L’expression « catalogue raisonné » semble ne s’appliquer qu’aux beaux-arts, mais on y songe en découvrant le Catalogue général des œuvres de Massenet élaboré par Hervé Oléon et Mary Dibbern. Catalogue passionné, sans doute également, car le premier des deux co-auteurs n’est autre que le vice-président de l’Association Massenet Internationale, directeur de la rédaction de la revue de ladite association, et auteur d’une biographie de Lucy Arbell, récemment parue et chroniquée ici-même ; la seconde est pianiste, chef de chant et musicologue, et a traduit en anglais le livre d’Anne Bessand-Massenet, Massenet en toutes lettres. Quant à l’éditeur américain qui s’est chargé de publier ce volume bilingue, il n’a pas lésiné car aux informations savantes s’ajoutent toute une série d’illustrations qui en rendent la consultation plus agréable.
Les premières pages accueillent le rapide « Portrait » (signé Anne Bessand-Massenet) et la « Préface » due aux co-auteurs, pour situer un compositeur prolifique : « 25 ouvrages lyriques, 4 oratorios, des musiques de scènes, de la musique pour piano, de la musique symphonique, plus de deux cent quatre-vingt-mélodies, des duos, trios et quatuors vocaux, des cantates, des chœurs avec et sans accompagnement »… Ces différentes catégories sont ensuite traitées en douze parties et 265 pages. A l’intérieur de chaque chapitre, les œuvres sont rangées par ordre alphabétique, de L’Adorable Bel-Boul à Werther pour les opéras (100 pages), avec localisation des sources manuscrites, distribution, liste des morceaux, sans oublier les variantes et ajouts postérieur à la création, ni les œuvres « incomplètes, perdues ou réutilisées ». Pour les mélodies, le classement alphabétique des titres est fort judicieusement complété par un classement des auteurs (huit poèmes de Victor Hugo, tout de même, trois Musset, deux Verlaine et un Théophile Gautier, sur la masse…) et même un récapitulatif des dédicataires. Les chanteurs amateurs ou professionnels apprécieront le « Classement des principaux rôles par tessitures ». Parmi les annexes, une « Notice chronologique et biographique » d’une douzaine de pages.
Il faut bien sûr reconnaître que cet ouvrage de référence n’est en aucun cas conçu en vue d’une lecture continue, et qu’il est sans doute destiné aux bibliothèques plus qu’aux particuliers. Il s’agit en fait de la version améliorée d’un premier catalogue paru en 2006 et déjà révisé en 2009, enrichi cette fois « d’ouvrages supposés perdus et finalement resurgis » (qu’on ne s’attende pourtant pas à des découvertes stupéfiantes : l’enquête menée par Hervé Oléon lui a permis de retrouver une œuvre de jeunesse assez mineure, un Hymne à la Paix datant de 1867). C’est aussi l’occasion de faire la lumière sur quelques points obscurs, notamment la fameuse version baryton de Werther, dont rien n’indique de manière incontestable qu’elle ait réellement été arrangée par Massenet : le compositeur ne fit peut-être qu’approuver a posteriori une version modifiée par Battistini lui-même…