Forum Opéra

Rigoletto — Monte-Carlo

arrow_back_iosarrow_forward_ios
Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
1 avril 2011
D’une distribution l’autre

Note ForumOpera.com

2

Infos sur l’œuvre

Mélodrame en trois actes et quatre tableaux
Livret de Francesco Maria Piave,
d’après le drame de Victor Hugo Le Roi s’amuse (1832)

Créé à Venise (Teatro La Fenice) le 11 mars 1851

Détails

Mise en scène, Jean-Louis Grinda
Décors & Costumes, Rudy Sabounghi
Lumières, Laurent Castaingt

Rigoletto, Lado Ataneli (1) – George Petean (2)
Gilda, Nathalie Manfrino (1) – Ekaterina Lekhina (2)
Le Duc de Mantoue, Stefano Secco (1) – Celso Albelo (2)
Sparafucile, Deyan Vatchkov
Maddalena, Marie-Ange Todorovitch
Giovanna, Christine Solhosse
Monterone, Luciano Montanaro
Marullo, Adrian Sampetrean

Chœurs de l’Opéra de Monte-Carlo
Chef des Chœurs, Stefano Visconti

Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
Direction musicale, Giuliano Carella

Salle Garnier, Monte-Carlo, jeudi 31 mars & vendredi 1er avril 2011

Pour l’avant-dernière production de sa saison, l’Opéra de Monte-Carlo propose un Rigoletto de bonne tenue dont nous réjouissons d’avoir vu les deux distributions proposées en alternance, la deuxième s’étant montrée bien plus satisfaisante (côté masculin du moins) que la première.

C’est une mise en scène classique, mais de bon aloi, que signe le maître des lieux, Jean-Louis Grinda. Pas de relecture iconoclaste ici. L’histoire est simplement transposée à la fin du 19e siècle où les courtisans, devenus des bourgeois habillés en frac, s’adonnent au début du premier acte à une « partie fine » dans le grand salon du Duc, avec force filles dévêtues. Remarquablement stylisés et épurés, les superbes décors de Rudy Sabounghi sont une fête pour les yeux (tout comme les costumes qu’il signe également) et assurent la réussite plastique de la production par ailleurs magnifiée par les éclairages puissamment évocateurs et dramatiques de Laurent Castaingt. A décors sobres, mise en scène sobre. C’est à la transparence des situations, à l’impact dramatique des différentes scènes et à la vraisemblance des personnages que Grinda semble s’attacher. Au niveau dramaturgique, on se souviendra essentiellement du changement de tableau du premier acte, où l’on voit Rigoletto troquer son costume de bouffon (et se débarrasser de sa bosse au passage !) pour des habits de ville, illustration aussi forte qu’efficace de la séparation entre sphère publique et privée (mettant aussi en exergue la double nature du personnage).

En ce qui concerne la crédibilité des protagonistes, malgré une direction d’acteurs louable et efficace, le metteur en scène monégasque n’est guère aidé le premier soir, hors la frémissante Gilda de Nathalie Manfrino. Cette prise de rôle  est le plus grand bonheur de la soirée, le soprano français s’y révélant tout à fait convaincant. Grâce à une technique vocale hors-pair, elle parvient à alléger suffisamment ses moyens (la voix s’est considérablement élargie depuis quelques temps) pour instiller au célèbre « Caro nome » des tons délicats et des mezza voce veloutées. La lumière de ses aigus, son beau legato et enfin sa présence dramatique touchante de vérité émeuvent fortement, lui valant un beau succès personnel aux saluts.

Le Rigoletto du baryton géorgien Lado Ataneli est indéfendable. Acteur plus que limité, incapable de conférer à son personnage la moindre consistance hors quelques mimiques éculées, il se révèle tout aussi piètre chanteur, incapable de nuancer un chant délivré uniformément, aux accents monocordes et au rayonnement inexistant.

Stefano Secco déçoit également. Il peine à donner une véritable épaisseur et surtout du charisme à ce jouisseur cynique qu‘est le Duc et accuse de franches inégalités dans l’émission, handicapant une voix au timbre certes séduisant mais manquant cruellement de mordant et de relief. Ni vocalement ni scéniquement, le ténor italien ne parvient à s’imposer au cours de la soirée. Fatigue passagère ?…

Inversement le lendemain, la distribution masculine enchante tandis que Gilda en est le maillon faible.

De fait, le bouffon incarné par George Petean impressionne par son ample gamme de couleurs expressives alliée à des aigus généreux et à une intense énergie dans l’accent. Le comédien s’avère par ailleurs superbe, conférant au rôle-titre une vive charge émotionnelle, notamment dans sa façon d’exsuder toute l’humanité de cet être difforme rongé par le remords. La rage vengeresse lui convient, cela dit, tout autant que la fragilité du père aimant et le fameux air « Cortigiani, vil razza », entonné dans une effarante rage, fait froid dans le dos. Un grand Rigoletto !

Autre révélation, le Duc du tout jeune ténor canarien Celso Albelo. Son timbre clair, brillant et ensoleillé séduit dès l’abord. Les notes hautes sont projetées avec une insolence et une aisance confondantes et l’élégance des phrasés est exemplaire. L’air « Bella figlia dell’amore » est ainsi céleste de tenue et de lumière. Dommage que l’acteur soit plus en retrait, son jeu n’étant pas vraiment celui d’un séducteur au charme irrésistible, mais les qualités du chant compensent largement cette légère carence et en font indubitablement un des meilleurs Duc du moment.

La Gilda du soprano russe Ekaterina Lekhina ne se montre malheureusement pas à la hauteur de ses partenaires, défavorisée par un timbre un rien acidulé, un vibrato léger mais persistant et une émission toute slave qui ne convient pas au chant belcantiste. A un chant (trop) appliqué, elle conjugue un jeu manquant cruellement de naturel, l’héroïne ne se montrant jamais vraiment émouvante.

Dans les rôles secondaires (présents lors des deux soirées), le Sparafucile de la basse bulgare Deyan Vatchkov en impose autant par sa taille (près de deux mètres !) que par sa voix sonore et caverneuse. Marie-Ange Todorovitch campe une Maddalena aux moyens opulents et au fort potentiel érotique. Pour finir, une mention pour le Monterone, sombre et égaré de douleur, de Luciano Montanaro.

Venu en voisin1, Giuliano Carella déçoit quelque peu. Sa direction, parfois excessive – avec une ouverture tonitruante qui ne tient pas compte de la dimension des lieux -, alterne des tempi presque frénétiques dans les scènes de cour, et d’autres, ralentis jusqu’à l’exaspération, notamment dans le premier duo Gilda/Duc de Mantoue. Le chef italien éprouve et met ainsi à mal plusieurs fois les chanteurs, alors que nous connaissons suffisamment sa baguette pour savoir qu’il couve d’ordinaire son plateau vocal. Enfin, le chœur est superbe de précision et d‘homogénéité, remarquablement préparé par Stefano Visconti, offrant à l’auditoire une des principales satisfactions de la soirée.

 

1 G. Carella occupe actuellement le poste de Directeur musical de l’Opéra de Toulon-Provence-Méditerranée.

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

2

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Mélodrame en trois actes et quatre tableaux
Livret de Francesco Maria Piave,
d’après le drame de Victor Hugo Le Roi s’amuse (1832)

Créé à Venise (Teatro La Fenice) le 11 mars 1851

Détails

Mise en scène, Jean-Louis Grinda
Décors & Costumes, Rudy Sabounghi
Lumières, Laurent Castaingt

Rigoletto, Lado Ataneli (1) – George Petean (2)
Gilda, Nathalie Manfrino (1) – Ekaterina Lekhina (2)
Le Duc de Mantoue, Stefano Secco (1) – Celso Albelo (2)
Sparafucile, Deyan Vatchkov
Maddalena, Marie-Ange Todorovitch
Giovanna, Christine Solhosse
Monterone, Luciano Montanaro
Marullo, Adrian Sampetrean

Chœurs de l’Opéra de Monte-Carlo
Chef des Chœurs, Stefano Visconti

Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo
Direction musicale, Giuliano Carella

Salle Garnier, Monte-Carlo, jeudi 31 mars & vendredi 1er avril 2011

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle