Après un Requiem de Berlioz à la Philharmonie vendredi dernier, où il a été à peu près le seul à faire l’unanimité, Bryan Hymel offrait hier salle Cortot à une poignée de parisiens, dont une majorité d’auditeurs de Radio Classique*, un avant-goût de son prochain album, Héroïque, à paraître chez Warner Classics dans les jours à venir. Entre deux salves de contre-ut longs comme le bras, le ténor américain a répondu en public aux questions de notre confrère Laurent Bury, expliquant non sans humour que ses origines acadiennes imposent de prononcer son nom comme « e-mail », redisant avec émotion son amour de l’opéra français, révélant qu’il reviendrait bientôt en France, dans La Damnation de Faust et La traviata à l’Opéra Bastille mais aussi dans Madama Butterfly aux Chorégies d’Orange en 2016.
A l’écouter triompher d’airs aussi coriaces que ceux d’Arnold (Guillaume Tell), Enée (Les Troyens), Jean (Hérodiade), Vasco de Gama (L’Africaine) ou Sigurd, on se dit que c’est dommage qu’il perde son temps avec Alfredo et même Pinkerton, rôles à la portée de pas mal de ténors, quand il est aujourd’hui un des seuls à pouvoir porter à bout de bras tout un bloc de répertoire délaissé faute d’interprètes capables de le défendre. Puissent les directeurs de maisons d’opéra à la recherche d’idées se pencher sur ce premier récital discographique, fort d’un programme aussi exigeant que judicieux, dont Bryan Hymel a chanté en bis d’une voix d’acier et sans une pointe d’accent l’extrait le plus rare, tiré de Rolande et le mauvais garçon d’Henri Rabaud, qui n’avait pas été enregistré depuis Georges Thill. C’est dire où la barre est placée.
* Ce récital sera retransmis sur Radio Classique le mercredi 18 février à 20h