Annoncées pour l’été, les sessions d’enregistrement ont déjà commencé, à la Villa San Fermo de Lonigo : après avoir redonné tout leur lustre à Faramondo et Alessandro, ouvrages brillants mais mineurs sur le plan dramaturgique, Max Emanuel Cencic a jeté son dévolu sur le plus noir des opéras de Haendel, Tamerlano. C’est incontestablement l’un des plus grandes réussites théâtrales du Saxon, hélas, négligée par les maisons de disque (quatre intégrales et aucune réussite flagrante malgré les éclairs de génie de Petrou chez MDG). Placido Domingo ne s’y est pas trompé et l’ajoutait à son tableau de chasse il y a cinq ans déjà (Opus Arte a immortalisé le spectacle madrilène), car, fait inhabituel dans l’opera seria de l’époque, le véritable héros de l’ouvrage, le sultan ottoman Bajazet, est chanté par un ténor. L’empereur des Mongols (Tamerlan), quant à lui, est destiné à un contralto et incarne le vilain de service. Max Emanuel Cencic, qui se contente de la partie d’Andronico, a recruté le prince des ténors haendéliens, John Mark Ainsley, ainsi que Karina Gauvin (Asteria), Xavier Sabata (Tamerlano), Ruxandra Donose (Irene) et Pavel Kudinov (Leone). Nous retrouverons, à la tête de son orchestre Il Pomo d’oro, Ricardo Minasi qui devra tempérer une fougue parfois débridée (Cf. les récitals Bad Guys de X. Sabata et Venezia de M.-E. Cencic) et nous convaincre qu’il a bien la stature d’un chef lyrique. L’ouvrage sera donné l’année prochaine en version de concert à Versailles (6 avril), Cologne (4 mai) et Vienne (25 septembre), Sophie Karthaüser succédant à Karina Gauvin (Asteria) et Daniel Behle alternant avec John Mark Ainsley en Bajazet.
Parmi les multiples projets de Max-Emanuel Cencic, qui nous confiait récemment s’intéresser également à l’oeuvre de Hasse, signalons, en 2015, deux nouvelles raretés napolitaines que le succès de l’Artaserse de Vinci a certainement inspirées, sinon permises: le Catone in Utica du même, lequel, sauf erreur, n’a plus été donné depuis une production isolée en 1987 et qui sera mis en boîte par DECCA, puis Germanico in Germania de Porpora, à l’affiche du Festival d’Innsbruck, avant d’être, lui aussi, gravé et repris en tournée. Il va sans dire que nous en reparlerons. En attendant, nous pourrons bientôt retrouver le bouffon hystérique campé par Cencic face à l’affolante Poppée de Sonya Yoncheva, EMI Virgin ayant eu la bonne idée de sortir en DVD L’Incoronazione di Poppea monté l’année dernière à Lille et à Dijon par le tandem Sivadier/Haïm. [Bernard Schreuders]]