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Cinq questions à Jean-Sébastien Bou

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5 questions
28 novembre 2016
Cinq questions à Jean-Sébastien Bou

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​Le Théâtre des Champs-Elysées reprend du 5 au 15 décembre Don Giovanni dans la mise en scène de Stéphane Braunschweig, datée de 2013, avec toujours à la direction d’orchestre Jérémie Rhorer accompagné de son Cercle de l’Harmonie. Le Baryton Jean-Sébastien Bou enfile pour l’occasion les habits du séducteur et partage sa vision du personnage.


Don Giovanni est un rôle que vous incarnez depuis longtemps sur scène. Comment le décririez-vous ?

Le caractère le plus important selon moi de Don Giovanni est qu’il se révèle toujours fidèle à sa nature qui se définit par deux points essentiels : d’une part la liberté, d’autre part l’urgence. Tout ce qu’il entreprend est pleinement assumé. Il ne se laisse jamais le temps de réfléchir. Son unique préoccupation est d’avancer inexorablement. Il ne s’arrête jamais même si son entourage n’avance pas au même rythme que lui. Il se sert des autres pour avancer. Il a besoin d’être ému et puise son énergie vitale dans la conquête des femmes, dans le désir. Son arme de séduction est de faire exister sa proie en la célébrant. Il ne veut pas posséder les femmes il veut les consommer. Cela provoque des conséquences malheureuses dans son entourage mais il ne se sent pas concerné par celles-ci… Il continue d’avancer. Pourtant il reste chevalier : à la fin, il affronte la mort et ne se renie pas. Il reste fidèle à lui-même. On peut donc le détester pour ce qu’il fait subir aux autres mais certainement pas pour sa lâcheté.

Comment le duo Braunschweig/ Rhorer vous a-t-il permis de prendre vos marques aisément dans cette mise en scène ?

Leporello (N.D.L.R. : Robert Gleadow) est le seul protagoniste qui était présent il y a trois ans lors de la création de cette production, je suis tout neuf comme la plupart des autres chanteurs.  Cependant, j’avais vu cette production en 2013 en ignorant évidemment que j’allais y participer en 2016. Je chantais alors Claude (N.D.L.R.: de Thierry Escaich, d’après le roman éponyme Claude Gueux de Victor Hugo) à Lyon avec Py et Jérémie (NDLR : Rhorer) d’ailleurs et enchaînais avec Mârouf (N.D.L.R. : de l’opéra du même nom Mârouf, Savetier du Caire de Henri Rabaud) à l’Opéra-Comique. ​​Stéphane Braunschweig propose ce que j’aime dans l’Opéra, il le considère comme un art complet, à la fois musique et théâtre. Si j’ai besoin de liberté, pour y parvenir, j’ai besoin de comprendre ce que je dois faire et pourquoi. Stéphane et Jérémie sont sur ce point d’une grande aide. Ils ont ceci en commun de savoir tous deux ce qu’ils veulent et savent l’expliquer. Quand on a un sens, une direction, on joue mieux et on chante mieux. Après je ne fais que réagir et interagir avec ce que mes partenaires me proposent. Je n’ai jamais pris de cours de théâtre mais cela fait bientôt vingt ans que je suis sur scène. Et je considère que tous les metteurs en scène que j’ai rencontrés durant cette période (Olivier Py, Luc Bondy, Krzysztof Warlikowski…et bien d’autres) ont été pour moi les meilleurs professeurs de théâtre. Pour en revenir plus spécifiquement à Don Giovanni, beaucoup considèrent que Mozart s’est projeté dans Don Giovanni avec sa fougue, sa vitalité et son rapport à la mort. Plus qu’à la mort, nous considérons tous trois que c’est surtout avec son rapport à la vie : il y a un temps imparti ; que fait-on de ce temps ?

Et vocalement ?

Le rôle a été écrit pour une jeune basse. Le registre de Don Giovanni utilisant souvent le bas medium, mon travail en tant que baryton est d’utiliser au mieux cette partie de la voix qui ne correspond pas tout à fait à la tessiture plus chantante où un baryton est naturellement plus à l’aise, en particulier dans les ensembles.

Quels interprètes de Don Giovanni vous ont le plus marqué et pourquoi ?

Parmi les enregistrements légendaires, j’adore la jeunesse et l’insolence de Wächter dans l’enregistrement de Giulini ou encore l’assurance voire la sagesse que l’on perçoit presque dans le timbre de basse de Siepi. Plus récemment, deux interprètes, deux barytons d’ailleurs, m’ont particulièrement marqué, car on retrouvait chez tous deux une synthèse, un héritage de ces légendes. Peter Mattei m’a ainsi impressionné par sa compréhension du personnage à Aix il y a vingt ans dans la mise en scène de Brooke. De la même manière, Rodney Gilfry dans la mise en scène de Dmitri Tcherniakov reste pour moi une référence.

Quel est le prochain grand rôle mozartien et non mozartien que vous rêveriez d’aborder ?

J’aimerais beaucoup chanter le Comte Almaviva dans Les Noces de Figaro. L’été prochain, je chanterai le rôle d’Alfonso dans Cosi fan tutte avec Marc Minkowski et Ivan Alexandre au festival de Drottningholn (à Stockholm) où je retrouverai d’ailleurs avec bonheur Robert Gleadow qui interprètera Guglielmo. Mais ce que je souhaiterais par-dessus tout c’est de reprendre le rôle d’Onéguine que je n’ai interprété qu’une seule fois (N.D.L.R. : à Tours en mai dernier). Onéguine, est un personnage complexe dont les sentiments évoluent. En fait il choisit de les ignorer et de les enfouir au plus profond de lui-même. C’est seulement à la fin de l’opéra qu’il comprend qui il est réellement. En ce sens peut-être est-il l’anti-Don Giovanni…

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