Giacomo Puccini (1858-1924)
Tosca
Opéra en trois actes
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica
d’après la pièce de Victorien Sardou
Créé le 14 janvier 1900 au Thêatre Costanzi de Rome
Mise en scène : Jose Maria Condemi
Décors et costume : Thierry Bosquet
Floria Tosca : Adrianne Pieczonka
Mario Cavaradossi : Carlo Ventre
Baron Scarpia : Lado Ataneli
Cesare Angelotti : Jordan Bisch
Le sacristain : Dale Travis
Spoletta : Joel Sorensen
Sciarrone : Austin Kness
Un geôlier : Kenneth Kellogg
Un berger : Zachary Weisberg
San Francisco Opera Orchestra and Chorus
Chef des Chœurs : Ian Robertson
Direction musicale : Marco Armiliato
San Francisco, le 26 juin 2009
D’une fidélité à toute épreuve
Une Tosca d’une fidélité à toute épreuve comme on n’en imaginerait plus en Europe. Quitte à être traité de réactionnaire, nous ne sommes pas mécontent, une fois n’est plus coutume, de retrouver l’époque et les lieux du crime tels que décrits par le livret : l’église Sant’Andrea della Valle avec ses fresques, sa Madone et son bénitier, le palais Farnese plus vrai que nature et la terrasse du Château Saint-Ange certifiée authentique avec en toile de fond un ciel romain aux multiples coupoles, plus qu’il n’en faut même afin de se conformer à tous les sons de cloches ajoutés par Puccini dans le prélude du 3e acte. Respectueuse des didascalies jusqu’à l’intégrisme, refusant toute place à l’imagination, une telle mise en scène repose d’abord sur ses protagonistes. Ce sont là ses limites et le danger. Charge à eux d’incarner avec la même fidélité Floria, Mario et Scarpia (pour la petite histoire, quel est donc le prénom du baron ?). Pas d’artifice donc, comme on a pu le voir dernièrement à Bordeaux ou ailleurs, mais la vérité des personnages dans leur démesure : être un monstre sacré ou ne pas être.
A ce petit jeu, la soprano canadienne Adrianne Pieczonka tire les marrons du feu : Floria Tosca colossale, tranchante dans l’aigu, confondante dans le grave (les dernières répliques du II, notamment un « E morto ! Or gli perdono » d’anthologie). Impériale et impérieuse mais capable de nuances – le « Vissi d’arte », attaqué piano, qui use des variations d’intensité – et enfin une endurance à toute épreuve, avec du début à la fin de l’opéra, la même présence et la même acuité.
Un cran en dessous, le Scarpia de Lado Ataneli dont le leadership bât de l’aile au premier acte – « Un tal baccano in chiesa » manque d’autorité et le « Te Deum » d’emphase. Le deuxième acte présente heureusement le baron sous un jour plus conforme à ce qu’on peut en attendre : sadique avec enfin des intonations perverses, des chuchotements, des sifflements, des feulements, des rugissements, dans la limite de ses moyens car son Scarpia demeure malgré tout plus raffiné que brutal.
De Mario Cavaradossi, Carlos Ventre possède d’abord et surtout l’héroïsme, ce côté « tête brûlée » qui nous vaut au II des « Nego », des « Vi sfido » et des « Vittoria » inépuisables de force et de souffle. Hélas, « Recondita armonia » à la ligne écorchée et à la dernière note tenue au-delà de la décence relève de la mélodie napolitaine ; « E lucevan la stelle », plus probe, souffre d’un excès d’expression ; une telle musique peut être vulgaire si on la surligne.
A la baguette, Marco Armiliato privilégie l’action à l’atmosphère. Le prélude du 3e acte manque de poésie (et le berger de Zachary Weisberg d’angélisme) mais le drame éclabousse chaque mesure de la partition.
Christophe Rizoud
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