Si par « opéra », on désigne exclusivement une forme de théâtre musical née en Italie vers 1600 et reposant sur un certain type d’émission vocale, alors non, Kalîla wa Dimna n’est pas un opéra. Mais si l’on songe qu’on parle d’« Opéra de Pékin » pour évoquer une tout autre façon de chanter une histoire en scène, alors Kalîla wa Dimna est peut-être bien un opéra. Présenté comme la création mondiale de l’édition 2016 du Festival d’Aix-en-Provence, ce « projet interculturel » est une nouvelle commande passée au compositeur palestinien Moneim Adwan, déjà auteur de La Colombe, le Renard et le Héron (2014), également mis en scène par Olivier Letellier. Si l’orchestre associe violon, violoncelle et clarinette à un qanûn et à des percussions typiquement orientales, l’écriture vocale semble, pour des oreilles profanes, relever presque exclusivement du chant classique arabe. Dans un décor fait de plates-formes mobiles, cinq chanteurs dont une narratrice racontent une histoire simple de jalousie et d’ambition. De ce spectacle sympathique et plein de bonnes intentions, il appartient aux spectateurs de Baalbek, Lille, Le Mans, Dijon ou Paris de déterminer s’il relève ou non du genre opéra, puisqu’une grande tournée est prévue, qui devrait même inclure l’Amérique du nord et l’Australie.
Kalîla wa Dimna, opéra en arabe et en français, livret de Fady Jomar et Catherine Verlaguet, créé au Théâtre du Jeu de Paume le 2 juillet 2016, mise en scène d’Oliver Letellier, direction musicale Zied Zouari.