Créée en 2005, déjà reprise en 2009 (avec entre autres Joyce DiDonato et Juan Diego Florez) et en 2011, la production du Barbiere di Siviglia du Royal Opera est l’un des spectacles les plus réussis ce cette maison. L’édition de 2009 avait d’ailleurs fait l’objet d’un DVD et nous ne rentrerons pas pour cette fois dans les détails de la mise en scène, qui n’a pas pris une ride.
En Comte Almaviva, Javier Camarena est absolument épatant. La voix est bien projetée, ronde, sans nasalités, les aigus assurés et brillants, les variations bien venues. Camarena joue parfaitement des différents registres (voix de poitrine ou mixte). A peine peut-on regretter à certaines occasions un manque de fluidité dans les vocalises les plus rapides. Le personnage est sympathique, bon acteur, virevoltant et très à l’aise dans une production physiquement exigeante. Trop sympathique, le ténor mexicain passe toutefois à côté de la dimension aristocratique d’Almaviva, qui n’est pas un simple amoureux entreprenant, mais aussi un comte conscient de son rang. La voix chaude aux graves profonds de Daniela Mack se marie idéalement avec le timbre clair de Camarena. Si certains aigus sonnent un peu poussés, les vocalises sont précises et rapides, mais on regrette un manque de folie dans les variations. Les diverses émotions du personnage sont excellemment rendues : espiègle et rouée, mais aussi sobrement désespéré quand elle ne croit plus à la sincérité de Lindoro. José Fardilha est scéniquement amusant, mais parfois dépassé par les exigences de la partition, fâché après Rosina, mais aussi avec la justesse. Sans être impérissable, Carlo Lepore offre un Don Basilio de très bonne tenue (il faut dire que nous avons trop de références en tête pour ce rôle en or). Pour ses débuts in loco, Florian Sempey casse la baraque : la voix saine, le timbre agréable… et le chanteur témoigne d’une imagination certaine dans ses variations (ce qui est bien rare chez les interprètes de ce rôle). Le baryton français est aussi une bête de scène, drôle sans vulgarité, et il maîtrise sans problème le chant syllabique, comme un pur chanteur italien. Henrik Nánási dirige une partition qui nous a paru complète : près de 3 heures de musique où l’on ne s’ennuie jamais grâce à une battue vive et à une précision qui ne met jamais les chanteurs en danger. Orchestre et choeurs sont en pleine forme !