Après Madama Butterfly, Puccini a l’embarras du choix. On lui présente quantité de sujets possibles, lui-même pense à de nombreuses adaptations qui lui font envie, dont un opéra sur Marie-Antoinette… Mais comme souvent lorsqu’on a l’embarras du choix… on ne choisit pas. C’est donc sans nouvelle idée qu’il effectue un voyage aux Etats-Unis en 1907 pour honorer de sa présence un festival consacré à ses opéras, donné au Metropolitan Opera de New York. Parce qu’il a sans doute assez entendu ses propres œuvres, Puccini en profite pour aller au théâtre. À trois reprises, il se rend au Belasco pour une voir une pièce qui le subjugue et qui s’appelle « The girl of the golden West »…. Cette fois, il y est. Finies Marie-Antoinette, Conchita, et les autres. Son sujet, c’est cette histoire de tenancière de saloon en acier trempé qui traficote avec des bandits et fricote avec l’un d’entre eux au grand dam des autres hommes. Happy end garanti.
Revenu en Italie, il confie l’adaptation de cette pièce à Carlo Zangarani, successeur de l’habituel Giacosa, mort en 1906 et alors qu’Illica, son inséparable duettiste, est occupé à autre chose. Quelques mois plus tard, le livret est prêt, mais pas Puccini, qui doit subir une sombre affaire passionnelle (on accuse – à tort – sa femme d’avoir poussé leur jeune servante au suicide, au motif qu’elle l’aurait prise pour la maîtresse de son mari…), avant de se mettre à travailler. Il lui faudra donc une autre année avant de revenir à New York pour y présenter, au Met, sa Fanciulla del West voici 110 ans aujourd’hui, sous la baguette de Toscanini, avec Emmy Destinn et Enrico Caruso. Séduits par cette évocation de l’histoire récente de leur jeune pays, les New-Yorkais réservent le plus grand triomphe de sa vie au compositeur et à son opéra. Le correspondant de Forumopera à New York vous propose d’ailleurs le compte-rendu de cette première très mondaine.
Mais ce triomphe sera presque sans lendemain, tant il s’agit là de l’une des œuvres les moins jouées de son auteur. Puccini en profite pour y renforcer l’importance de l’orchestre, réutiliser des matériaux folkloriques entendus ou copiés sur place et tenter de donner une couleur locale qui n’est pas parvenue à s’imposer au répertoire, cependant. La faute peut-être à un argument flageolant.
Puccini mettra encore plusieurs années à se remettre au travail. Ce sera pour La Rondine, mais c’est une autre histoire… qui ressemble un peu à celle qui a abouti à La fanciulla del West… Quand on a l’embarras du choix… Voici un extrait de la scène finale, étrangement coupée avant le fameux happy end, avec Jonas Kaufmann et Nina Stemme dans une production de l’opéra de Vienne, dirigée par un inattendu Franz Welser-Möst.