Si les spécialistes connaissent La Pellegrina pour préfigurer l’opéra, jamais – à notre connaissance – elle n’a fait l’objet d’une représentation scénique depuis 1589, année de sa création. Les noces florentines de Ferdinand Ier, le Grand-Duc, et de Christine de Lorraine, en furent la cause : huit mois de préparation, les plus grands de tous les corps de métier convoqués, des moyens considérables, ce fut un réel événement.
C’est à Judith Pacquier que l’on doit la conception et la maîtrise d’œuvre de cette renaissance. L’équipe est constituée notamment d’Etienne Meyer à la direction d’orchestre et d’Andreas Linos, à qui l’on doit une mise en scène inventive, originale, toujours juste. Cette équipe parle d’une même voix.
Il en va de même des vingt-quatre chanteurs, dont les principaux solistes sont en tous points remarquables : excellentes voix, familières de la stylistique baroque, formées auprès des grands chefs de la génération précédente, mais aussi acteurs dignes de la commedia del arte, toujours crédibles tant dans la drôlerie que dans les moments d’émotion. Renaud Delaigue, splendide basse est un comédien né et campe un Giovanni de Bardi qui nous ravit. Le ténor Hugues Primard dont l’agilité dans les traits, les diminutions et toute l’ornementation baroque sont exceptionnels, mais aussi Mariana Rewerski, mezzo déjà bien connue et appréciée, Capucine Keller, soprano s’étant illustrée récemment dans le Nabucco de Garcia Alarcon, chacune, chacun mériterait d’être cité.
Un spectacle magique, qui se construit sous nos yeux, avec notre complicité, parfaitement abouti, efficace, rondement mené au point qu’on en oublie la durée (2h 40, avec entracte), voilà une magnifique réalisation qui ravit l’oreille, l’œil, l’intelligence et la sensibilité, à voir encore les 4 et 5 février à Dijon. [Yvan Beuvard]
Dijon, Grand-Théâtre, La Pellegrina, une fête florentine