Quel est votre bilan de la saison passée à titre personnel ?
Ma saison passée a été marquée par le répertoire français et j’en suis ravie car c’est un répertoire qui me tient vraiment à coeur! De Saint Saens à Massenet en passant par Poulenc. J’ai abordé pour la première fois le rôle de Constance des Dialogues des Carmélites. Je n’avais chanté Poulenc qu’à travers ses mélodies ; le fait d’interpréter ce rôle très chargé spirituellement a été une expérience touchante et enrichissante sur le plan personnel et artistique. J’ai pu également apprécier toute la dimension humaine et réaliste de l’émouvante musique de F. Poulenc.
Je retiens également la sortie du DVD Cyrano de Bergerac de Franco Alfano dans sa version intégrale française. Le rôle de Roxane n’ayant pas été abordé par les monstres sacrés (l’ouvrage était tombé malheureusement dans l’oublie) j’ai pu y mettre ma propre sensibilité artistique puisque je ne subissais pas les influences des fantômes du passé comme c’est très souvent le cas. Cela devenait pour moi très intéressant à tous les niveaux. La barre était placée très haut, c’était un challenge assez risqué mais avant tout très grisant. Cet sortie-évènement nous a permis de découvrir une oeuvre magistrale du répertoire français et de redécouvrir ce magnifique compositeur post-vériste qu’est Alfano.
Quels sont vos projets majeurs ?
En octobre, je retrouverai avec plaisir Melisande à l’opéra de Nice. Ce personnage me touche particulièrement car j’ai fait mes débuts avec lui à l’opéra de Marseille. Je pouvais facilement me glisser dans ce rôle puisque à ce moment là, je me sentais inexpérimentée, jeune et aussi démunie
qu’elle.
En décembre j’aborderai pour la première fois Marguerite dans Faust toujours à Nice. Une prise de rôle aussi importante représente beaucoup pour un chanteur en début de carrière. Ce sera une préparation très intense pour un projet très excitant !
Quel rôle, quelle production, quel(le) partenaire nourrit vos rêves d’avenir ?
J’aimerais dans le futur, comme la plupart des jeunes chanteurs, avoir la chance de fouler les planches de théâtres aussi prestigieux que le Met, le Coven Garden, Bastille ou la Scala. Je rêve d’y chanter des rôles tels que Juliette, Manon, Desdémone, Mimi, Gilda, Thais etc… et me contenterai modestement des plus grands partenaires que ces grands théâtres voudront bien me proposer !!!
Comment vivez-vous votre rôle d’artiste lyrique dans le monde d’aujourd’hui ?
Pour vivre pleinement son rôle d’artiste lyrique, et surtout pour ne pas se sentir marginalisé, il ne faut en réalité pas trop vouloir appartenir ou se confronter au monde d’aujourd’hui. Nos considérations sont un peu celles d’un autre siècle et nous évoluons aux regards des autres comme si nous vivions une autre époque. En revanche, puisque le lyrique est souvent considéré par la masse comme un art poussiéreux et complètement démodé, nous nous devons quelques fois de défendre les valeurs de cet art majeur en utilisant les armes du monde moderne : notamment grâce aux spectacles vivants et aux médias. Le chant lyrique en direct et en acoustique naturelle reste toujours une émotion incomparable quelque soit le public qui s’y confronte.
En dehors des musiciens, quel artiste vous enthousiasme et pourquoi ?
En général, toutes les formes d’art me touchent ; et plus en particulier la sculpture. De l’Egypte Antique à Rodin, en passant par, Bernin, Dalou ou Claudel, les volumes, les lignes et matières m’attirent. J’aime le côté très concret, charnel et palpable de cet art qui, en plus, nous permet par sa tri-dimensionnalité de redécouvrir à l’infini des chefs-d’-oeuvres à priori vus et revus.
Propos recueillis par Sylvain Fort
© Dan Levy