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Un jour, une création : 16 avril 1851, Gounod enthousiasme Berlioz

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16 avril 2019
Un jour, une création : 16 avril 1851, Gounod enthousiasme Berlioz

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Lauréat du prix de Rome en 1839, le jeune Gounod est davantage attiré par une carrière religieuse que musicale, à moins de concilier en quelque sorte les deux et de composer des œuvres sacrées. Sa rencontre avec Pauline Viardot va le réorienter peu à peu vers des chemins plus profanes. Le premier sujet qu’elle évoque pour son jeune protégé est même des plus disruptifs, puisqu’il s’agit de l’histoire de Sapho, poétesse de Mytilène qui a vécu à la fin du VIIème siècle av. Jésus Christ, et qui est surtout connue pour ses amours légendaires au point de leur donner son nom. Pour adapter cette histoire, on présente à Gounod un dramaturge très en vogue à la fin des années 1840 : Emile Augier. Ce dernier trousse un livret sans trop se presser et ne l’envoie à Gounod qu’au début de l’année 1850, ce qui ne laisse que quelques mois au compositeur. Pauline Viardot avait en effet obtenu du directeur de l’Opéra de Paris, Nestor Roqueplan, de monter le futur opéra, le premier de son auteur, à la Salle Le Peletier, en offrant de tenir le rôle-titre. Le contrat prévoyait que l’œuvre devait être donnée à l’automne 1850 et en tout cas pas après le 1eravril 1851… On imagine le stress de Gounod, qui dira avoir été très accompagné durant son travail, pour lequel tout le monde voulait donner son avis. 

En février, tout est prêt… mais pas la censure, qui trouve quelques passages soit trop subversifs, soit trop dangereux, encore quelques jours avant la première.  Finalement, tout rentre dans l’ordre et l’œuvre est créée voici 168 ans, dans une mise en scène de Leroy. Mais le public, encore habitué aux splendeurs du Grand Opéra à la Meyerbeer, n’est guère conquis par cette œuvre plus psychologique et moins spectaculaire. L’ajout dès 1851 d’un ballet – semble-t-il perdu aujourd’hui – a plu mais n’a pas suffi. De fait, Sapho est retirée de l’affiche après quelques représentations.

Comme souvent, la critique ne partage pas la bouderie du public (et inversement). L’œuvre bénéficie d’articles positifs d’Adolphe Adam – avec quelques nuances – ou d’Ernest Reyer. Mais c’est Hector Berlioz qui écrira le papier le plus admiratif dans le Journal des Débats. Le très exigeant Hector n’y va pas par quatre chemins et trouve l’ensemble digne d’éloges. Il juge l’orchestration « monumentale, parfaite, admirable » ; le fameux air final de Sapho « ô ma lyre immortelle » lui procure « une des plus vives émotions depuis longtemps ». Il est conquis et gardera toujours une tendresse pour Gounod. Le public tourne le dos à ce dernier, il était donc naturel que Berlioz lui tendît les bras !

Gounod pourtant essaiera de modifier sa partition pour conquérir ce public capricieux. Dès 1851, comme on l’a vu ; mais aussi en 1858, en réduisant le tout de 3 à 2 actes ; puis en 1884 en l’augmentant au contraire à 4 actes. Mais rien à faire, Sapho était vouée à l’oubli. Sauf cette fameuse « ô ma lyre immortelle », ancienne mélodie recyclée par Gounod, morceau de bravoure de nombre de récitals, et en particulier ceux de la grande Régine Crespin, à laquelle on pense spontanément. La voici, impériale, somptueusement accompagnée par l’orchestre de la Suisse romande, sous la baguette d’Alain Lombard. 

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