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Wagner in Switzerland

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CD
29 avril 2013
Wagner en Suisse ? Le compte n’y est pas !

Note ForumOpera.com

2

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Détails

Wagner in Switzerland

Egils Silins
baryton-basse

Ouverture, Le Vaisseau fantôme
Die Frist ist um, Le Vaisseau fantôme
Entrée des dieux au Walhall, L’Or du Rhin
La chevauchée des Walkyries, La Walkyrie
Lever de soleil et voyage de Siegfried sur le Rhin, Le crépuscule des dieux
Leb wohl, du kühnes herrliches Kind, La Walkyrie

Orchestre de la Tonhalle de Zurich
Direction musicale
David Zinman

1 CD RCA Red Seal 88725479412, 67′
Enregistré live à Zurich en juin 2012

 

En cette année de bicentenaire wagnérien, les hommages au grand homme se multiplient et abondent, que ce soit sous la forme de concerts, nouvelles productions, ouvrages, colloques, disques et récitals divers. Voici donc que RCA choisit d’aborder les rapports de Wagner avec la Suisse, pays où, comme chacun sait, le Maître a séjourné à de nombreuses reprises entre 1849 et 1858, essentiellement à Zurich et Lucerne. L’angle est original, et il n’est, par ailleurs, pas dénué de pertinence. On sait en effet que ses séjours zurichois ont eu une influence déterminante sur le processus créatif de Wagner. Les raisons de son arrivée en Suisse ne sont au demeurant pas glorieuses: chassé de Dresde par les troubles révolutionnaires auxquels il avait pris une part active, poursuivi par la police, il a débarqué à Zurich comme réfugié, traqué tel Siegmund au début de La Walkyrie, attiré par le caractère pénalement compétitif de la neutralité du pays davantage que par la beauté de ses paysages. La manière dont il y fut reçu, l’accueil très favorable réservé par un cercle d’amateurs éclairés (et fortunés) à ses écrits et à sa musique, mais aussi le calme apaisant de son environnement contribuèrent à l’y fixer: Zurich est ainsi le lieu où Wagner a séjourné le plus longtemps, à l’exception de Bayreuth. Mieux : on peut affirmer que ce havre de tranquillité a offert à Wagner la stabilité qui lui a permis de poser les jalons définitifs de son œuvre. Ainsi, c’est à l’ombre des alpages que le compositeur a rédigé les trois écrits qui constituent les fondements théoriques de son œuvre: L’Art et la Révolution (1849), L’Œuvre d’art de l’avenir (1850) et Opéra et Drame (1851). De la théorie à la pratique, les années zurichoises furent aussi marquées par un foisonnement créatif notable, avec l’achèvement du poème de L’Anneau du Nibelung, le démarrage de l’écriture musicale de La Walkyrie, mais aussi, dans la fièvre de la liaison avec Mathilde Wesendonck, le premier acte de Tristan et Isolde. Pour l’anecdote, c’est à Zurich que fut créé, en octobre 1856, le premier acte de La Walkyrie, en version de concert avec piano, Wagner y tenant les rôles de Hunding et Siegmund (!), Liszt étant au piano. Comme on aurait aimé voir (et entendre) ça… Tout cela est décrit de manière passionnante et très documentée dans le superbe livret qui accompagne le disque: avec sa couverture cartonnée et ses 84 pages de textes (tous en allemand, avec traduction en anglais et français) regorgeant de splendides illustrations en couleur (reproductions de tableaux, gravures, fac simile, photos), voilà un magnifique objet, comme on en croise trop rarement. Il faut le souligner et en faire crédit à l’éditeur, qui apporte ainsi un éclairage salutaire sur une période décisive de la vie de Wagner, trop souvent reléguée dans l’ombre du temple bayreuthien.

Orné d’un plumage si avenant, qu’en est-il du ramage? Disons les choses clairement: sans être indigne, la prestation musicale proposée par le disque ne se hisse pas au même niveau et ne justifie pas le même intérêt. Le programme alterne pages symphoniques et airs pour baryton extraits du Ring et du Vaisseau fantôme : rien que de très connu, et d’archi rebattu. C’est bien là le problème: dans ces pages qui constituent autant de tubes wagnériens, la concurrence n’est pas seulement pléthorique: elle est écrasante. Se risquer sur ces sentiers archi-fréquentés, qui sont à la discographie wagnérienne ce que le GR 20 est à la Corse au mois d’août, c’est courir le risque d’affronter la comparaison avec les grands anciens, ou plus simplement les meilleurs du moment. Sans démériter nullement, ni le chanteur ni l’orchestre ne font le poids. Egils Silins, entendu cette saison à Paris en Wotan de La Walkyrie et en Wanderer, a une voix de baryton qui frappe par sa puissance et par un timbre assez séduisant. On regrette qu’elle soit affectée par un vibrato qui, à la longue, devient gênant, et d’un aigu tendu (le sol aigu sur « fürchtet » à la fin des Adieux est particulièrement douloureux…). Ces symptômes hélas caractéristiques sont le signe, à 50 ans passés, d’un début d’usure de l’instrument. Une fois de plus, on mesure combien ce qui, en scène, dans l’acoustique d’une grande salle comme Bastille pouvait être masqué, est impitoyablement révélé par le disque. Au-delà, on cherche en vain une incarnation dans ces extraits. Le chanteur peut chanter ces pages, mais pour quoi dire ? Comme l’a malicieusement fait observer un éminent critique musical, si tout ce qui était possible était souhaitable, le code pénal n’aurait aucune raison d’être.

L’Orchestre de la Tonhalle de Zurich s’écoute sans déplaisir, et ses couleurs chatoyantes et mordorées sont servies par une prise de son idéalement réverbérée. Hélas, la direction de David Zinman s’avère bien décevante. La mesures finales de L’Or du Rhin sont pesantes et lourdes, la chevauchée des Walkyries manque cruellement de souffle et tombe à plat, quant au voyage de Siegfried sur le Rhin, il n’est que bruyant. Dormez en paix, Wilhelm Furtwängler, Arturo Toscanini, Otto Klemperer, Herbert von Karajan, Hans Knappertsbusch, Josef Keilberth (et bien d’autres), vous qui avez su conférer à ces pages un souffle épique à la hauteur du drame qu’elles illustrent: vous ne risquez pas d’être inquiétés au Walhalla des chefs wagnériens. Une dernière remarque enfin, pour regretter que le programme du disque ne soit pas parfaitement cohérent avec son objet. Si les extraits du Ring – et notamment ceux de La Walkyrie – y ont toute leur place, c’est nettement moins vrai de ceux du Vaisseau Fantôme, dont la composition et la création n’ont rien à voir avec la Suisse. Pour être parfaitement cohérent, on aurait dû, à leur place, trouver des extraits de Tristan et Isolde, et/ou les Wesendonck Lieder. Ce regrettable décalage entre le contenu et le contenant vient ternir le jugement porté sur ce très beau produit dont on aura compris qu’il gagne à être feuilleté plus qu’écouté.

 

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Die Frist ist um, Le Vaisseau fantôme
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La chevauchée des Walkyries, La Walkyrie
Lever de soleil et voyage de Siegfried sur le Rhin, Le crépuscule des dieux
Leb wohl, du kühnes herrliches Kind, La Walkyrie

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