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Der Traumgörge — Nancy

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Spectacle
2 octobre 2020
Le bel endormi

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Der Traumgörge, opéra en deux actes avec épilogue
Composé par Alexander von Zemlinsky
sur un livret de Leo Feld
Créé à l’Opéra de Nuremberg le 11 octobre 1980

Adaptation pour orchestre de chambre
Jan-Benjamin Homolka

Détails

Mise en scène
Laurent Delvert
Décors
Philippine Ordinaire
Costumes
Petra Reinhardt
Lumières
Nathalie Perrier
Chorégraphie
Sandrine Chapuis

Görge
Daniel Brenna
Gertraud/Princesse
Helena Juntunen
Grete
Susanna Hurrell
Le Meunier
Andrew Greenan
Le Pasteur / Matthes
Igor Gnidii
Hans
Allen Boxer
Züngl
Alexander Sprague
Kaspar
Wieland Satter
Marei
Aurélie Jarjaye
L’Aubergiste
Kaëlig Boché
La Femme de l’Aubergiste
Amandine Ammirati

Orchestre de l’Opéra national de Lorraine
Chœurs de l’Opéra national de Lorraine et de l’Opéra de Dijon
Chefs de chœur
Anass Issmat et Guillaume Fauchère

Direction musicale
Marta Gardolińska

Nancy, Opéra national de Lorraine, mercredi 30 septembre 2020, 20h

Mener à terme une nouvelle production lyrique relève déjà de l’exploit dans les temps présents – l’annulation à Reims nous l’a cruellement rappelé – et c’est peut-être encore plus vrai quand on se donne pour projet de monter la première française d’un opéra longtemps oublié dans un carton des archives viennoises. Der Traumgörge  d’Alexander von Zemlinsky, commandé par Mahler alors directeur de l’Opéra de Vienne, livré en 1905 et rangé soigneusement avec le départ de ce dernier de l’Opéra, ne sera redécouvert que soixante-quinze ans plus tard, pour connaître une création posthume à Nuremberg en 1980. Depuis, l’œuvre n’a retrouvé la scène qu’à quelques reprises en Allemagne. C’était donc la première française de cet opus d’un compositeur charnière que le nouveau directeur de l’Opéra de Nancy Matthieu Dussouillez se proposait de mettre à la scène quand fut annoncée la saison. Un certain virus passé par là, il aura fallu adapter les ambitions. Belle anticipation que de commander à Jan-Benjamin Homolka une adaptation pour orchestre de chambre et satisfaire ainsi aux règles de distance physique qui régissent jusqu’à nouvel ordre nos vies sociales.

Voici donc l’orchestre de l’Opéra national de Lorraine réduit peu ou prou au tiers de ses effectifs et surtout de ceux exigés par le compositeur. La jeune Marta Gardolinska, élève de Gustavo Dudamel à Los Angeles, se sort avec brio de cette situation étrange. L’œuvre, un roman picaresque (Bildungsroman) évoque aussi bien Siegfried et les murmures de la forêt – le côté antipathique du héros en moins – que les affres d’Alvaro dans Die Gezeichneten de Schreker. En temps normal, le défi pour le chef est d’organiser des masses orchestrales pléthoriques, de travailler sans relâche couleurs, ambiances et contrastes pour assaisonner au plus juste la trame dramatique d’un récit qui se ménage des transitions et des climax gargantuesques. Bien évidemment, avec des vents cantonnés à un instrument par pupitre, des cordes réduites de deux tiers etc., les codas et interludes tombent à plat malgré une sonorisation discrète. Pourtant la cheffe polonaise scande d’une battue précise le récit tout en mettant en musique, tel un DJ devant plusieurs platines, un ensemble de sonates pour instruments solistes afin de rendre justice à la suavité vénéneuse de cette partition. Le succès de la soirée lui revient en très large partie.


© Louis Fernandez
 

Le plateau vocal défend l’œuvre et ses nombreuses chausse-trappes. Musique post-wagnérienne, expressionniste si l’on veut forcer le trait, elle exige tout comme chez Strauss, de survoler des écarts redoutables et d’assoir sa ligne vocale sur un souffle robuste. La taille de l’orchestre exige enfin des formats vocaux conséquents. Les Chœurs de l’Opéra national de Lorraine et de celui de Dijon délivrent une prestation millimétrée qui épouse la versatilité dévolue aux foules par le livret : tantôt hargneuses tantôt dans la douceur et l’empathie. Les seconds rôles s’insèrent dans ce dispositif avec la même réussite. On notera tout particulièrement Wieland Satter qui fait de Kaspar une sorte de Hagen révolutionnaire, la puissance du stentor avec ; Aurélie Jarjaye qui croque Marei en véritable harpie ; ou encore Andrew Greenan dont le Meunier irascible rend parfaitement lisible tout le conflit familial larvé qui se joue au premier acte. Seul Allen Boxer manque de puissance vocale pour affirmer Hans, fat personnage évoquant Belcore dans les chausses vocales d’un Tambour Major version baryton. La partition réserve surtout trois rôles principaux ardus. Grete, la fiancée que Görge abandonnera à Hans, dont le soprano plus léger épouse les facilités et la douceur de timbre de Susanna Hurrel. Piani et demi-teintes accompagnent la verve comique de la chanteuse dans un portrait attendrissant de jeune-fille à fort caractère. Helena Juntunen incarne avec métier Gertraud, « la sorcière » qui deviendra princesse : longueur du souffle et aigu cristallin pour le personnage de lumière s’opposent aux couleurs fauves et la diction acérée qu’elle réserve à la prétendue sorcière ostracisée. Daniel Brenna enfin joue à se faire peur pendant le premier acte, celui qui rapproche le plus son personnage de Siegfried, rôle autrement plus lourd et long que le ténor américain défend souvent. Aucune difficulté dans les passages élégiaques où son timbre clair assis sur une projection remarquable lui permettent de très belles nuances et couleurs qui viennent enluminer les récits de Görge le rêveur conteur : le chat Murr, les murmures de la rivière. Pourtant deux envolées le conduisent à l’accident où l’aigu se charge de graillon. La deuxième partie le trouve plus à son aise tant dans les scènes solitaires que dans les longs duos avec Gertraud.

A la mise en scène, Laurent Delvert fait le choix d’un dispositif unique : un plan incliné sur lequel s’écoule assez bruyamment une petite rivière et des praticables amovibles qui vont délimiter les espaces intimes : la maison du meunier, l’auberge etc. Le tout est élégamment surpiqué par des éclairages (Nathalie Perrier) et quelques pyrotechnies au deuxième acte. Malgré les références à Napoléon, c’est plutôt un conte intemporel qui nous est présenté. Las, le livret pas toujours très bien ficelé (Görge passe d’idéaliste à ivrogne désabusé d’un acte à un autre, refuse de s’engager avec la jacquerie pour une raison obscure etc.) ne trouve guère plus de réponse dans l’illustration proposée. A tout le moins celle-ci réussit à construire le merveilleux, ressort principal du livret et support de Zemlinsky pour déployer des trésors de composition.

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Der Traumgörge, opéra en deux actes avec épilogue
Composé par Alexander von Zemlinsky
sur un livret de Leo Feld
Créé à l’Opéra de Nuremberg le 11 octobre 1980

Adaptation pour orchestre de chambre
Jan-Benjamin Homolka

Détails

Mise en scène
Laurent Delvert
Décors
Philippine Ordinaire
Costumes
Petra Reinhardt
Lumières
Nathalie Perrier
Chorégraphie
Sandrine Chapuis

Görge
Daniel Brenna
Gertraud/Princesse
Helena Juntunen
Grete
Susanna Hurrell
Le Meunier
Andrew Greenan
Le Pasteur / Matthes
Igor Gnidii
Hans
Allen Boxer
Züngl
Alexander Sprague
Kaspar
Wieland Satter
Marei
Aurélie Jarjaye
L’Aubergiste
Kaëlig Boché
La Femme de l’Aubergiste
Amandine Ammirati

Orchestre de l’Opéra national de Lorraine
Chœurs de l’Opéra national de Lorraine et de l’Opéra de Dijon
Chefs de chœur
Anass Issmat et Guillaume Fauchère

Direction musicale
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Nancy, Opéra national de Lorraine, mercredi 30 septembre 2020, 20h

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