Forum Opéra

Rothko Chapel – EIC — Paris (Philharmonie)

Partager sur :
Partager sur facebook
Partager sur twitter
Partager sur linkedin
Partager sur pinterest
Partager sur whatsapp
Partager sur email
Partager sur print
Spectacle
24 février 2017
Privés de Rothko

Note ForumOpera.com

2

Infos sur l’œuvre

Détails

Jay Schwartz
M, pour baryton et ensemble (création française)

Matthias Pintscher
beyond (a system of passing) pour flûte seule

Gregor Mayrhofer
Große Huldigung an das technische Zeitalter, pour ensemble (création française)

Entracte

Benjamin Attahir
Et nous tournions autour de ces frontières hallucinées, pour ensemble (création française)

Morton Feldman
Rothko-Chapel, pour soprano, contralto, chœur mixte et instruments

Evan Hughes, baryton

Les Cris de Paris
Chef de chœurs: Geoffroy Jourdain

Ensemble intercontemporain
Direction musicale
Gregor Mayrhofer

Vendredi 24 février 2017, 20h30, Paris (Philharmonie)

Pour ce concert de l’Ensemble intercontemporain, Matthias Pintscher a eu la bonne idée de réunir des œuvres ayant pour point commun leur ancrage profond dans les arts plastiques. On ne s’étonne donc guerre de découvrir, au milieu de pièces plus récentes, la monolithique Rothko Chapel de Morton Feldman.

La pièce M, de Jay Schwartz s’inspire donc d’une statue de Markus Lüpertz placée à Salzbourg et représentant tout naturellement Mozart. Les clins d’œil se multiplient d’ailleurs au fur et à mesure de la partition, à commencer par un grand crescendo micropolyphonique sur un matériau tiré de l’ouverture des Noces de Figaro. L’entrée du baryton annonce un changement de couleur, puisque c’est avec des bribes de Requiem que nous poursuivons l’écoute (essentiellement Introitus et Lacrymosa). Evan Hughes sera la découverte vocale de la soirée. Le baryton américain membre de la troupe de l’Opéra de Dresde prouve la solidité de l’ensemble de sa tessiture, dévoilant un timbre brillant et coloré. Quelques passages où il se noie dans l’ensemble à l’instrumentation quasi saturante font regretter une discrète amplification ou une direction plus attentive de la part de Gregor Mayrhofer

Avec beyond (a system of passing), Pintscher compose une grande pièce de bravoure pour flûte, admirablement interprétée par Sophie Cherrier. Si l’on avoue ne pas saisir le lien avec Anselm Kiefer dès la première écoute, on ne reste pas indifférent à ce catalogue à la fois poétique et innovant des techniques flûtistiques.

En basant sa dernière pièce sur un tableau d’Arnaldo Pomodoro, Gregor Mayrhofer (car il est aussi compositeur) invite l’auditeur à un voyage dans le monde industriel. Intitulée Große Huldigung an das technische Zeitalter (Grand hommage à l’âge industriel), la partition joue sur des effets de répétitions motoriques, évoquant de loin les fonderies déjà orchestrées par Mossolov. On en retient une forme et une instrumentation maitrisées, laissant apparaître de belles couleurs parmi les engrenages.

C’est à la fontaine Igor Stravinsky que s’intéressa Benjamin Attahir pour la composition de Et nous tournions autour de ces fontaines hallucinées. Par ses solos de violons dans le suraigu, la partition commence par intriguer. Ensuite, la citation de la Danse sacrale fait sourire. Mais l’intérêt s’arrêtera là, puisque le reste de la pièce n’apporte pas de développement substantiel du matériau, ni de véritable surprise venant casser le systématisme de la forme.

Inutile de mentionner la source d’inspiration de la Rothko Chapel de Morton Feldman. Conçue pour être jouée à l’intérieur de cet édifice, le compositeur voyait en cette œuvre une résonance du lieu et des peintures de Rothko plutôt qu’une véritable mise en musique. La question qui se pose est donc de savoir si une interprétation en dehors de ce contexte n’enlève pas tout l’intérêt de la performance. Allons plus loin et affirmons que l’œuvre de Feldman ne peut pas se dispenser de la présence écrasante des tableaux du peintre américain pour justifier sa pertinence. Privés de Rothko, le style nous apparaît plus dépouillé que jamais, contraignant l’auditoire à une méditation forcée sur une poignée de notes égarées dans cet honnête auditorium de la Cité de la musique. 

Les interventions de l’ensemble Les Cris de Paris sont homogènes, même si l’intonation des attaques est parfois un peu en peine. Les solos d’Adèle Carlier sont un peu secs, ceci étant encore probablement dû à la pauvreté de la ligne vocale de ces interventions, où les notes se comptent sur les doigts de deux mains. L’alto de John Stulz apporte par des solos à la sincérité touchante des bribes d’humanité au milieu de ce paysage lunaire. Gregor Mayrhofer dirige la pièce avec la même précision implacable que pour les autres œuvres de la soirée.

Coup d’essai donc pour cette Rothko Chapel. Elle montre peut-être que certaines œuvres sont indissociables de leur contexte d’écriture, et perdent un aspect symbolique primordial lorsqu’on leur retire cet arrière-plan. Car privée de ses tableaux, la Chapel est aussitôt déconsacrée.

Commentaires

VOUS AIMEZ NOUS LIRE… SOUTENEZ-NOUS

Vous pouvez nous aider à garder un contenu de qualité et à nous développer. Partagez notre site et n’hésitez pas à faire un don.
Quel que soit le montant que vous donnez, nous vous remercions énormément et nous considérons cela comme un réel encouragement à poursuivre notre démarche.

Note ForumOpera.com

2

Note des lecteurs

()

Votre note

/5 ( avis)

Aucun vote actuellement

Infos sur l’œuvre

Détails

Jay Schwartz
M, pour baryton et ensemble (création française)

Matthias Pintscher
beyond (a system of passing) pour flûte seule

Gregor Mayrhofer
Große Huldigung an das technische Zeitalter, pour ensemble (création française)

Entracte

Benjamin Attahir
Et nous tournions autour de ces frontières hallucinées, pour ensemble (création française)

Morton Feldman
Rothko-Chapel, pour soprano, contralto, chœur mixte et instruments

Evan Hughes, baryton

Les Cris de Paris
Chef de chœurs: Geoffroy Jourdain

Ensemble intercontemporain
Direction musicale
Gregor Mayrhofer

Vendredi 24 février 2017, 20h30, Paris (Philharmonie)

Nos derniers podcasts

Nos derniers swags

This be her Verse, par Golda Schultz et Jonathan Ware

La parole aux femmes
CDSWAG

Le Bourgeois Gentilhomme

Un gentilhomme en fête
CDSWAG

Debussy La Damoiselle élue

Lignes claires
CDSWAG

Les dernières interviews

Stanislas de Barbeyrac : « Il y aura peut-être un jour Tristan, si je suis sage »

Interview

Questionnaire de Proust – Sophie Koch : « Christian Thielemann compte beaucoup pour moi »

Interview

Sophie Koch : « Aborder Isolde, c’est être devant l’Everest »

Interview

Les derniers dossiers

Questionnaire de Proust

Dossier

Les grands entretiens de Charles Sigel

Dossier

Philippe Boesmans (1936 – 2022)

Dossier

Zapping

Vous pourriez être intéressé par :

Die Frau ohne Schatten – Baden-Baden

Le rêve de l’enfant
Kirill PETRENKO, Elza VAN DEN HEEVER
Spectacle

Test je peux pas publier 2 mais après oui

Spectacle

Test Editeur modifier sans relecture nécessaire

Spectacle

INSTANT LYRIQUE Alexandre Marcellier, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur — Paris (Opéra Comique)

Les servantes écarlates
Marie-Andrée BOUCHARD-LESIEUR, Yoan BRAKHA, Alexandra MARCELLIER
Spectacle