Forum Opéra

Orfeo ed Euridice — Lyon

arrow_back_iosarrow_forward_ios
Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
14 mars 2015
Fragments d’un discours amoureux

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Azione teatrale per musica en trois actes, livret de Ranieri de’Calzabigi

Création à Vienne, Burgtheater, le 5 octobre 1762

Détails

Mise en scène

David Marton

Dramaturgie

Barbara Engelhardt

Décors

Christian Friedländer

Costumes

Pola Kardum

Lumières

Henning Streck

Orphée

Christopher Ainslie / Victor von Halem

Eurydice

Elena Galitskaya

Amour

Léo Caniard, Noé Chambriard, Yoan Guérin, Simon Gourbeix, Tom Nermel, Cléobule Perrot

Maîtrise de l’Opéra de Lyon

Chœurs de l’Opéra de Lyon

Chef des Chœurs : André Kellinghaus

Orchestre de l’Opéra de Lyon

Direction musicale

Enrico Onofri

Opéra National de Lyon, samedi 14 mars 2015, 20h

Le second volet du festival lyonnais « Les Jardins mystérieux », après les fleurs vénéneuses de l’Elysium d’Alviano dans Die Gezeichneten de Franz Schreker, nous présente un Orfeo ed Euridice de Gluck dans lequel le jardin secret d’un Orphée vieillissant se superpose à la vision émerveillée des Champs Élysées par un jeune Orphée en quête d’Eurydice. La relecture du metteur en scène David Marton crée une émotion nouvelle en faisant de l’œuvre le souvenir d’un être solitaire hanté par la construction fantasmée d’un bonheur qui n’est pas, mais qui aurait pu être, et qui à ce titre est représenté sur la scène, cet autre lieu.

D’un côté un vieil Orphée, donc, assis à cour devant sa machine à écrire – l’utilisation d’un texte de Samuel Beckett, Le Calmant, vient ici apporter la distanciation souhaitée avec la projection des lignes aux caractères empâtés s’inscrivant progressivement sur un écran en fond de scène. De l’autre côté le cortège nuptial devenu chœur funèbre, entrant à reculons, dans des mouvements répétitifs et raides, comme figés dans la mémoire, et un jeune Orphée en deuil. À jardin une table servie, au centre une maison inachevée, en partie affaissée dans le sable. En dédoublant Orphée, David Marton donne à voir deux versions du mythe, juxtapose le tragique et les moyens que l’humanité se donne pour le rendre supportable.

Proposition originale et qui emporte rapidement l’adhésion, le chant est partagé entre la basse allemande Victor von Halem, appuyé sur une canne, impressionnant de présence physique, de puissance de timbre et de projection, mettant en valeur et en évidence une voix caverneuse et usée, et le jeune contre-ténor britannique Christopher Ainslie, athlétique, d’un lyrisme émouvant et discret, plus confidentiel dans son émission. Alternant d’abord, les deux voix d’Orphée se rejoignent dans l’acte III pour un passage à l’unisson, puis, tandis que le vieil Orphée, image de la mort, part avec Eurydice, le jeune Orphée chante l’air célèbre « Che farò senza Euridice ? ». Le retour d’Eurydice correspond à la mort sur scène du vieil Orphée, tandis que la scène finale est présentée comme un spectacle dans le spectacle, cantate interprétée par les vivants en tenue de gala – avec les Chœurs de l’Opéra de Lyon, remarquables tout au long de l’œuvre. Entre les deux figures d’Orphée, la soprano russe Elena Galistkaya interprète une Eurydice élégante et sensible, au timbre clair, à la voix rayonnante dans la joie et digne dans les reproches, réunissant le souci de la beauté du chant et de la vérité de l’expression.

Le rythme de cette mise en scène, qui ménage des silences, des pauses, avec de très beaux ciels projetés à l’arrière-plan, le bruit d’un train qui passe, fait surgir la musique et le chant comme des fragments de réminiscence qui s’inscrivent dans le temps vécu de la réalité. La direction d’Enrico Onofri est en parfaite osmose avec ces choix, poétique et méditative, puis célébrant le triomphe de la musique, à la fin du spectacle, lorsque tout l’Orchestre de l’Opéra de Lyon s’élève peu à peu à la hauteur de la scène, illustrant son rôle de deus ex machina.

Parmi les autres belles idées de ce spectacle donnant à voir et à entendre la densité des personnages du drame, la présence de six enfants pour chanter à l’unisson le rôle d’Amour introduit une fraîcheur nouvelle, et jette un pont avec la postérité de l’œuvre de Gluck – comment ne pas songer aux trois enfants de La Flûte enchantée ? Intervenant à deux reprises pour détourner Orphée de l’idée de la mort, ils deviennent à la fin les enfants du couple formé par Orphée et Eurydice, autour de la table du dîner. Il est rare d’entendre voix d’enfants si justes et dotées d’une diction et d’une projection aussi parfaites : les six élèves de la Maîtrise de l’Opéra de Lyon, Léo Caniard, Noé Chambriard, Yoan Guérin, Simon Gourbeix, Tom Nermel et Cléobule Perrot sont excellents.

Forte et émouvante, dépouillée et poignante, cette interprétation rejoint les préoccupations qui étaient celles de Gluck en son temps, soucieux de vérité dramatique, tout en illustrant l’universalité de son propos, cheminant de Virgile, Ovide, Calzabigi et Beckett à la réalité vécue des spectateurs et auditeurs d’aujourd’hui.

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

3

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Azione teatrale per musica en trois actes, livret de Ranieri de’Calzabigi

Création à Vienne, Burgtheater, le 5 octobre 1762

Détails

Mise en scène

David Marton

Dramaturgie

Barbara Engelhardt

Décors

Christian Friedländer

Costumes

Pola Kardum

Lumières

Henning Streck

Orphée

Christopher Ainslie / Victor von Halem

Eurydice

Elena Galitskaya

Amour

Léo Caniard, Noé Chambriard, Yoan Guérin, Simon Gourbeix, Tom Nermel, Cléobule Perrot

Maîtrise de l’Opéra de Lyon

Chœurs de l’Opéra de Lyon

Chef des Chœurs : André Kellinghaus

Orchestre de l’Opéra de Lyon

Direction musicale

Enrico Onofri

Opéra National de Lyon, samedi 14 mars 2015, 20h

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle