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Křenek – Reisebuch aus den österreichischen Alpen

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CD
17 novembre 2016
Des Alpes en manque de relief

Note ForumOpera.com

2

Infos sur l’œuvre

Reisebuch aus den österreichischen Alpen op. 62 pour baryton et piano (1929)

Détails

Baryton
Florian Boesch

Piano
Roger Vignoles

Enregistré à Dunwich en octobre 2015

1CD Hyperion CDA68158 – 59’09 »

Être compositeur de Lieder en Autriche après Schubert et Mahler est loin d’être une mince affaire, et Ernst Křenek est le premier à s’en rendre compte. « Nous pouvons apprendre de lui (Schubert) la plus grande vivacité, c’est à dire une constante variabilité et une subtile finesse dans l’expression avec la plus grande économie de moyens. Une modulation en mineur est chez Schubert tout de même un évènement musical décisif », écrit le compositeur tchèque installé à Vienne. Aussi, il n’est pas étonnant d’apprendre que ce dernier rédigera sa thèse avec pour postulat le fait que l’atonalité ne passe pas nécessairement par un constat de l’épuisement du langage tonal. Cette assertion est d’autant moins étonnante quand on sait que Křenek aura flirté toute sa vie avec des modes d’expressions aussi divers que la polyphonie de la Renaissance, le Lied allemand (le cas ici), le dodécaphonisme le plus strict ou encore le jazz et la musique de cabaret. 

Mais venons en au sujet de ce Reisebuch aus den österreichischen Alpen (en français Carnet de voyage dans les Alpes autrichiennes). Il est la réaction directe du compositeur à un voyage effectué en juin 1929, qualifié par lui même de « pèlerinage aux sanctuaires de la nature et de l’histoire de l’Autriche ». Composé en à peine vingt jours, le cycle comporte vingt numéros divisés en quatre parties. Ce sont autant de petites miniatures livrant les impressions de Křenek sur ce qui l’entoure : les montagnes, les camions de la poste, la pluie, les auberges ou les touristes. Nous le disions avant, le langage utilisé ici est volontairement dérivé de celui de Schubert, selon le principe d’une mélodie accompagnée. Cependant, Křenek se plaît à nous rappeler qu’il est un homme de son temps, usant de la dissonance, du pastiche ou de la musique de cabaret à des fins comiques. 

Avec ce cycle, c’est comme si l’auditeur lisait les cartes postales du compositeur. Tout sent bon les sapins et les bonbons au miel, on imagine très bien le petit village d’Hallstatt déposé à même la montagne au bord du lac, on se laisse bercer par le doux mouvement du train et on s’endort. 

Sans vouloir qualifier l’œuvre de Křenek soporifique, on regrette de temps à autre un manque de poigne ou d’inventivité dans l’écriture. Bien sûr, quelques pages font sourire voir même franchement rigoler (Verkehr ou Alpenbewohner qui fait l’effet d’une anticipation du film Les bronzés font du ski), d’autres sont déjà plus différenciées (Friedhof im Gebirgshof, un glaçant Politik qui anticipe le conflit à venir ou un très curieux Epilog), mais rien ne semble génialement original. On se souvient alors avec nostalgie des œuvres scéniques telles que Schwergewicht, Das geheime Königreich et bien sûr l’éclectique Johnny spielt auf

Que penser ensuite de ces quatre mélodies de Zemlinsky ? Elles sont très charmantes mais arrivent un peu comme un cheveu sur la soupe tant elles ont peu de rapport avec l’esthétique du compositeur précédent. De plus, elles ne sont pas non plus ce que Zemlinsky a écrit de mieux. La littérature vocale de Křenek est tout de même suffisamment abondante que pour compléter ce Reisebuch de manière cohérente, non?

La musique est servie par deux interprètes de qualité. D’un côté, le baryton Florian Boesch nous offre une lecture propre et précise de l’œuvre. On distingue chaque mot et le chanteur use même de son accent autrichien pour souligner le côté champêtre de certaines pièces (Unser Wein, un hommage direct à Schubert). Sa tessiture n’étant pas mise à rude épreuve (tous les lieder sont transposés), l’émission n’est jamais tendue et le son est toujours agréable. Il en va de même pour son acolyte Roger Vignoles, dont le jeu est agréablement distingué. Mais les deux interprètes accusent le même défaut que le compositeur, ou plutôt soulignent ce que nous regrettions déjà. Ici non plus, rien de foudroyant dans l’interprétation. Ce n’est certes pas le but du cycle, mais l’escalade des rares audaces du compositeurs semble être abordée à reculons. On en vient à se demander si ce n’est pas la prise de son qui a atténué les contrastes sonores. 

Malgré toute leur classe et leur chic, ces Alpes autrichiennes manquent encore un peu de relief pour combler pleinement nos attentes.

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