De tous les ténors, Jonas Kaufmann est celui qui, pour son public, a le moins de mystères. Sa vie est l’objet de commentaires quotidiens de la presse, de documentaires, elle est analysée dans ses moindres recoins sur des forums aux quatre coins de la terre. Notre site lui consacre (au bas mot) un quart de son activité. Mais se pourrait-il que certains détails aient échappé à votre avide vigilance ? Voici un quiz à votre attention.
1. Quel a été le premier opéra français chanté par Jonas Kaufmann ?
a) Werther
b) Mignon
c) Manon
2. Quel est le seul rôle chanté par Jonas Kaufmann au Festival de Bayreuth ?
a) Siegmund dans Die Walküre
b) Le rôle-titre de Lohengrin
c) Erik dans Die Fliegende Holländer
3. Dans quel rôle Jonas Kaufmann a-t-il fait ses débuts à l’Opéra de Paris ?
a) Florestan dans Fidelio
b) Alfredo dans La Traviata
c) Cassio dans Otello (de Verdi)
4. Quelle fut la caractéristique du concert opérette et cabaret donné par Jonas Kaufmann au TCE en 2015 ?
a) Il était légèrement sonorisé
b) Il était en 3D sous réserve de disposer des lunettes adéquates
c) Il était en noir et blanc
5. Quel chanteur a souvent servi d’exemple à Jonas Kaufmann ?
a) Placido Domingo
b) Franco Corelli
c) Fritz Wunderlich
6. Lors de sa participation à la Last Night of the Proms, quel cadeau Jonas Kaufmann reçoit-il dans sa loge ?
a) Un corgi en plâtre peint envoyé par Elisabeth II
b) Une caleçon aux couleurs de l’Union Jack
c) Une eau forte à son effigie réalisée par le peintre David Hockney
7. En mai 2017 le bloggeur Norman Lebrecht avait provoqué un scandale en publiant un cliché sur lesquel il était apparent que Jonas Kaufmann…
a) … ne portrait pas de sous-vêtements sous son armure de Radamès
b) … avait un peu grossi
c) … portait sur le biceps un tatouage dédié à sa mère
8. Avec laquelle de ces chanteuses Jonas Kaufmann n’a-t-il jamais chanté ?
a) Cecilia Bartoli
b) Anna Netrebko
c) Pretty Yende
9. Lequel de ces rôles Jonas Kaufmann n’a-t-il jamais abordé sur scène ?
a) Lenski dans Eugène Onéguine
b) Ruggiero dans La rondine
c) Idomeneo dans l’opéra de Mozart
10. Lors de la représentation de Gala de La Chauve-Souris au Staatsoper de Vienne le 31 déceùbre 2019, quel air interprête Jonas Kaufmann pendant le bal chez Orlofsky ?
a) Les adieux de Wotan (Die Walküre)
b) « Komm, Poupoule! » (Die Kleinen Michu)
c) « Lippen schweigen » (La Veuve Joyeuse)
d) « Maria » (West Side Story)
Réponses
1b – Mignon, le rôle de Wilhelm Meister, à Toulouse en 2001 aux côtes de Susan Graham et Annick Massis. Pour l’anecdote, c’est aussi un des premiers opéras que Jonas Kaufmann, souffrant, a mimé, le ténor canadien Benjamin Butterfield chantant sur le côté.
2b – Jonas Kaufmann n’a chanté que Lohengrin à Bayreuth et, pour l’occasion, semble s’être un peu fâché avec la direction du festival. En cause, une approche trop latine du rôle : « Lohengrin est pour moi un opéra italien, et je chante le rôle à l’italienne, c’est-à-dire avec un allemand compréhensible bien sûr, mais dont le son est plus rond, plus dolce que ce que nous avons l’habitude d’entendre. Je ne le chante pas d’une manière qui cherche à pousser et écraser le son, à vouloir sonner wagnérien. Avec Andris Nelsons, il n’y a eu aucun problème, il a été merveilleux. Mais l’équipe du festival n’a pas du tout goûté mon allemand, car mes consonnes n’étaient pas assez explosives. Cela n’a aucun sens de gâcher la ligne mélodique avec des doubles consonnes crachées ! C’est le genre de prononciation que nous sommes, ou étions, habitués à entendre chez Wagner, à l’exception de quelques anciens beaux enregistrements. Cela a été un long combat, et mon allemand a été constamment corrigé par les équipes du festival. Mais j’ai tenu bon – car je pensais que cette question était absolument clé ». Malgré le succès de son Lohengrin, le ténor allemand n’a plus été réinvité sur la Colline sacrée. Les curieux pourront goûter cette prononciation wagnérienne dans le coffret de 12 CD The Cosima era : The Early Bayreuth Festival Singers (1876-1906), la veuve du compositeur ayant elle-même choisi les chanteurs usant d’un style plutôt déclamatoire pour interpréter les oeuvres du maître au festival.
3c – Sont-ils nombreux les Cassio à avoir ensuite assumé le rôle-titre ? Jonas Kaufmann fit plus tard une apparition remarquée dans Fierrabras de Schubert au Châtelet, mais ses vrais débuts parisiens se firent dans Otello.
4a – En 2015, Jonas Kaufmann se lançait dans une série de concerts (dont l’un passant au Théâtre des Champs-Elysées le 23 mai) consacrée à la promotion de son dernier CD Du bist die Welt für mich autour d’un programme composé d’airs d’opérettes viennoises et de chansons de musiques de films de l’entre deux guerres. Pour cette tournée, Jonas Kaufmann eut recours à une amplification qu’il justifiait par la volonté de recréer une ambiance d’époque pour les morceaux de variétés qu’il interpréterait. Outre que le public n’avait pas été averti au moment de la mise en vente des places, la sonorisation fut en définitive assez constante, guère plus de 3 morceaux étant chantés à pleine voix. Si les aficionados du lyrique ne cachèrent pas leur mauvaise humeur sur les réseaux sociaux, le concert fut néanmoins un franc succès . Le procédé fut réitéré en 2020 à l’occasion de la tournée Wien : airs d’opérettes et mélodies viennoises, où une seconde partie sonorisée aurait dû succéder à une première partie chantée à plein voix. De fait, les deux parties du concert furent amplifiée (la seconde davantage que la première toutefois), provoquant certaines réactions de mauvaise humeur au parterre : un célèbre banquier d’affaire et conseiller du CAC 40 quitta sa place en plein milieu de la seconde partie, avec force démonstrations vocales. Jonas Kaufmann reviendra au Théâtre des Champs-Elysées le 6 décembre prochain (si le COVID le permet) pour un concert de Noël, avec un sympathique programme comprenant « O du froehliche » « Adeste fideles », « White Christmas » ou encore « Minuit chrétiens » : à déconseiller toutefois aux allergiques au micro !
5b et c – Les ténors allemands ont été une source d’inspiration pour le jeune Jonas Kaufmann, notamment Fritz Wunderlich. Lors de l’enregistrement de son album Verismo à la fin des années 2000, Jonas Kaufmann a plusieurs fois cité Franco Corelli comme modèle.
6b – Si ce détail peut être observé dans le documentaire de John Bridcut, il est remarquable que la même année Kaufmann fut le récipiendaitre, sur scène, d’une petite culotte envoyée par l’une de ses fans.
7b – L’information fut cependant démentie, après d’âpres échanges ici et ailleurs. Il faut largement admis que le débat ne présentait pas un très grand intérêt.
8c – Pretty Yende. Jonas Kaufmann a chanté plusieurs fois avec Anna Netrebko, dernièrement à Londres dans La forza del destino. Aux côtés de Cecilia Bartoli, le ténor bavarois a interprété le rôle de Lindoro dans Nina, o sia La pazza per amore de Paisiello en 2002 à Zurich.
9a – Lenski. Depuis son entrée dans la troupe du Saarländisches Staatstheater en 1994, Jonas Kaufmann a interprété un grand nombre de rôles du répertoire italien, allemand et français. Un temps envisagé, Lenski dans Eugène Onéguine est pour le moment resté à l’état de projet.
10c – « Lippen schweigen » extrait de La Veuve joyeuse de Franz Lehar. Avec cette scie absolue, Jonas Kaufmann et sa partenaire du soir, la soprano Laura Aikin, sont restés dans le registre de l’opérette viennoise, en se pliant à la fameuse tradition qui veut que pour la représentation de la Chauve Souris donnée à la Staatsoper le soir de la Saint-Sylvestre, une ou plusieurs stars présentes dans la ville en cette festive soirée honorent de leur présence le bal chez le prince Orlofsky, à l’acte II.