Forum Opéra

Manon Lescaut — Munich

arrow_back_iosarrow_forward_ios
Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
7 décembre 2014
Agacé, déçu et subjugué

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opéra en quatre actes (1893)

Livret de Luigi Illica et Marco Praga d’après le roman de l’abbé Prévost

Détails

Mise en scène

Hans Neuenfels

Décors

Stefan Mayer

Costumes

Andrea Schmidt-Futterer

Lumières

Stefan Bolliger

Concept

Yvonne Gebauer

Dramaturgie

Benedikt Stampfli

Rainer Karlitschek

Manon Lescaut

Kristine Opolais

Lescaut

Markus Eiche

Il cavaliere Renato Des Grieux

Jonas Kaufmann

Geronte di Ravoir

Roland Bracht

Edmondo

Dean Power

L’oste

Christian Rieger

Il maestro di ballo

Ulrich Reß

Un musico

Okka von der Damerau

Un sergente

Christoph Stephinger

Un lampionaio

Alexander Kaimbacher

Un comandante

Evgenij Kachurovsky

Bayerisches Staatsorchester

Chor der Bayerischen Staatsoper

Chef des chœurs

Sören Eckhoff

Direction musicale

Alain Altinoglu

Munich, Bayerische Staatsoper

Dimanche 7 décembre, 17h

La voilà donc cette Manon Lescaut, tant attendue, tant commentée qu’avant même d’avoir été représentée, on avait l’impression de l’avoir déjà vue. Le départ prématuré d’Anna Netrebko, l’état de santé puis la barbe de Jonas Kaufmann (rasé de plus près pour cette dernière représentation de la série), les outrances de Hans Neuenfels, metteur en scène réputé sulfureux, ont alimenté nos chroniques lyriques ces derniers mois. Nous leur devons quelques pointes d’audimat. La voilà donc et comme prévu, elle agace, elle déçoit et elle subjugue.

Elle agace : en vrac, les choristes déguisés en clown avec Edmondo en monsieur Loyal ; le premier acte transformé en dictionnaire amoureux du Regietheater, de « a » comme absurde à « z » comme « ze sais plus quoi inventer pourvu que ça grince » ; les sons couverts de Jonas Kaufmann, ses « a » qui ressemblent à des « o » ; la direction démesurée d’Alain Altinoglu, si envahissante qu’elle fait l’opéra de Puccini poème symphonique….

Elle déçoit : l’absence d’émotion dans le duo d’amour, un des plus torrides de tout le répertoire pourtant, trop agité, trop lyrique, trop fort. Aucune progression dramatique ne saurait commencer à 9 sur l’échelle de Richter (qui ne comporte pas un échelon de plus) ; la Manon de Kristine Opolais insuffisante – mais quelle soprano aujourd’hui possède l’ampleur dramatique du rôle et le volume nécessaire pour surmonter le déferlement orchestral ? Jonas Kaufmann lui-même, dont la puissance ne peut être mise en doute, n’est pas toujours audible.


J. Kaufmann (Il cavaliere Renato Des Grieux), K. Opolais (Manon Lescaut) © Wilfried Hösl

Et pourtant finalement elle subjugue, cette Manon. L’intelligence de la mise en scène, une fois les provocations clownesques écartées, prend à la gorge. Les costumes noirs détachent les protagonistes de la masse grise ; le geste prime, le reste est accessoire. Dès un deuxième acte d’une élégance toute hollywoodienne, l’intrigue devient lisible et, dans sa lisibilité, d’une vérité poignante. A défaut de l’exacte voix, Kristine Opolais a le physique du rôle. L’actrice est de plus accomplie. Son investissement n’a d’égal que celui de Jonas Kaufmann. La vaillance du ténor, cette capacité à surmonter d’un aigu rageur les tensions les plus extrêmes, est stupéfiante. La probité demeure exemplaire. Aucune surcharge vériste, ni appuis de mauvais goût ne viennent pervertir le chant (la remarque vaut aussi pour sa partenaire). La couleur sombre de la voix, ses éclats tempétueux dessinent un Chevalier ardent, impulsif, romantique, de ce romantisme farouche et désespéré dont Werther à Paris portait déjà la marque. Autour de ces amants en symbiose, des comprimarii de premier ordre même si Puccini leur a peu concédé : tant scéniquement que vocalement, Markus Eiche en Lescaut, Roland Bracht en Géronte et leurs comparses ont été (bien) choisis pour pouvoir dans le peu de répliques imparties se hisser au niveau du couple vedette. Hommage spécial à Okka von der Damereau, brillante troupière au sens le plus noble du terme, troisième dame truculente dans Die Zauberflöte la veille, musico ici traçant joliment les lignes archaïsantes d’un madrigal emprunté à la Messa di Gloria. Forte de ces atouts, la tension peut aller croissante jusqu’à mettre la chair théâtrale à vif. Le quatrième acte se déroule sur un plateau entièrement nu, immense, où s’étreignent une dernière fois Manon et des Grieux, amants misérables, perdus et éperdus, amoureux solitaires broyés par la tragédie insoutenable de leur destin. Alain Altinoglu d’un geste toujours engagé réconcilie alors les chanteurs avec un orchestre dont on ne vantera jamais assez les mérites, surtout dans une partition où s’exalte comme rarement l’alchimie des timbres. La bourrasque instrumentale qui balaye la lande américaine est d’un désespoir saisissant. Exemple parmi d’autres de l’intensité émotionnelle et sonore atteinte dans une dernière partie justifiant à elle-seule le tapage fait autour de cette production.

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

3

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Opéra en quatre actes (1893)

Livret de Luigi Illica et Marco Praga d’après le roman de l’abbé Prévost

Détails

Mise en scène

Hans Neuenfels

Décors

Stefan Mayer

Costumes

Andrea Schmidt-Futterer

Lumières

Stefan Bolliger

Concept

Yvonne Gebauer

Dramaturgie

Benedikt Stampfli

Rainer Karlitschek

Manon Lescaut

Kristine Opolais

Lescaut

Markus Eiche

Il cavaliere Renato Des Grieux

Jonas Kaufmann

Geronte di Ravoir

Roland Bracht

Edmondo

Dean Power

L’oste

Christian Rieger

Il maestro di ballo

Ulrich Reß

Un musico

Okka von der Damerau

Un sergente

Christoph Stephinger

Un lampionaio

Alexander Kaimbacher

Un comandante

Evgenij Kachurovsky

Bayerisches Staatsorchester

Chor der Bayerischen Staatsoper

Chef des chœurs

Sören Eckhoff

Direction musicale

Alain Altinoglu

Munich, Bayerische Staatsoper

Dimanche 7 décembre, 17h

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle