La situation, à l’opéra de Dijon, semble en ce moment plus épineuse qu’ailleurs. Notre rédaction bruisse depuis plusieurs semaines d’interrogations sur la non-reconduction de Laurent Joyeux (le directeur sortant) et sur la stratégie visiblement peu lisible de la Marie pour lui trouver un successeur. C’est désormais le personnel à travers son Comité Economique et Social qui demande plus de transparence pour le Théâtre Lyrique d’intérêt National. Voici, in extenso, la lettre ouverte :
Nous, Comité Social et Economique de l’Opéra de Dijon, souhaitons attirer votre attention sur la situation critique que traverse l’Opéra de Dijon. Suite aux mesures instaurées par le gouvernement, de nombreux secteurs d’activités sont gravement touchés par les mesures sanitaires imposées afin de lutter contre la propagation du Coronavirus. La culture fait partie des secteurs durement touchés. Le Premier Ministre, dans son allocution du 19 avril dernier a été clair sur la crise financière qui touchera notre pays. Cette situation préoccupante de manière générale l’est aussi pour l’Opéra de Dijon. En effet, l’Opéra de Dijon, récompensé par le label « Théâtre Lyrique d’Intérêt National en 2017, n’a toujours pas de directeur nommé pour janvier 2021. Nous vous avions déjà alerté le 13 février pour demander la mise en place d’une procédure de recrutement sur concours, comme c’est le cas pour toutes les autres scènes nationales labélisées. Nous avons alerté le Conseil d’Administration lors de sa séance du 13 mars par une nouvelle lettre qui nous est restée sans réponse. Depuis, ce silence a laissé place à la pandémie du COVID 19 qui renforce la fragilité de l’avenir de l’Opéra de Dijon. Cette crise aura de violentes répercussions sur les budgets des saisons prochaines. Les reports de spectacles, et les coproductions doivent être la sécurité des scènes lyriques qui ont dû fermer leurs portes du jour au lendemain. C’est d’ailleurs pour cela que toutes les maisons d’opéras s’organisent dès à présent pour maintenir les saisons, les emplois et les projets culturels. Toutefois, l’Opéra de Dijon ne peut pas à ce jour s’inscrire dans cette dynamique, le recrutement de la prochaine direction n’étant toujours pas lancé. La presse nationale et de nombreuses structures culturelles se sont fait l’écho d’une nomination sans concours d’un directeur de compagnie de théâtre. Actuellement, comment pouvons-nous changer les codes d’une maison telle que ceux de l’Opéra de Dijon dans une période aussi fragile économiquement ? Comment un changement aussi radical peut-il être bénéfique en ces temps d’incertitudes ? L’Opéra de Dijon ne doit pas disparaître du paysage lyrique européen, et encore moins dans une période où toutes les scènes lyriques doivent être solidaires pour traverser ce bouleversement soudain. Si l’Opéra de Dijon ne s’inscrit pas dans ces réseaux de coproduction et abandonne son titre de maison de création, comment pourrons-nous assumer financièrement la production d’œuvre ? Si, en s’inscrivant dans un réseau à titre de «loueur» de production, l’Opéra de Dijon ne sera plus porteur de projets, de nombreuses questions se posent alors sur les emplois ; que feront les salariés des ateliers de construction des décors, et de fabrication de costumes ? Quelle sera la place des artistes lyriques du chœur ? Quelles actions culturelles pourront être réalisées autour des spectacles s’ils ne sont là qu’en tournée ? Quelles embauches seront offertes aux intermittents sur ces accueils, alors que l’Opéra de Dijon est actuellement le plus gros employeurs de la région ? Que deviendra le conventionnement «Théâtre Lyrique d’Intérêt National» et son financement dans ce contexte ? L’ensemble des salariés s’inquiète sur cette situation de blocage qui fragilise un peu plus chaque jour l’image, la reconnaissance et surtout les emplois et la viabilité financière de notre structure dans les années à venir. En respect pour tous ces employés, ces artistes venant de toute l’Europe et bien plus, l’Opéra de Dijon doit continuer de vivre à travers une programmation artistique riche digne des plus belles scènes lyriques labélisées. Nous, Comité Social et Economique de l’Opéra de Dijon, voulons le maintien des projets, des emplois. Nous voulons le maintien de la place de l’Opéra de Dijon dans le paysage lyrique national et européen dans lequel il s’est inscrit depuis ces dix dernières années. Nous voulons qu’en cette période de crise, l’Opéra de Dijon reste un interlocuteur auprès des grandes maisons françaises et européennes pour imaginer ensemble les productions à venir. Nous voulons que les savoir-faire et l’excellence de nos métiers soient reconnus à leur juste valeur.
C’est pourquoi, nous demandons :
– La garantie d’un concours de recrutement du/de la nouveau(elle) directeur(trice) sur la base d’un projet artistique et culturel soumis à un jury de spécialistes lorsque la situation le permettra.
– La garantie des financements publics et le maintien des emplois de manière pérenne à l’Opéra de Dijon.