Natif de Buenos Aires, ancien membre de l’Opéra Studio de l’Opéra National de Paris, la basse Nahuel Di Pierro a longtemps été considéré comme l’un des talents à surveiller de sa génération. Il n’est désormais plus guère question de le surveiller, vu que son talent a largement éclaté au grand jour. Le voici répondant à notre questionnaire de Proust, légèrement customisé.
Mon meilleur souvenir dans une salle d’opéra ?
Au Teatro Colón à Buenos Aires, j’avais sept ans et je faisais mes débuts avec la maitrise de l’opéra dans Help! Help! The Globolinks de Menotti. Je me souviens du moment où le rideau s’est levé et où j’ai pu sentir les spectateurs respirer. J’ai su que j’avais trouvé le plus bel endroit du monde : la scène.
Mon pire souvenir dans une salle d’opéra ?
J’étais malade et j’avais malgré tout accepté de chanter… et vers la fin du deuxième acte la pharyngite a été plus forte que ma voix.
Le livre qui a changé ma vie ?
Rencontres avec des hommes remarquables de G. I Gurdjieff et Le maître et Marguerite de M. Bulgakov
Le chanteur mort que je voudrais ramener à la vie pour chanter avec ?
Probablement Maria Callas
Mon plus grand moment de grâce dans un musée ?
J’en ai eu plusieurs… Devant Le Printemps de Botticelli aux Uffizzi à Florence. Au musée Archéologique d’Athènes devant la statue du Dieu du Cap Artémision (Zeus ou Poséidon on ne sait pas) qui a été trouvée au fond de la mer, et je me souviens, aussi, d’avoir été absorbé par Le jardin des délices de Jérôme Bosch à Madrid.
La ville où je me sens chez moi ?
Buenos Aires et Paris
La ville qui m’angoisse ?
Buenos Aires et Paris
Ce qui, dans mon pays, me rend le plus fier ?
Le Tango et le vin.
Le metteur en scène dont je me sens le plus proche ?
Jean-François Sivadier et Marcelo Lombardero
Mon pire souvenir avec un chef ?
Le chef qui arrive à la première répétition musicale et ouvre la partition pour la première fois.
Si j’étais une symphonie ?
Beethoven, Symphonie n°2
Et une sonate ?
Schubert, Sonate n° 18 en Sol majeur
Et un quatuor à cordes ?
Encore Beethoven, n°14 Op 131
Si je devais chanter à mes propres funérailles, quel serait la dernière pièce ?
Si je dois chanter à mes propres funérailles cela veut dire que je reviens des enfers ; donc je m’amuserais en faisant peur aux amis et à la familie. Donc peut-être Le Commendatore de Don Giovanni ?
Le chanteur du passé qui me rend fou ?
Cesare Siepi et Frank Sinatra
Le chanteur du présent qui me rend fou ?
J’admire Michele Pertusi, Michael Spyres, Sabine Devieilhe, Rosa Feola…
Le compositeur auquel j’ai envie de dire « mon cher, ta musique n’est pas pour moi » ?
Leoncavallo
Si j’étais un Lied ou une Mélodie.
Auf der Donau de Schubert/Mayrhofer
Mon pire souvenir historique des 30 dernières années.
La crise sanitaire. Voir les économies s’écrouler, surtout celles des pays les plus fragiles. La culture considérée comme non essentielle pour les pays les plus riches… les grands laboratoires qui développent des vaccins et les vendent au lieu de les partager avec les pays les plus pauvres. Je crois qu’en 37 ans de vie sur terre, je n’ai jamais connu une période aussi sombre.
Le rôle que je ne chanterai plus jamais.
J’ai envie de croire que je ne chanterais plus le Messager de La Traviata.
Ma devise
Je n’ai pas de devise… Juste prendre du plaisir dans l’instant présent, en répondant à ce questionnaire