En marge des représentations de La Finta Giardiniera – dont notre collègue Tania Bracq proposait il y a quelques jours un compte rendu enthousiaste –, William Christie animait à la Cité de la musique une sorte de master class à destination du public qui, en plus d’extraits de l’opéra en question, présentait les jeunes chanteurs de la 9e édition du Jardin des voix.
L’occasion pour le chef, accompagné par Paul Agnew, de se remémorer l’histoire de cette académie créée en 2002 et qui a vu se succéder nombre de chanteurs aux carrières aujourd’hui florissantes ; l’occasion également de donner des clés d’écoute pour une œuvre rarement jouée mais recelant déjà tout le génie dramatique d’un Mozart de dix-huit ans, dont le talent ne demandait qu’à s’épanouir.
Après un rappel du contexte de création de l’œuvre, le duo Christie / Agnew s’emploie à décrire l’orchestre classique en opposition aux orchestres baroque et moderne, ainsi qu’à mettre en lumière les caractéristiques du récitatif et des ensembles dans la production mozartienne, exemples à l’appui.
Le jeune contre-ténor Théo Imart se fait ainsi entendre dans le rôle de Ramiro, et force est de constater que peu de chanteurs sont capables d’interpréter un rôle aussi aigu, écrit à l’origine pour un castrat et depuis longtemps repris par les mezzo-sopranos. La voix est encore jeune, l’expressivité scénique un peu timide ; mais aucun doute que Théo Imart possède toutes les qualités requises pour s’épanouir vocalement, dont un timbre clair et lumineux particulièrement intéressant.
Les trois sopranos de la production, Mariasole Mainini (Sandrina), Lauren Lodge Campbell (Serpetta) et Déborah Cachet (Arminda), en plus d’être des voix prometteuses, font déjà preuve d’une belle efficacité dramatique. On regrette de ne pas les avoir entendues davantage ; mais les récitatifs de Sandrina et Serpetta ont en tout cas démontré un engagement scénique évident. Ne manque plus que les voix mûrissent encore un peu, en gagnant en rondeur et en ampleur, ce qui ne saurait tarder.
Les ténors Rory Carver (Don Anchise) et Moritz Kallenberg (Belfiore) ainsi que la basse Sreten Manojlovic (Nardo) semblent quant à eux posséder une forte expérience de la scène, tout en étant plus assurés vocalement que leurs jeunes collègues. Ils parviennent ainsi à tirer leur épingle du jeu dans les courts extraits musicaux interprétés, et notamment les ensembles dans lesquels ils s’affirment et se font entendre.
A la tête bien sûr de l’orchestre des Arts Florissants (dans une configuration ici très réduite), William Christie dirige une Finta giardiniera vivace et colorée avec une joie bien visible. Mais au-delà de ces quelques pages de musique, au-delà même des clés d’écoute que le chef nous a fournies, cette « leçon de musique » fut l’occasion de constater, une fois de plus, que William Christie fait preuve d’une oreille remarquable pour dénicher les jeunes pousses de son Jardin des voix ; et que, décidément, il a la main verte.