Forum Opéra

Mignon — Genève

Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
18 mai 2012
Condamnée au purgatoire

Note ForumOpera.com

2

Infos sur l’œuvre

Opéra-comique en trois actes et cinq tableaux (1866)
Livret de Jules Barbier et Michel Carré d’après Wilhelm Meisters Lehrjahre de Goethe

Détails

Mise en scène
Jean-Louis Benoît
Décors
Laurent Peduzzi
Costumes
Thibaut Welchlin
Lumières
Dominique Bruguière
Reprise des lumières
Roberto Venturi
Chorégraphie
Lionel Hoche
Coaching musical et linguistique
Anita Tyteca

Mignon
Sophie Koch
Wilhelm Meister
Paolo Fanale
Philine
Diana Damrau
Lothario
Nicolas Courjal
Frédéric
Carine Séchaye
Laërte
Emilio Pons
Jarno
Frédéric Goncalves
Un serveur
Laurent Delvert

Chœur du Grand Théâtre de Genève Direction
Ching-Lien Wu Orchestre de la Suisse Romande
Direction musicale
Frédéric Chaslin

Grand-Théâtre de Genève, vendredi 18 mai 2012, 20h

 

La salle Favart fêtait en 1955 la deux millième représentation de Mignon. Depuis, l’œuvre phare d’Ambroise Thomas a quasiment disparu de l’affiche. En 2010, Jérôme Deschamps, tout à son entreprise de réhabilitation d’un répertoire dont il lui incombe de raviver la mémoire, avait eu la bonne idée de sortir la petite Bohémienne du placard. L’initiative, confiée à Jean-Louis Benoît pour la mise en scène et à Francois-Xavier Roth pour la direction musicale, avait été chaleureusement accueillie tant par la critique que par le public. C’est cette même production que vient de reprendre le Grand-Théâtre de Genève avec une distribution entièrement renouvelée, qui n’est pas le moindre des atouts de cette reprise.

En 2010, le parti-pris de proposer la version initiale avec dialogues parlés, quand Ambroise Thomas avait par la suite transformé son opéra-comique en grand-opéra, se justifiait – pour ne pas dire s’imposait – compte tenu du contexte. Ce choix paraît beaucoup moins adapté à Genève où l’affiche  se plie mal à l’alternance parlé-chanté qui caractérise le genre opéra-comique. Empêtrés dans des dialogues dont ils peinent à maîtriser le ton – quand ce n’est pas la langue – les chanteurs réunis ici, aussi grands soient-ils, ont eu du mal à nous persuader de la force dramatique de Mignon.

Que la musique reprenne ses droits et l’intérêt monte d’un cran, de plusieurs même lorsqu’il s’agit de Sophie Koch dont le rôle de Mignon semble répondre précisément au tempérament vocal (bien plus que Marylin Horne qui au disque fait de la jeune bohémienne une cantinière). L’ambivalence du chant, intérieur et brillant, l’ambiguïté du registre, sombre mais capable d’aigus lumineux, reflète la personnalité de l’adolescent, mi-garçon mi-fille, mi-pauvresse mi-princesse, mi-soumise mi-rebelle. Le mezzo-soprano, toujours intelligible sait tracer les longues phrases sentimentales que lui offre la partition, avec une justesse d’expression qui rend l’interprétation particulièrement sensible. Au contraire, Diana Damrau en fait comme toujours un peu trop. Mais c’est exactement ce qu’on lui demande dans le cas présent. La soprano peut rajouter à l’envi petits rires, pas de danse et autres simagrées. Philine est ainsi : coquette, vive, insupportable. La voix s’appuie sur un médium élargi, la vocalise reste précise mais le suraigu, s’il est juste, se fait désormais rare. Les amateurs de coloratures spectaculaires en seront pour leur frais. Moins attendue et d’autant plus méritoire, la prononciation du français est irréprochable.

Le français, parlons-en ! Il est la clé de voûte d’un tel répertoire : s’il est pris en défaut, tout s’écroule. C’est le point fort du Lothario janséniste de Nicolas Courjal et le point faible du Wilhem Meister de Paolo Fanale. Occupé à dompter nos phonèmes, le ténor se bat en début de soirée avec une émission engorgée et des sonorités nasales. Qu’il oublie les impératifs de la langue et le chant, s’il n’est pas davantage idiomatique, prend une toute autre ampleur. En témoigne à la fin de l’opéra, un « elle ne croyait pas » radieux et enfin nuancé.

Membre de la troupe des jeunes solistes en résidence, Carine Sechaye (Frederic) et Emilio Pons (Laerte) ont maille à partir avec des rôles qui demandent des acteurs plus que des chanteurs. La première réussit une composition d’une sincérité désarmante et négocie avec panache son seul air (« me voici dans son boudoir »). Le deuxième, plus exposé, peine à trouver ses marques. L’engagement et le potentiel sont là mais la déclamation française, essentielle pour Laerte, demeure approximative.

Toujours le même problème de version, que l’on rend également responsable du sentiment de frustration laissé par la direction de Frederic Chaslin : précise, respectueuse des volumes, raffinée avec un Orchestre de la Suisse Romande qui répond exactement aux intentions du chef et des Chœurs du Grand Théâtre de Genève qui démontrent une belle cohésion. En un mot  remarquable, si la lecture ne semblait freinée dans son élan par le retour incessant au théâtre parlé.

La mise en scène de Jean-Louis Benoît nous laisse aussi sur notre faim mais ce n’est pas cette fois pour des raisons philologiques. A Paris, son approche correspondait à la dimension des lieux et à l’esprit d’ingénieuse économie que le budget de l’Opéra-Comique dicte à Jérôme Deschamps. Transplantés dans l’espace autrement vaste du Grand-Théâtre de Genève, les décors et la scénographie flottent comme un corps maigre sous un vêtement trop large. Dans la salle, on remarque de nombreux fauteuils vides, malgré le prestige de la distribution. Non, décidément, Mignon n’a pas fini son purgatoire.

Version recommandée

Thomas: Mignon | Compositeurs Divers par Antonio de Almeida

 

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

2

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Opéra-comique en trois actes et cinq tableaux (1866)
Livret de Jules Barbier et Michel Carré d’après Wilhelm Meisters Lehrjahre de Goethe

Détails

Mise en scène
Jean-Louis Benoît
Décors
Laurent Peduzzi
Costumes
Thibaut Welchlin
Lumières
Dominique Bruguière
Reprise des lumières
Roberto Venturi
Chorégraphie
Lionel Hoche
Coaching musical et linguistique
Anita Tyteca

Mignon
Sophie Koch
Wilhelm Meister
Paolo Fanale
Philine
Diana Damrau
Lothario
Nicolas Courjal
Frédéric
Carine Séchaye
Laërte
Emilio Pons
Jarno
Frédéric Goncalves
Un serveur
Laurent Delvert

Chœur du Grand Théâtre de Genève Direction
Ching-Lien Wu Orchestre de la Suisse Romande
Direction musicale
Frédéric Chaslin

Grand-Théâtre de Genève, vendredi 18 mai 2012, 20h

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle