Alors que Stefano Pace, le nouveau directeur de l’Opéra royal de Wallonie-Liège, prendra officiellement ses fonctions le 1er octobre, l’institution lève le rideau sur sa nouvelle saison – avec pass sanitaire européen et sans masque obligatoire dans le théâtre – avec une nouvelle production de La Forza del Destino robuste, en droite ligne de l’esthétique défendue par le regretté Stefano Mazzonis di Pralafera.
© Opéra Royal de Wallonie – Liège
Robuste ? Oui, car la distribution réunie remplit le contrat. Marcelo Alvarez vient à bout du rôle assassin de Don Alvaro, certes au prix de (trop) nombreuses respirations qui tronçonnent son phrasé, mais avec un engagement sans faille. Maria José Siri s’inscrit dans ses pas, toutes cordes vocales dehors, mais parvient à alléger la ligne et proposer des demi-teintes dans sa grande scène du deuxième acte. Simone Piazzola déploie une élégante ligne verdienne dans un portrait marmoréen du frère revanchard. Aucune des chausse-trappes du rôle ne lui résiste. Michele Pertusi s’avère le plus convaincant de tous : ligne, couleurs et puissance, son padre Guardiano incarne aussi bien la rigueur que l’humanité. Dommage que pour bien chantant qu’il soit, il manque toute la vis comica à Enrico Marabelli. Son Fra Melitone tombe à plat. Nino Surguladze est à la peine dans la première partie où ses aigus sont tous trop bas. Le « rataplan », entonné sur un rythme échevelé, la voit bien plus à son affaire. Tous les seconds rôles sont distribués avec justesse et complètent cette distribution satisfaisante.
Robuste aussi, car cette nouvelle production de Gianni Santucci fait étalage des qualités et défauts des productions classiques, fer de lance de la maison : les décors, réalistes, fourmillent de détails (la façade du couvent !) et installent d’emblée le spectateur dans les didascalies du livret. Las, cet écrin reste bien vide. On cherche en vain une direction d’acteur significative : les solistes viennent à l’avance-scène et chantent face public.
© Opéra Royal de Wallonie – Liège
Robuste enfin car l’Opéra Royal de Wallonie peut compter sur la qualité de ses forces maisons : des chœurs homogènes, puissants et musicaux qui égaient les nombreuses scènes de genre et de groupe voulues par Verdi pour respirer entre les coups du Destin et se payer l’Armée et l’Eglise au passage ; un orchestre rompu à ce répertoire, bien préparé et dirigé avec fougue, contraste et poésie par Renato Palumbo. C’est sur ces éléments que le nouveau directeur pourra capitaliser, surtout si, comme il le déclare à la presse belge, il souhaite ouvrir le répertoire et les conceptions scéniques.