Le conflit entre la Ville de Dijon et son orchestre (voir brève du 25 août et du 5 septembre derniers) connaît un nouveau rebondissement. Le Canard enchaîné, dans son édition du 3 septembre, publiait un article de Frédéric Pagès faisant porter la responsabilité des difficultés surgies à Laurent Joyeux, directeur de l’opéra. En substance, depuis son externalisation, l’orchestre serait victime de cette direction, dont les projets sont trop ambitieux, et qui n’aurait de cesse de se débarrasser de l’orchestre. Vision partisane et infondée – les faits et les chiffres en apportent la preuve irréfutable – qui porte un grave préjudice à l’institution et à la politique artistique et managériale conduite par son directeur.
Aussi, ce dernier se manifeste-t-il dans un long article où il réfute point par point les allégations, les fausses informations et les mensonges diffusés par le Canard et relayés sur les réseaux sociaux. Les extraits ci-dessous ne peuvent rendre compte de la cohérence de la démarche et nous renvoyons le lecteur curieux à l’original.
« L’Orchestre Dijon Bourgogne a (…) toujours été associé aux productions majeures de l’Opéra, avec des chefs, des solistes, des metteurs en scène de tout premier plan…, l’Opéra s’est attaché à défendre l’idée d’une association fructueuse avec l’Orchestre Dijon Bourgogne et a toujours permis à celui-ci de s’exprimer dans les meilleures conditions possibles – celui-ci répétant systématiquement ses concerts ou productions lyriques donnés à l’Opéra dans la salle même (Auditorium ou Grand Théâtre), et non dans une Chapelle non chauffée. »
La production du Ring a été initiée en 2009, avec accord de la gouvernance de l’orchestre, préparée avec soin (avec le concours de Brice Pauset et la collaboration de Daniel Kawka, familier de l’orchestre).
« Et pourtant, le 28 mars 2013, soit quatre mois à peine avant le début des répétitions, ce qui rendait toute annulation ou report du projet impossible, l’Orchestre Dijon Bourgogne annonce non seulement son retrait du projet, mais aussi de toutes les productions lyriques à venir (dont Peer Gynt et Les Noces de Figaro au printemps 2014) pour lesquelles il avait pourtant confirmé son engagement.Et ceci, en dépit d’une participation financière de l’Opéra en hausse constante.
Après avoir été négociée et confirmée une première fois par l’Orchestre le 3 janvier 2012 à un montant de 124.000 euros, elle est portée le 11 décembre 2012 à 210.240 euros (afin de couvrir le coût total des musiciens supplémentaires rechiffré par l’Orchestre).
La Ville de Dijon, face à ce retrait, et après d’âpres négociations, a décidé de diminuer la subvention versée à l’Orchestre de la moitié du montant que ce dernier disait vouloir consacrer au Ring, et a donc versé ces 180.000 euros à l’Opéra, l’Orchestre Dijon Bourgogne s’engageant par ailleurs à assurer les représentations de Peer Gynt et des Noces de Figaro. Charge à l’Opéra de trouver ou constituer un orchestre à même de sauver ce projet du Ring.
Quoi de plus naturel que de ne pas percevoir la totalité d’une subvention publique prévue pour un projet dont on s’est retiré ?
180.000 euros ont donc été retirés de la subvention versée cette année là à l’Orchestre : nous sommes loin des 330.000 euros que réclame aujourd’hui l’Orchestre pour survivre. Il est donc difficile d’admettre que l’Opéra puisse être aujourd’hui considéré comme le responsable de la déroute financière de l’Orchestre. C’est donc la gouvernance de ce dernier qui en faisant sans cesse monter les enchères tant vis à vis de la Ville que de l’Opéra, a créé un problème pour l’Orchestre, et pour l’Opéra. L’Opéra n’a jamais cherché à tirer parti de ces indigences et inconséquences en termes de gestion, comme il aurait aisément pu le faire, si son désir secret était la disparition de l’Orchestre […] C’est une décision de la gouvernance de l’Orchestre qui a empêché ses musiciens de participer à un projet pour lequel ils avaient été choisis, et s’étaient préparés depuis de longues années.
Mais il est toujours facile et souvent payant de prendre pour cible les projets ambitieux pour masquer sa propre responsabilité. Les gesticulations actuelles de la gouvernance de l’Orchestre pour tenter de justifier, plus d’un an après, leur retrait du projet, ne sont qu’un écran de fumée qui la dédouane de donner les véritables raisons de son marasme actuel. La Ville de Dijon évoque d’ailleurs un audit – dont je n’ai pas connaissance – qui conclut à « une gestion imprudente ».
Sur le coût du Ring, la mise au point, chiffrée et vérifiable, invalide tout ce que distillent depuis trois mois les pourfendeurs de l’opéra et de son directeur. Dans sa conclusion, ce dernier martèle ce qu’il n’a cessé de dire :
« Je soutiens et je souhaite la nécessaire présence d’un orchestre à Dijon. C’est évidemment un besoin. Pour tous, public et professionnels de la musique. J’ai d’ailleurs fait part, sans ambiguïté, de ma position à la Ville de Dijon dès la fin de l’été : l’Opéra a besoin d’un orchestre, Dijon a besoin d’un orchestre. »