Suite aux annulations liées à la crise sanitaire de la Covid-19, l’Opéra National de Bordeaux a perdu l’intégralité des recettes propres de la seconde partie de sa saison, l’empêchant ainsi de rémunérer ou d’indemniser l’ensemble des artistes, artisans et techniciens engagés. Malheureusement, sa structure publique de régie personnalisée lui interdit le recours au chômage partiel, réservé aux entreprises privées.
Aucune solution n’ayant été trouvée fin mai, 4 chanteurs de la région ou avec une attache forte à l’ODB, Aude Extrémo, Julie Pasturaud, Stanislas de Barbeyrac et Thomas Dolié ont rédigé une tribune ouverte de soutien à l’Opéra de Bordeaux et aux intermittents qu’il employait. En effet « sans aucune aide spécifique de l’Etat, de la Ville ou de la Région, l’Opéra malgré sa volonté affichée de les soutenir, serait contraint d’annuler l’ensemble des contrats d’intermittents, sans compensation. Pour l’ensemble de ces salariés intermittents, ce serait un désastre. »
Ils rappellent au public non averti l’essence actuelle de ce statut d’intermittence à savoir :
- Un contrat comme celui proposé par l’Opéra de Bordeaux permet de vivre bien plus longtemps que la simple durée de l’engagement car d’une part il apporte un nombre d’heures indispensable pour obtenir la protection de l’intermittence et permet d’autre part de travailler sur de nombreux autres projets plus modestes le reste de l’année.
- L’indemnisation au chômage que celui-ci garantit pendant les périodes d’inactivité n’est plus comparable avec le chômage qu’un salarié du régime général touche, proportionnel à son salaire précédent. Elle est désormais bien plus faible, et ne permet pas de vivre sans ses revenus d’activité habituels.
En d’autres termes, ce que réclament les quatre chanteurs est assez simple : « Si l’Opéra n’a pas la possibilité de payer ou d’indemniser ses artistes intermittents – et c’est bien compréhensible, compte tenu de l’arrêt complet de son activité – c’est à la Ville de Bordeaux, à la Région Nouvelle Aquitaine et à l’Etat de lui venir en aide. »
Sensible à ce cri d’alarme, le quotidien Sud-Ouest a relayé en fin de semaine dernière l’appel des chanteurs et a contacté l’adjoint en charge de la culture à Bordeaux. Ce dernier s’est voulu rassurant en stipulant avoir reçu la confirmation par l’Etat de la prise en charge du chômage partiel. Et d’ajouter que la contradiction réside entre le ministère de la culture qui autorise le règlement des promesses et le Trésor Public qui s’y oppose.
Cet atermoiement – digne de Kataïev (Je veux voir Mioussov) et symptomatique de la schizophrénie bureaucratique de l’administration française – perdure à ce jour. L’opéra, la mairie et le ministère continuent de tout mettre en œuvre pour payer les intermittents mais doivent encore dépasser les blocages administratifs du trésor public qui se questionne toujours sur leur éligibilité au chômage partiel.