Comme chaque année lorsqu’il s’agit de décerner nos grands prix, le choix fut difficile. En 2015, l’art lyrique a une fois encore été prodigue en personnalités remarquables et remarquablement irritantes. Si l’équipe de rédaction est parvenue à force de discussion à un accord autour de l’Arabella de platine (qui récompense la personnalité lyrique la plus émérite de l’année), il lui a été impossible de se départager pour désigner l’Ortrud de Cristal (qui stigmatise la plus agaçante).
Arabella de Platine 2015
Anna Netrebko
C’est quasiment un parcours sans faute qu’a accompli Anna Netrebko depuis le temps lointain déjà où elle fut remarquée par Valery Gergiev qui l’engagea dans sa troupe et la fit tourner dans le monde entier.
En 2002, sa Donna Anna salzbourgeoise, sous la direction d’Harnoncourt, fait sensation et lui permet de signer un contrat d’exclusivité chez DGG, mais c’est sa Violetta, toujours à Salzbourg, en 2005, dans la célèbre production signée Willy Decker qui lui permet d’accéder à la notoriété internationale. Anna Netrebko restera fidèle au prestigieux festival où elle chantera quelques uns de ses meilleurs rôles (Juliette, Susanna, Mimi, Giovanna d’Arco, Leonora ..) ainsi qu’à l’Opéra de Vienne à qui elle offrira Amina, Adina, Manon et sa première Anna Bolena. En 2006, elle obtient d’ailleurs la nationalité autrichienne.
New-York est son autre port d’attache : depuis sa Gilda de 2005 elle y est revenue chaque année et y a chanté pas moins d’une quinzaine d’opéras dont la plupart ont été retransmis dans les cinémas du monde entier. Citons Roméo et Juliette, Les Puritains, Lucia di Lammermoor, Don Pasquale, Les Contes d’Hoffmann, Manon, L’Elixir d’amour, Anna Bolena, Iolanta, Eugène Onéguine, Macbeth, Le Trouvère.
Enfin, il lui restait encore un dernier bastion, incontournable pour tout artiste lyrique, à conquérir : la Scala. Après une Donna Anna remarquée en 2011, elle y a incarné, le 7 décembre dernier une Giovanna d’Arco d’anthologie. Nombre d’artistes non italiens, et pas des moindres, se sont fait chahuter un soir de la Saint Ambroise à Milan. Anna Netrebko, elle, a été accueillie au rideau final par onze minutes d’ovation de la part du public si exigeant des ouvertures de saison scaligères.
Pour cette suite ininterrompue de triomphes et en attendant sa Leonora du Trovatore à l’Opéra Bastille à partir du 31 janvier 2016, Anna Netrebko a bien mérité l’Arabella de platine que lui décerne cette année Forum Opéra.