Ah le printemps, ses changements brusques de températures, ses pollens et ses annulations ! L’époque est propice pour propulser sur le devant de l’affiche les jeunes pousses de l’art lyrique. Aussi, lorsque Teatro Regio de Parme a vu Anna Pirozzi et Andrea Carè renoncer pour les raisons primesautières évoquées, la solution pour parer au plus pressé s’est avérée de faire confiance à sa deuxième distribution. Grand bien leur a pris !
Saioa Hernandez, entendue à Strasbourg dans Francesca da Rimini, possède une voix ample, charnue et un vaste ambitus qui place Tosca et ses excès tout à fait dans ses cordes. Voilà un portrait sensuel et mûr. Toutefois, l’interprétation strictement vocale reste encore un peu verte et monochrome, notamment dans le deuxième acte où aigus et forte sont émis avec la même précision implacable mais aussi la même couleur blanche : rage, douleur, désespoir… difficile de faire la différence. Evidemment le « Vissi d’arte » souffre de la même anémie et reste encore précautionneux en nuances et sons filés. Francesco Landolfi propose un baron Scarpia sournois, dont la projection efficace compense un volume plus confidentiel. Le chant se teinte élégamment et ne verse jamais dans la facilité d’excès expressionnistes. Migran Agadzhanian triomphe grâce à un Mario presqu’autant en muscles qu’en nuances. Le timbre solaire et égal, l’élégance de la ligne, déjà remarqués en Beppe à Genève, enluminent le portrait du peintre amoureux au premier acte. Les quelques rodomontades face à Angelotti augurent de « Vittoria » surpuissants. Il lui manque encore un rien d’endurance pour préserver la fraîcheur de sa voix de certaines duretés qui apparaissent au fil de la soirée et vont priver «E lucevan le stelle», fort bien conduit au demeurant, de toutes les nuances et demi-teintes nécessaires. Luciano Leoni campe un Angelotti crédible, au port noble sous la fatigue de sa situation. Les seconds rôles apportent toute satisfaction de même que les choeurs du Regio et ou des jeunes de chorale Giuseppe Verdi de Parme : il est d’ailleurs surprenant que le jeune berger soit confié à une soprano (belle intervention de Carla Cottini).
© Roberto Ricci
Fabrizio Maria Carminati dispose d’un orchestre de qualité, aux cordes soyeuses et la petite harmonie délicate. Il mène le drame de manière alerte tout en prenant le temps de dépeindre les ambiances ou de verser dans le lyrisme des deux duos entre les amoureux au premier et dernier acte. Il parvient également à tendre le discours quand il faut, surtout au deuxième acte. Seul quelques scansions, comme les violons griffonant leurs accords lorsque Tosca déchiffre l’éventail ou quand Scarpia la presse de toute part, restent trop timides.
Passons plus rapidement enfin sur la mise en scène de Joseph Franconi Lee. Il s’agit d’une mise en image un rien stylisée : un escalier imposant sert d’élément structurant au trois actes. Quelques mobiliers et des toiles peintes descendues des cintres distinguent les lieux. Son principal défaut vient d’une direction d’acteur grandiloquente, remède au moindre semblant réalisme.