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Don Carlo — Bordeaux

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Spectacle
27 septembre 2015
Ces nobles sanglots que l’on accorde aux héros

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opéra en quatre actes (1867, version en italien, dite de Milan)

Livret de Joseph Méry et Camille du Locle d’après le drame de Friedrich Schiller

Détails

Mise en scène

Charles Roubaud

Décors

Emmanuelle Favre

Costumes

Katia Duflot

Lumières

Marc Delamézière

Vidéo

Virgile Koering

Elisabetta

Elza van den Heever

Eboli

Keri Alkema

Tebaldo

Rihab Chaieb

Philippe II

Adrian Sâmpetrean

Don Carlo

Leonardo Caimi

Rodrigo

Tassis Christoyannis

Le Grand Inquisiteur

Wenwei Zhang

Un Moine

Patrick Bolleire

Le Comte de Lerma

Frédéric Reussard

Un Héraut Royal

Thomas Bettinger

Une voix céleste

Anaïs Constans

Orchestre National Bordeaux Aquitaine

Chœur de l’Opéra National de Bordeaux et Chœur Intermezzo

Chef de chœur

Salvatore Caputo

Directeur musical

Paul Daniel

Bordeaux, Auditorium, dimanche 27 septembre, 15h

C’est la première fusée du bouquet final de Thierry Fouquet à la tête de l’Opéra national de Bordeaux (il sera remplacé par Marc Minkowski à compter de septembre 2016) : Don Carlo dans sa version italienne en quatre actes proposé non pas au Grand Théâtre mais dans l’Auditorium, nouvelle salle de concert de 1440 places à porter au crédit d’un mandat de 20 années. Malgré quelques retards à l’allumage – le remplacement de Carlos Ventre par Leonardo Caimi dans le rôle-titre et l’annulation pour raisons de santé d’Alain Lombard dont la présence aurait bouclé la boucle – le coup fait mouche.

Appelé à la rescousse, Paul Daniel fait mieux que reprendre les choses en main*. Sans éviter quelques dérapages côté cuivres et quelques décalages dans la scène monumentale de l’autodafé, le directeur musical de l’ONBA équilibre les forces en présence, telles des bûches dans l’âtre, souffle et attise jusqu’à ce que le drame s’enflamme en un gigantesque brasier émotionnel. Ah, le quatrième acte avec ce « tu che la vanita » chanté comme une scène de folie par Elza van den Heever, femme possédée par les démons de ses souvenirs et reine libérée du carcan dans lequel le statisme scénique l’avait jusque-là enfermée ; Elisabeth assumant les  contraintes d’une tessiture trop grave et mesurant à la perfection le débit sonore d’une voix immense qu’elle sait réduire à un mince filet. Le duo ensuite la voit seule engagée face à un Don Carlo dépassé par les enjeux vocaux et théâtraux de son rôle mais cette solitude est de celle qui rend le dialogue entre les deux amants déchirant car impossible. Le « Oh ciel » final, longuement tenu, fait voler en éclats les murs du monastère de Saint-Just.

Cette dernière image vient racheter l’inertie à laquelle Charles Roubaud avait condamné ses personnages, posés comme des pions sur la scène entièrement nue. Si spectaculaires soient les projections vidéos utilisées pour contourner les difficultés posées par une salle privée de cintres et de coulisses, elles ne sauraient tenir lieu de mise en scène durant les quatre actes impartis. Placer le chœur – en grande forme – dans les fauteuils au-dessus du plateau est un moyen judicieux pour éviter des entrées et sorties souvent fastidieuses. Des costumes fidèles à l’époque du drame cautionnent les rares libertés prises avec les didascalies. Et sinon ? Pas grand-chose qui ne sépare cette interprétation figée d’une version de concert.


© Frédéric Desmesure

Par leur capacité d’expression, il incombe alors aux voix de secourir des corps privés de mouvement. Non pas Leonardo Caimi, Don Carlo impétueux qui – on l’a dit – n’a pas encore dompté les difficultés d’un rôle ingrat à tous points de vue ; mais Elza van den Heever  donc et autour d’elle, Adrian Sâmpetrean, monarque juvénile avec ce que cette jeunesse implique de défaut d’autorité, de manque d’ampleur vocale (dans le duel avec l’inquisiteur, la partie est jouée avant même d’avoir commencé) mais aussi de vulnérabilité. Philippe II roi despotique, père tyrannique, époux intransigeant ? Pas forcément si l’on en juge à un « Ella giammai m’amo » qui s’apparente moins à une méditation égocentrique qu’à une déploration d’amour presque adolescente. L’intérêt de la composition réside dans cet anachronisme qui fait le souverain frère du fils. De Posa, Tassis Christoyannis a tout ce que l’on peut souhaiter : la longueur, la noblesse, l’intelligence du mot, le tracé élégant de la ligne et un timbre feutré qui convient à un personnage dénué de noirceur. Keri Alkema jongle avec ses deux registres pour venir à bout d’Eboli. N’est pas mezzo qui veut, quand bien même l’étoffe sonore de la voix possède l’épaisseur chaleureuse que l’on associe à cette tessiture. Mais l’aigu griffe suffisamment pour faire oublier ce que le grave a parfois d’artificiel. La princesse est une tigresse. Un grand inquisiteur sepulcral et marmoréen – Wenwei Zhang –, un « frate » plausible en empereur encapuchonné – Patrick Bolleire – et une « Voce dal cielo » considérée aujourd’hui comme un des espoirs du chant français – Anaïs Constans – complètent cette galerie de héros auxquels, à en croire Elisabeth dans une de ces dernières répliques, les femmes accordent toujours de nobles sanglots. Les femmes, mais pas seulement.

* les deux dernières représentations, les 30 septembre et 2 octobre, seront dirigées par Pierre Dumoussaud, premier prix des « talents chefs d’Orchestre 2014 » de l’ADAMI et assistant chef d’orchestre de l’ONBA à l’Opéra national de Bordeaux depuis la saison 2014-2015.
 

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Opéra en quatre actes (1867, version en italien, dite de Milan)

Livret de Joseph Méry et Camille du Locle d’après le drame de Friedrich Schiller

Détails

Mise en scène

Charles Roubaud

Décors

Emmanuelle Favre

Costumes

Katia Duflot

Lumières

Marc Delamézière

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Virgile Koering

Elisabetta

Elza van den Heever

Eboli

Keri Alkema

Tebaldo

Rihab Chaieb

Philippe II

Adrian Sâmpetrean

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Leonardo Caimi

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Bordeaux, Auditorium, dimanche 27 septembre, 15h

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