« Ce petit livre (…) se veut un stimulant de la curiosité du lecteur, c’est pourquoi il emprunte souvent et beaucoup à tout ce qu’il faut lire : les sources anciennes, mais aussi les beaux ouvrages que la musicologie a consacrés à cette période. L’utilisant comme un sésame, le lecteur conservera toute sa liberté pour créer avec le XVIIe siècle musical la relation qui conviendra le mieux à sa propre personnalité. » Voilà ce qu’on peut lire, page 21, sous la plume de l’auteur elle-même. Difficile de mieux résumer cet ouvrage, où toute l’érudition de Georgie Durosoir, grande spécialiste de la musique baroque française, met à la portée de tous son immense culture et propose une invitation à ouvrir autant de nouvelles portes qu’il y a de sujets traités. Sous ses dehors d’une extrême humilité, citant à tour de bras ses collègues et leurs ouvrages, Georgie Durosoir brosse toutefois un tableau très personnel de la musique du XVIIe siècle européen : débordant le cadre de l’exposé purement historique, elle ouvre en effet des perspectives d’esthétique autrement plus ambitieuses, avec quelques remarques aussi laconiques (c’est la loi du genre) qu’éclairantes sur les ressorts du « baroque », époque et courant dont elle préfère quant à elle souligner les différences, les ruptures, les volontaires recherches, que les continuités.
Les 50 questions se répartissent en cinq moments d’importance diverse : cinq questions « fondamentales » en guise d’introduction, étude du cas de la musique vocale profane en Italie (et la véritable naissance de l’opéra), la France ensuite (et sa tragédie lyrique), cinq petits chapitres pour le reste de l’Europe (merveilleuse pages sur Purcell), et les cinq derniers en forme de synthèses plus générales sur le baroque et ce qu’on qualifie « d’esprit national ». L’exploit ici tient à ce que, malgré la brièveté des chapitres et des cas étudiés, le lecteur ne sort jamais frustré. L’essentiel est là, sans détour, sans fioriture certes, mais serré et complet, exemples musicaux à l’appui lorsque cela est nécessaire. Bien entendu, l’auteur ne cesse de nous inviter à ouvrir d’autres livres pour approfondir tel ou tel aspect du sujet. La bibliographie a d’ailleurs été entièrement refaite pour cette nouvelle édition (l’ouvrage fut initialement édité en 1994), profitant de l’extraordinaire éclosion documentaire de ces dix dernières années. En annexes, on trouvera une chronologie des principaux ouvrages de musique profane de l’époque envisagée, ainsi que quatre pages de sources littéraires de l’époque. Un merveilleux outil pour découvrir ou mieux comprendre le monde de l’opéra en son première siècle.
David Fournier