Créé en 1990 à Montpellier le projet éducatif Opéra Junior a trois objectifs convergents, sociaux, pédagogiques et artistiques. Cette année Jérôme Pillement, son directeur, a choisi L’Etoile comme support du projet. C’est toujours une joie d’entendre cette œuvre à la musique si riche et au livret si littéraire sous ses dehors loufoques puisqu’il doit beaucoup à Verlaine, comme l’a montré Roger Delage, grand connaisseur de Chabrier. On n’en est que plus déconcerté de découvrir que le metteur en scène a introduit çà et là du Shakespeare et modifié le final. Benoît Bénichou gère au mieux la pénurie de moyens et semble avoir acquis une complète maîtrise de l’espace scénique ; saura-t-il ne pas imiter ses idoles Marthaler et Warlikowski ? Cette interrogation accompagne celles nées de l’interprétation. L’enthousiasme des jeunes, chanteurs et acteurs, est patent mais la verdeur et la faible projection de certaines voix solistes aussi. Seule Héloïse Mas, qui chante Lazuli, avec un beau timbre de mezzo et un bon phrasé émerge indiscutablement. Quant à l’orchestre, dirigé par Jérôme Pillement, est-ce l’acoustique ou sa composition, si on ne perd rien des chromatismes chers au compositeur cette interprétation nous semble dépourvue de la finesse entendue d’autres fois, où les parti pris harmoniques déconcertants voisinaient avec des nuances bien rares ici, et un niveau sonore de fête foraine met à la peine maint soliste. Sans doute les parents et les amis des jeunes interprètes nageaient-ils dans la joie, mais cette production avait-elle sa place dans une saison d’Opéra National ? Comme eût dit Chabrier, un chou est un chou et une carpe n’est pas un lapin. [Maurice Salles]