« L’avantage de la musique baroque, c’est qu’on peut y faire ce qu’on veut », et donc parfois n’importe quoi. Cette formule délibérément schématique semble avoir été prise pour devise par certains interprètes, et devoir hélas guider certaines initiatives qui, pour être sympathiques, ne méritent pas toujours d’être immortalisées par un disque. Rapprocher les musiques occidentales et orientales n’est pas une démarche nouvelle et, dans ce domaine, le meilleur côtoie le pire. Entre ces deux extrêmes, on situera peut-être le disque publié par Capriccio, Carneval Oriental, aussi étonnant par le flou linguistique de son titre que par le rapprochement qu’il opère entre deux orchestres, L’Arte del Mondo que dirige Werner Ehrhardt, et le Pera Ensemble de Mehmet C. Yeşilçay, interprétant une large gamme de compositeurs, allant d’Allegri et Monteverdi jusqu’à Campra et Vivaldi. L’idée pourrait sans doute fonctionner pour les musiques alla turca, mais il n’est pas sûr qu’elle soit tout à fait légitime pour des œuvres que leur livret situe certes au Proche-Orient, mais dont la partition n’a rien de dépaysant : Armide, Giulio Cesare ou Radamisto. Les deux chanteuses ne déméritent pas, mais qu’apportent vraiment les rythmes et instruments « exotiques » aux opéras de Haendel ou d’Alessandro Scarlatti ? Chacun, selon ses oreilles, aura peut-être sa réponse à cette question.
Carneval Oriental, Francesca Lombardi Mazzulli, soprano, Charlotte Quadt, mezzo-soprano, Pera Ensemble / L’Arte del Mondo, 1 CD Capriccio C5263