Serions-nous revenus en juin 1789 sans le savoir ? On pourrait le penser, à suivre la « Révolution des artistes », mouvement né en février dernier dans les pays germanophones et qui commence à prendre une certaine ampleur. Tout a commencé par une page Facebook lancée par trois artistes dont le producteur de spectacles Johannes Maria Schatz, qui souhaitaient protester contre la dégradation des conditions de travail des artistes en Allemagne, en Suisse et en Autriche. Le mouvement a été rejoint par la mezzo-soprano viennoise Elisabeth Kulman.
Dans un rôle inédit de déléguée syndicale, elle a évoqué le sujet lors d’une rencontre avec Alexander Pereira, Intendant du Festival de Salzbourg, le 8 mai dernier. Elle a notamment mis sur le tapis la question du non-paiement des semaines de répétition pour les artistes lyriques. Selon le compte-rendu qu’elle a publié sur son site internet, Pereira aurait indiqué que nulle part dans le monde les répétitions étaient payées, y compris lorsque la générale est ouverte au public et que le niveau des cachets était adapté pour prévoir la rémunération des semaines de préparation. Les théâtres germaniques sont toutefois dans une situation particulière : là où un spectacle lyrique en France, en Italie ou aux Etats-Unis demande entre une et quatre semaines de répétition, il n’est pas rare que six à sept semaines soient exigées des artistes en Allemagne et en Autriche. Pour preuve, les répétitions pour le Falstaff salzbourgeois, mis en scène par Damiano Michieletto sont sur le point de démarrer, alors que la première est prévue… le 29 juillet.
« Sans vous, on ne peut rien faire » ; « j’aime les artistes » ; « je voudrais vous payer plus »… Telles sont quelques unes des déclarations avec lesquelles Pereira a essayé de rassurer, en faisant aussi valoir au passage que le Festival de Salzbourg l’avait épuisé. Il reste que, pour la « Révolution des artistes », le combat continue. [Hélène Mante]