La production de l’Arcal de La Petite Renarde rusée dont Laurent Bury avait rendu compte en janvier dernier continue sa tournée triomphale en passant par l’Opéra de Massy. Elle permet de constater que le spectacle, maintenant bien rodé, fait toujours mouche, notamment en ce qui concerne l’orchestre sous la direction précise et inspirée de Laurent Cuniot qui rend parfaitement justice, malgré la réduction, à la partition de Janáček. La distribution est inchangée, et les chanteurs sont eux aussi à leur meilleur niveau, pleinement investis dans leurs personnages et très à l’aise tant vocalement que scéniquement.
D’où vient alors que le spectacle n’est plus totalement convaincant ? Comme l’intitule le programme de Massy (« Opéra-film ») la vidéo occupe la place centrale, et Louise Moaty « propose de suivre cette fable à travers le tournage et montage en direct d’un film d’animation, mêlant chanteurs, vidéo, dessin et théâtre d’objets ». Mais là où Frank Castorf pour le Ring de Bayreuth ou La Dame aux Camélias suivait les acteurs pas à pas retransmis sur d’immenses écrans, ou encore Pierrick Sorrin dans La Belle Hélène offrait des images d’une qualité également inégalée, on a ici une utilisation beaucoup plus légère du principe : caméras statiques, noir pesant, fatras scénique qui mêle boîtes à lumière, projecteurs, marionnettes et acteurs. Surtout, des pertes de signal scalpent certains acteurs, vident les yeux d’autres, bref, on n’est pas au niveau technique qu’impose le procédé, et l’indéniable poésie du « beau livre d’images » projeté sur écran y perd beaucoup. On se prend alors à rêver d’une version qui, à l’instar des films de Karel Zeman, parviendrait à mettre en musique les délicieux dessins que Stanislav Lolek avait réalisés, à l’origine, pour la jolie histoire de Rudolf Těsnohlídek.
Prochaines représentations à Sablé-sur-Sarthe (23 avril) et au Mans (29 et 30 avril).