Confinée à Besançon en famille, Isabelle Druet partage – avec l’enthousiasme et la gaieté qui la caractérise – son beau parcours lyrique.
Le confinement avec 2 enfants dont un bébé de 20 mois est-il soluble dans une carrière lyrique ?
C’est soluble au point que je me dissous totalement dans mon rôle de mère et que la chanteuse est un peu mise entre parenthèse en ce moment ! D’autant plus que j’ai des enfants très vivants qui aiment l’interaction avec leurs parents (rires). La sieste de la petite permet surtout de faire les devoirs avec le grand… Et actuellement, une part du travail consiste à réfléchir et organiser les reports de spectacles, réfléchir aux prochains programmes. Tout cela prend du temps et je ne chante pas autant que je le souhaiterais… Mais on s’organise et je chante souvent avec ma petite dans les bras ; J’ai de la chance, elle est bon public !
Niortaise d’origine, vous fondez une compagnie théâtrale à Besançon en 2000 « la Carotte » avant d’être sacrée Révélation classique lyrique de l’Adami 2007, Révélation Lyrique des Victoires de la Musique 2010, 2e prix au Concours international Reine Elisabeth de Belgique en 2008 … Voilà un parcours qui demande quelques éclaircissements.
Mes grands-parents étaient agriculteurs dans les Deux-Sèvres, effectivement, mais mes parents se sont engagés pour ATD Quart Monde alors que j’avais 3 ans et nous avons régulièrement déménagés jusqu’au dernier point de chute à Besançon, avec pour eux des missions très diverses : bibliothèques de rue dans les quartiers défavorisés, maison de vacances pour des familles souvent éclatées, avec des enfants placés, un travail quotidien auprès des plus démunis…
Un quotidien marquant pour une enfant, sans doute ?
Oui, et je me suis construite avec cela. Pour mes parents c’était plus qu’un métier mais un engagement de vie qu’ils nous ont fait partager. Il m’en reste des valeurs extrêmement fortes.
Un univers assez loin des paillettes du lyrique…
Le grand écart ! Mes parents aimaient chanter, la famille participait aux chorales de village. Nous ne passions pas inaperçus car je suis la seconde de six enfants… une vraie tribu ! Mon père adorait le théâtre et comme je faisais souvent le pitre à la maison, je me suis naturellement retrouvée à en faire très jeune – d’autant plus qu’entre frères et sœurs on pouvait inventer mille histoires! Tous deux viennent d’un milieu d’agriculteur mais ouvert, curieux, sensibles à de multiples formes d’art, écoutant beaucoup France Culture…. Et puis, ils nous ont laissé toute liberté de faire ce que l’on souhaitait professionnellement.
La famille compte d’autres artistes ?
Mon petit frère François est luthier spécialisé en guitare jazz, il en joue également pour son plaisir. L’une de mes sœurs est comédienne-clown et nous avons justement un projet de spectacle ensemble qui me réjouit. Notre première a été malheureusement annulée le mois dernier au festival Faites Moins’d’Bruit à Besançon mais il est reporté au mois d’octobre. Cette création mêlera théâtre et musique autour d’un récital Shakespeare crée en 2013 avec Anne le Bozec. J’avais très envie d’en faire une version théâtralisée et surtout de partager à nouveau les planches avec ma sœur.
Mon compagnon sera en charge de la mise en scène. Une affaire de famille, donc ! La version récital de ce projet Shakespeare a tourné dans de nombreuses salles en Europe lorsque j’avais été sélectionnée comme « Rising Star » avec la Cité de la Musique avant d’être enregistrée en 2016.
Un enregistrement qui a reçu 4 coeurs de la rédaction de Forumopera ! Vous travaillez souvent en famille ?
Lorsque j’ai crée la compagnie de théâtre La Carotte en 2000 avec – entre autre – mon compagnon, j’avais 19 ans, ma sœur 18 et nous lui avons proposé de nous rejoindre. Nous avons beaucoup joué ensemble, notamment des spectacles de rue mais voilà 10 ans que nous n’avions plus partagé la scène. J’ai pensé qu’il fallait créer une occasion ! A vrai dire, J’ai commencé le théâtre au collège avec un professeur que j’adorais et qui nous faisait travailler du Labiche [parfait pour le rythme] puis au lycée en section A3-Théâtre avant de continuer à la fac en formation professionnelle. Au lycée, j’ai eu un professeur formidable, Yves Courty, fervent disciple de Peter Brook, d’Ariane Mnouchkine, précurseur des sections spécialisées théâtre : il m’a ouvert de nouveaux horizons avec le masque, le clown, la gestuelle baroque, la méthode Stanislavski… Il nous conseillait des lectures, nous faisait regarder de grands films comme Citizen Kane, Le Cuirassé Potemkine, avec la fameuse scène du landau !
Une approche très complète.
Et passionnante ! Toutes ces approches théâtrales me servent chaque jour dans mon chemin de chanteuse, elles m’ont nourrie et m’ont rendue curieuse de toute forme d’art.
Et la musique dans tout cela ?
J’ai d’abord découvert l’opéra avec la Carmen de Rosi que mon père avait enregistrée sur cassette vidéo et que j’ai tellement regardé que j’en ai usé la bande. Etudiante, j’habitais en face de l’opéra de Besançon, je me souviens des chanteurs chauffant leurs voix, et comme je m’entendais bien avec l’ouvreur, il me donnait parfois des places pour assister aux spectacles à la dernière minute ! Mon premier souvenir est celui d’une Flûte Enchantée avec des acrobates et Sandrine Piau, qu’à l’époque je ne connaissais pas bien sûr.
Comment vous est venue l’idée de devenir interprète ?
C’est une histoire de rencontre et de « non-rencontre ». Depuis l’adolescence, je rêvais de chanter dans un groupe mais autour de moi, il y avait des groupes qui faisaient du rock ou du métal alors que mon univers, c’était plutôt le reggae, l’électro, les musiques traditionnelles… Je chantais toute seule dans mon coin, reprenant les arrangements de Malicorne ou Dead Can Dance. Ne rencontrant personne avec qui créer un groupe, ne connaissant pas l’existence des conservatoires (j’avais grandi principalement à la campagne), j’ai pensé que je chanterais dans les spectacles de ma compagnie de théâtre et que je serais une « comédienne chanteuse ». Nous étions pleins d’envies, d’utopies : nous voulions proposer un théâtre accessible, hors les murs, en milieu rural… Je suis allée un peu par hasard avec des copains de la compagnie à la chorale universitaire et la cheffe de choeur m’a conseillé de prendre des cours car ma voix sortait du lot. Je me souviens pourtant lui avoir dit « le vibrato, cette grosse voix, ce n’est pas trop mon truc, ce n’est pas de cette manière que j’ai envie de chanter » [Isabelle se lance dans une convaincante imitation de la Castafiore]. En même temps, avec elle, j’avais découvert la polyphonie, Bach, Schubert… Je trouvais cela génial et me suis laissé convaincre. Lors de mes premiers cours, j’ai chanté le Lamento de Didon…Une splendeur. Découvrir à cette occasion que ma voix était capable de cette souplesse, cet ambitus, cette vibration, a été un choc. Je me suis prise au jeu et l’année suivante, j’ai débarqué à Paris où je me suis inscrite aux concours d’entrée de tous les conservatoires d’arrondissement. On m’avait conseillé le 7è et je suis rentrée dans la classe de Gaël de Kerret. Son approche m’a beaucoup parlé, tout me paraissait comme une évidence. Je suis entrée en 1ère année de 1er cycle et j’ai passé mon DEM l’année suivante avant d’enchainer au CNSM dans la classe d’Isabelle Guillaud. Une autre très belle rencontre !
Quel parcours fulgurant !
D’autant plus que je voyageais tous les we pour les spectacles de rue de la compagnie à m’écharper la voix ! Il m’en est resté le goût du partage, l’amour du collectif, un grand respect des équipes techniques, des petites mains. Souvent, ce sont des gens passionnants qui ont en parallèle une compagnie, travaillent avec beaucoup de structures… J’en ai installé des projecteurs, j’en ai posé du gaffeur (ndlr: le large scotch noir qui recouvre les câbles électriques)… Un spectacle ce n’est pas seulement nous sur scène, nous ne sommes que la partie visible de l’iceberg !
Je suis rentrée au CNSM avec un répertoire hyper limité, et pendant 4 ans c’était un bonheur d’explorer, de découvrir … Je me suis follement régalée ! Je me suis sentie parfois un peu en décalage par rapport à des gens qui avaient déjà tout déchiffré et pouvaient être blasés. Mais ma promotion était très sympathique et je me suis fait des amis précieux comme Emmanuelle de Negri, Camille Poul ou encore Arnaud Guillou. Humainement et musicalement, c’était formidable. J’ai aussi pu rencontrer beaucoup de musiciens de ma génération que je retrouve dans les orchestres et initier des collaborations artistiques fortes avec d’anciens professeurs comme Jeff Cohen ou Anne Le Bozec.
Comment êtes-vous entrée dans le circuit professionnel ? Y-a-t’il eu des rencontres déterminantes ?
Au CNSM, Jean-Marc Demeuré – le chef du département vocal, très investi dans sa mission – m’a fait rencontrer François-Xavier Roth qui cherchait des « cobayes » pour sa classe de direction d’orchestre. Une formidable rencontre : Il m’a tout de suite fait chanter professionnellement, m’a toujours fait confiance. François-Xavier, c’est un des piliers de ma vie de chanteuse, avec Les Siècles, ce sont ma famille de coeur.
Il y a un pendant en baroque : le Poème Harmonique de Vincent Dumestre. J’ai rencontré Vincent lors d’un stage à Royaumont : encore élève au conservatoire du 7è, une camarade malade, m’avait proposé sa place pour auditionner – alors que j’ignorais totalement ce qu’était la fondation. J’ai fait le stage et dans la foulée, il m’a proposé concerts et enregistrement. Nous n’avons jamais cessé de travailler ensemble.
Vous avez donc eu vos premiers engagements solistes alors que vous aviez à peine 2 ans de technique vocale ?
Tout à fait, mon premier rôle sur scène était l’Enchanteresse de Didon, alors que j’étais encore au conservatoire du 7e… J’ai adoré !
Il y a d’autres compagnonnages précieux dans votre carrière ?
Oui ! Au CNSM lors d’un concours, par exemple, j’ai rencontré, Arièle Butaux qui m’a fait intervenir dans ses émissions sur France Musique pendant des années ainsi que Bruno Messina qui montait alors le festival Berlioz où il m’a tout de suite invitée.
J’ai également eu la chance quand j’étais en cycle de perfectionnement de faire une masterclass avec René Jacobs avec qui j’ai travaillé par la suite à plusieurs reprises; un homme que j’admire beaucoup et à qui je dois d’avoir intégré la notion de tactus si importante dans toute la musique baroque.
Mais aussi bien sûr, le maestro Leonard Slatkin qui m’a donné la chance d’enregistrer quasiment toute la musique vocale de Ravel avec l’Orchestre National de Lyon. Encore un chef que j’aime énormément et que j’ai la chance de côtoyer depuis plusieurs années !
Avez-vous plutôt un penchant pour l’opéra ou le récital ?
J’aime les deux ! J’ai la chance de chanter souvent en récital, ce qui n’est pas si évident quand on fait de l’opéra car c’est un autre circuit et parfois les agents préfèrent se concentrer sur l’opéra. Je pense que le Concours Reine Elisabeth a joué sur cette double carrière car l’année suivant mon 2e prix j’ai donné presque 50 récitals en Belgique et en France, lançant une dynamique qui ne s’est jamais essoufflée. J’adore le récital, c’est totalement autre chose. J’aime lorsque l’on me demande de créer un programme, d’être aux manettes, autour d’une thématique, je suis alors libre d’ajouter des textes ; je construis une histoire. En récital je me sens comme une conteuse, dans un rapport unique avec le public avec lequel je tisse un lien que je trouve très fort.
Une manière de briser le 4e mur ?
Oui, l’échange est très concret, très chaleureux, il y a beaucoup de contact visuel, de regards ; le partage des émotions est immédiat. A l’opéra, il y a en effet cette notion de 4e mur, l’idée est d’oublier le public pour incarner un personnage, on est dans une pièce de théâtre. Mais il y a aussi d’autres contraintes, on ne maitrise pas tout, il faut gérer des aspects directement liés au chant et à la technique (où et comment se placer pour être dans la lumière, pour que la voix passe malgré l’orchestre…). Il y a la mise en scène, à laquelle on adhère plus ou moins, même si j’arrive toujours à trouver mon compte parce que c’est toujours un tel plaisir de jouer et chanter un rôle et de chanter à plusieurs.
Je suis profondément heureuse de faire les deux, il me manquerait vraiment quelque chose si je devais choisir et la comédienne en moi n’est jamais frustrée de ne pas faire de théâtre pur.
Pour revenir à la mise en scène, avez-vous des recettes pour vous approprier une proposition un peu délirante ?
Je n’ai jamais eu à faire à des gens trop délirants ! En revanche, j’ai eu parfois à faire avec des gens qui ne savaient pas exactement ce qu’ils voulaient, qui savaient plus ou moins bien l’expliquer, qui étaient plus ou moins bien préparés, aussi ! En général, cela se passe toujours bien avec les metteurs en scène parce que je propose des choses et qu’ils sentent que j’adhère à leur proposition : on fait un spectacle tous ensemble, c’est important d’essayer de comprendre la vision de l’autre, de confronter ses idées pour avancer. Si l’acteur-chanteur est en résistance, s’il s’oppose frontalement, on n’arrive à rien et le public le sent !
Carmen est votre premier choc lyrique, est-ce un rôle qui compte pour vous ?
Oh oui ! Moi qui aime les musiques populaires, les musiques du monde, je suis comblée d’autant plus que le personnage est sublime et très complet ! J’ai participé à une très belle reprise cette année à l’Opéra de St Etienne avec une super équipe, mais ma première Carmen était une création à Metz et Nancy, en 2010, avec Carlos Wagner… une sacrée rencontre. La production, après 12 représentations, a été rachetée par l’Opéra de Düsseldorf pour plus de 50 représentations et j’ai fait partie de l’aventure. J’ai réorganisé mon calendrier, déjà bien rempli, et ai pu participer à 30 levers de rideaux, changeant sans cesse de collègues, les découvrant parfois sur scène ! Même les chefs changeaient : nous faisions connaissance avant l’entrée en scène pour caler les tempi. Ce qui était très agréable, c’est qu’ayant fait la création, j’étais un peu une référente pour l’ensemble de la troupe. Les autres chanteurs m’ont dit que j’apportais une énergie supplémentaire qui portait la soirée, un retour qui fait plaisir ! Je m’en souviens comme d’une expérience passionnante parce qu’autant c’est formidable d’avoir le temps de répéter pour construire, autant l’urgence amène une écoute, une disponibilité qui donne une résultat étonnant de justesse. Sur scène, je sentais qu’il fallait à la fois que je sois très claire et dans une souplesse totale. Cela a duré 2 ans, j’arrivais la veille en avion, je repartais très tôt le lendemain…
Y a-t’il un autre rôle que vous auriez autant interprété que Carmen, au risque peut-être de vous lasser ?
Me lasser, sûrement pas ! Surtout avec des personnages où il y a beaucoup à défendre, où la musique est intéressante. J’ai effectivement interprété Carmen au moins 50 fois ; tout comme La Grande Duchesse de Gérolstein qui a tourné sur 2 saisons avec la compagnie des Brigands et joué plus de 60 fois. J’ai aussi beaucoup chanté la Didon de Purcell. Mais tous ces rôles sont passionnants et à chaque fois j’explore plus avant le personnage. La lassitude menace plus dans les rôles de troisieme plan qui ne permettent pas de développer grand chose comme ceux que l’on me propose à l’Opéra de Paris. C’est toujours une chance et un plaisir d’y chanter mais c’est moins exaltant (sans qu’il y ait moins de pression d’ailleurs)… Je préfère un grand rôle dans une maison plus petite où je sais que je pourrai m’épanouir. Les grandes scènes sont toujours flatteuses, mais un vrai rôle à défendre, c’est l’essentiel.
Y aurait-il un rôle qui vous fait rêver ?
Justement, en août à la Côte St André, je devais chanter Didon dans les Troyens à Carthage de Berlioz. Un beau cadeau, un vrai challenge, qui devrait se concrétiser en 2021 puisque l’édition de cette année vient être reportée. J’en suis très heureuse. Quand je travaille en ce moment, je me plonge dans Berlioz, d’autant plus que je devais chanter Béatrice dans Béatrice et Benedict à Cologne – annulé à la dernière minute, fin avril. C’est une musique que j’adore, pas forcément celle qui me toucherait le plus de prime abord, mais tellement bien écrite pour mon type de voix, riche de tant de couleurs superbes… C’est vrai que cela peut paraître un peu pompeux et pompier mais c’est de la musique de théâtre, toujours très juste.
Didon est donc l’un des moments forts de la saison à venir ?
Tout à fait, j’ai hâte d’y être, d’autant plus que l’orchestre est énorme, c’est monstrueux et sublime à la fois ! J’aurais hésité à accepter si on me l’avait proposé il y a quelques années, aujourd’hui je me sens prête. J’ai interprété Cassandre l’an passé, puisque la Côte St André montait alors la première partie desTroyens. J’ai adoré ce rôle vaillant, dramatique, mais maintenant que j’ai découvert Didon, il me serait difficile désormais de choisir entre les 2 personnages !
Avez-vous un autre projet actuellement sur le métier en vue du déconfinement ?
Harawi au festival Messiaen avec Roger Muraro, 1h de duo piano/chant, un vrai défi ! Les Wesendonck Lieder de Wagner en version chambriste pour le mois d’octobre. En juin, je vais enregistrer deux mélodies qu’un pianiste et compositeur, Gabriel Urgell Reyes, m’a composé. Il est lui aussi dans une recherche de ponts entre musiques savantes, traditionnelles et électro, je suis très heureuse qu’il m’embarque dans son aventure. Bref, les partitions se bousculent sur le piano !
Et comment construisez-vous vos personnages ?
Quand l’histoire est tirée d’un livre, je m’y plonge. Quel plaisir, de relire ici Shakespeare ou encore la Dame aux Camélias lorsque j’avais chanté dans Traviata à l’Opéra de Paris ! Je me construis déjà une identité en montant le rôle puis c’est vraiment la vision du metteur en scène qui prime. Celle des collègues est également très importante : ce qu’ils me renvoient m’aide à construire. Je le constate lorsque j’ai des partenaires différents pour un même rôle. Ils réagissent différemment et toute l’alchimie de la relation à mon propre personnage en est modifiée. Au lycée, j’avais dévoré L’Espace Vide de Peter Brook. Il y explique qu’il déplaçait les accessoires sur scène avant les représentations pour que les comédiens soient surpris et ne s’installent jamais dans une routine. A l’opéra je reste toujours dans les clous du canevas, par respect pour les autres, pour l’orchestre, pour les tops techniques… mais j’essaie également de creuser, d’explorer des choses nouvelles qui ne mettront rien ni personne en danger, mais déstabiliseront un peu et créeront de la spontanéité.
Une approche qui évoque l’esthétique baroque, non ?
Cette liberté, cette marge d’improvisation que l’on retrouve dans le jazz, font partie des choses qui m’ont attirée dans la musique baroque. En scène, les choses sont fixées assez précisément mais il y a de la liberté dans le jeu, dans les rapports avec les autres, l’histoire est toujours la même mais jamais racontée de la même manière. Pour ce qui est de la liberté musicale, je la trouve presque plus présente dans la musique romantique avec le rubato qui laisse de la place aux chanteurs. Si ces nombreux « élargissements » sont faits dans un esprit de théâtralité et pas juste pour montrer combien de temps le chanteur peut tenir son aigu, alors on gagne en émotion pour le public et c’est génial !
Si vous n’étiez pas cantatrice, quel serait votre métier ?
Chanteuse… Mais pas d’opéra ! j’ai plus de 1000 vinyles et j’aimerais créer de la musique électro à partir de samples, poser ma voix dessus… Une envie qui demande… du temps !
J’aimerais également ouvrir un bar associatif qui proposerait des concerts, mélangerait les arts (j’adore la photographie) et de multiples activités pour que les gens se rencontrent et partagent des choses, avec des jam sessions qui mêleraient tous les univers…
Avez-vous ne passion secrète ?
J’adore chiner ! Une passion qui n’a rien de secrète pour les gens avec qui j’ai travaillé ou qui ont vu ma maison (rires). En production, la première chose que je regarde c’est la date des vide- greniers, l’adresse d’Emmaüs… J’adore les objets anciens et en particulier retaper, bricoler, customiser. L’idée est de donner une seconde vie aux objets tout en les rendant encore plus beaux et originaux. Avec ma famille nous sommes dans une démarche zéro déchets. Je couds tout un tas de choses pour éviter d’utiliser du jetable. En ce moment, évidemment, je couds surtout des masques, comme tout le monde !