Ce parcours marial se concentre sur la liturgie des XVIIe et XVIIIe siècles en Italie. Avec comme ancêtre tutélaire Monteverdi, et comme épigone inattendu Stravinski.
Et surtout, au cœur de ce répertoire point tout à fait inconnu, on trouve un Salve Regina d’Alessandro Melani dont le disque monographique nous avait, l’année dernière, réjouit le cœur. Le dialogue entre la soprano et le chœur est empreint d’une désolation tendre, d’une douce compassion, faisant songer aux larmes des statues de marbre.
Dans cette pièce frappe l’adéquation stylistique du Concerto Italiano, qui sait admirablement adapter timbre et ligne à ce baroque flamboyant, quand dans Monteverdi prévaut une netteté parfaite, une austérité où l’ornement produit un effet sensible tout différent. Degré supplémentaire dans cette expansion avec le Magnificat de Soler, chanté de façon très dramatique, quasi-théâtrale, avec des timbres volontairement brunis et forcés.
Autant le Magnificat du Romain Bencini semble, dans sa beauté calme, un rien conventionnel, autant le Salve Regina de son contemporain et confrère Alessandro Scarlatti démontre, au gré des interprétations, sa profondeur : Alessandrini en propose une lecture extrêmement recueillie, moins monacale qu’Alan Curtis l’an dernier, mais plus savoureuse et colorée que Gérard Lesne.
Le Magnificat de Carissimi permet au Concerto Italiano de retrouver derrière le propos sacré l’affect du madrigal : cette célébration mariale est moins incantation que conversation intime, entrelacs de confidences. C’est cette veine que cultive Stravinski dans son Ave Maria, dont il faut bien dire qu’il tient davantage du pastiche que de l’expression personnelle.
Sylvain Fort