois l’adaptation et la mise en scène à Franco Zeffirelli. Ce n’est pas faire injure à ce dernier, récemment disparu et qui avait le mérite d’assumer pleinement ses choix, que de considérer qu’on ne faisait pas là le pari de la légèreté.

De fait, le péplum scénique imaginé par Zeffirelli est, le jour de la première, l’une des nombreuses causes de l’échec retentissant que connaît l’œuvre de Barber. Les atouts étaient pourtant nombreux : un chef en pleine gloire (Thomas Schippers), une star des plateaux (Leontyne Price, Cléopâtre), quelques valeurs très sûres (Jess Thomas, Ezio Flagello, Rosalind Elias, Justino Diaz), mais le sort s’acharne sur cette création.

Juste avant la première, l’orchestre se met en grève. Une fois le problème jugulé à grand peine, la représentation est confrontée au gigantisme de l’œuvre amplifié par Zeffirelli qui a compressé les 5 actes et 40 scènes de Shakespeare en 3 actes d’une heure chacun. Les solistes ne sont pas moins de 22, les chœurs massifs, les comédiens et autres figurants très nombreux, de même que toute une compagnie de ballet aux effectifs pléthoriques. Le plateau ressemble à un champ de foire.  Pour profiter avantageusement des installations techniques rutilantes du nouvel opéra, le metteur en scène n’y va pas de main morte, si bien que le plateau tournant se grippe lors des répétitions, obligeant à repenser la mise en scène juste avant la première. Leontyne Price s’emmêle un peu les voiles dans l’énorme structure d’aluminium qui représente une pyramide etc. Tout ceci donne à l’œuvre une solide réputation de porte-poisse…

Comme de juste, la presse fusille la représentation, jugeant sévèrement son gigantisme, mais aussi sa musique : « spectacle meyerbeerien, sans âme », « exercice prosaïque, sans esprit » dit-elle en substance. C’est aussi que Barber a convoqué des styles divers, de la comédie musicale à Richard Strauss. Cela n’empêche pas quelques moments de grâce. Conscient des limites de son œuvre, Barber la reprendra quelques années plus tard avec l’aide de Gian Carlo Menotti. Mais la partition ne récupérera jamais le crédit qu’elle n’avait de toute façon jamais acquis auprès du public.

3 ans après le désastre, Schippers enregistrera des extraits de l’opéra avec Leontyne Price pour RCA, dont cet impresionnant « Give me my robe », de l’acte III, directement tiré du texte de Shakespeare, car il faut reconnaître au moins que Zeffirelli a totalement respecté ce dernier, jusqu’à son titre.

 

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