Quelques jours après la première à Toronto, la presse d’outre-Atlantique livre ses comptes rendus sur l’opéra Hadrian. Ni chef-d’œuvre éclatant, ni échec, ce deuxième opus lyrique de Rufus Wainwright a modérément convaincu. Le New York Times y voit un opéra « exaspérant », qui marque certes un progrès par rapport à Prima Donna, mais qui reste « décevant » : trop de cuivres déchaînés, trop de mélodrame. Le Globe and Mail relève les « réelles beautés » de la partition et s’en prend plutôt à un livret indigeste, répétitif et trop peu dramatique : Confronté aux intrigues politiques, à la montée en puissance du monothéisme et à la menace d’une guerre, l’empereur Hadrien profite de la dernière nuit de sa vie pour se lancer dans un « voyage astral » en forme de flashback, afin de retrouver son amant Antinous et d’en savoir plus sur les circonstances de sa mort un an auparavant. Quatre actes, près de trois heures de musique (quelques coupes ne seraient pas superflues, semble-t-il), 5 personnages principaux, 9 secondaires, un chien, un chœur de 40 chanteurs, un orchestre de 70 musiciens… La Canadian Opera Company mise beaucoup sur cette création mondiale qui a, paraît-il, attiré des directeurs de festivals américains et européens. La partition, qui entraîne les chanteurs aux extrêmes de leur tessiture, révèle toutes sortes d’influences : Chostakovitch, Mahler, le jazz ou la bande-son des péplums hollywoodiens. Clou du spectacle, qui revendique la mise en avant d’une histoire d’amour homosexuelle : le troisième acte s’ouvre sur une scène où les deux personnages principaux s’étreignent amoureusement. On n’attend plus que le DVD promis par Thomas Hampson, interprète du rôle-titre, dont la prestation a été dûment saluée, d’autant plus que le baryton américain a récemment fêté ses 63 ans.