Le rideau se lève. Werther est là, hagard, un pistolet à la main. Il vient de se tirer une balle dans la poitrine. Sa chemise est ensanglantée. Avant de s’effondrer, il va revoir en flash back son existence. Ainsi, paraît-il, voit-on défiler le film de sa vie avant de mourir. Le flash back durera tout le spectacle. Le héros traversera le miroir brisé qui sépare le monde des morts de celui des vivants, et qui servira de cadre à l’ensemble du spectacle.
La mise en scène témoigne du sens dramatique et artistique du metteur en scène Jean-Louis Grinda. Elle est pleine de force, de symbole et de poésie. Hélas, à cause d’une panne de vidéo, les spectateurs de la représentation du dimanche 20 ont été privés des images de la fin, ce qui créa un grand vide dans les dernières minutes du spectacle.
La traversée du miroir brisé, par Werther © Alain Hanel-Opéra de Monte-Carlo
Pour incarner Werther, Monaco nous a sorti un as : Borras.
Jean-François Borras est chez lui ici. Il a passé son enfance dans la Principauté, a grandi parmi les Petits chanteurs de la cathédrale. Est-il besoin de rappeler que c’est dans Werther que Jean-François Borras remplaça Jonas Kaufmann au Metropolitan en 2014 et qu’il connut alors une notoriété internationale ? Son chant a une ligne souple, un timbre fruité, une intensité lyrique qui conviennent parfaitement au personnage romantique. L’émouvant Werther que voilà !
A ses côtés se trouvait l’une de nos grandes mezzos, Stéphanie d’Oustrac. Elle possède une voix admirable, musicale, bien timbrée sur toute l’étendue de sa tessiture. Mais elle se permet des éclats guerriers qui semblent excessifs pour le personnage de Charlotte.
Sophie – la sœur de Charlotte – eut en Jennifer Courcier une interprète adorable, aussi fraîche et vive dans sa voix que dans sa personne.
On a applaudi la classe et la prestance du baryton Jean-François Lapointe dans le rôle d’Albert – le mari de Charlotte.
Belles prestations de deux chanteurs qu’on apprécie depuis longtemps : Philippe Ermelier et Marc Barrard. Le ténor Reinaldo Macias pécha, lui, par sa prononciation peu intelligible.
A la tête du Philharmonique de Monte-Carlo, le chef hongrois Henrik Nanasi déroula avec souplesse et brio la musique magique de Massenet.
En sortant de l’Opéra de Monaco, on peut voir au bas de l’escalier réservé aux princes, un buste du compositeur. Il témoigne de l’attachement qu’avait pour lui, au début du XXe. siècle, le prince Albert 1er. Massenet a la moustache fière, la chevelure romantique. Mais il nous a semblé, en passant, que son regard pétillait plus que d’habitude. Sans doute l’avait-on déjà informé du succès de son Werther…