A en croire les adeptes de l’Art pour l’art, la musique était de tous les arts le plus abstrait, c’est pourquoi, selon Walter Pater, tout art aspire constamment à la condition de la musique. Et de toutes les formes de musique, l’opéra est assurément la plus artificielle, la plus éloignée du monde réel. L’art lyrique a-t-il dès lors sa place dans l’ouvrage que vient de faire paraître Emmanuel Reibel, Nature et musique ? Oui, car malgré toute la stylisation qu’il fait subir à la réalité, la musique vocale s’est toujours inspiré de la nature : dans l’opera seria, c’est l’aria di paragone qui imite les tempêtes, dans le lied et la mélodie, c’est la description des paysages, dans la tragédie lyrique, les trembleurs d’Isis évoquent le froid de l’hiver, dans l’opéra romantique, l’éruption du Vésuve met fin à La Muette de Portici. Evidemment, c’est peu au regard de la quantité de musique à programme qu’on a pu composer en cinq cents ans, mais CO2 de Battistelli a montré que l’opéra pouvait désormais chercher à sauver la planète. Et comme Fontenelle l’écrivait il y a quelques siècles, la nature ressemble à un opéra, puisque nous n’en voyons que le spectacle sans pouvoir connaître l’envers du décor…
La Nature et la musique, Fayard/Mirare, janvier 2016, 192 pages, 15 euros, ISBN 978-2-213-70045-8