Alors que la grève à Radio France s’éternise, les musiciens de la maison ronde adressent au Premier Ministre et à la Ministre de la Culture et de la Communication une lettre, reproduite intégralement ci-dessous, afin de préciser leur situation. Cette lettre a reçu et continue de recevoir le soutien de nombreuses personnalités, du monde de la musique mais pas seulement, qui ont accepté que leur nom figure parmi les signataires.
Monsieur le Premier Ministre, Madame la Ministre,
Depuis quelques semaines Radio France est secouée par une grève sans précédent.
Les formations musicales de cette maison ne cessent d’être la cible d’ attaques récurrentes qui menacent leur existence même (fusion, sortie d’ un orchestre, redimensionnement). L’Orchestre National de France et l’Orchestre Philharmonique de Radio France sont pointés du doigt.
Depuis l’origine les chefs les plus prestigieux dirigent ces formations. Le niveau et la réputation internationale de ces orchestres sont un atout majeur dans le rayonnement de Radio France, dont la vocation de service public, rappelons-le, est d’informer, d’éduquer, de divertir. En association avec les antennes qui se font l’écho de leur travail, les formations musicales participent avec ferveur à cette mission avec des programmes audacieux, soutenant la création, les jeunes talents, et les projets pédagogiques.
Les formations musicales de Radio France (les deux orchestres, le Chœur et la Maîtrise) ont des identités fortes : c’est une richesse unique au monde, qu’aucune autre radio ne peut se targuer d’abriter. C’est cette richesse dont on veut priver aujourd’hui Radio France, ses antennes et ses auditeurs.
Ces formations reflètent par ailleurs toutes les valeurs que nos politiques veulent défendre, à raison : la Culture contre la barbarie, l’exception française, la jeunesse (avec le recrutement de musiciens issus des conservatoires supérieurs et la formation grâce au travail de la maîtrise), la parité hommes-femmes que beaucoup d’entreprises devraient nous envier.
Pour honorer ces missions et ces valeurs, les formations musicales ne représentent que 6% du budget global de Radio France. La menace qui pèse sur elles, au nom d’une logique de rentabilité absurde, est la preuve du désengagement de l’état. Le paysage musical français se désertifie peu à peu… Les conservatoires, les festivals, les orchestres sont mis à mal partout en France.
A l’heure où l’actualité nous livre les dérives de l’ignorance, dans une brutalité et une intolérance grandissantes, nos dirigeants doivent prendre conscience de la nécessité de PROTEGER et de COMMUNIQUER LE SAVOIR et la CULTURE qui en sont les remparts. La société en a besoin. Alors que la réouverture de Radio France au public vient de révéler les qualités et le potentiel d’un nouvel auditorium, nous réclamons une politique artistique digne du service public, et qui préserve l’avenir des formations en son sein.
Alain Altinoglu , Jacques Attali , Roselyne Bachelot , Stanislas de Barbeyrac , Louis Barruol, Hadrien Bichet, René Bosc, Christophe Botti, JC Casadessus, Marc Coppey , Vladimir Cosma , Catherine Cyler, Natalie Dessay , Shani Diluka, Quatuor Ebène, Patrice Fontanarosa, Pierre Forest, Fabien Gabel , Anne Gastinel , François-Frédéric Guy, René Koering , Serge Krebus, Emmanuel Krivine, Katia et Marielle Labèque , Frédéric Lodéon, Quatuor Modigliani , Raphaël Oleg , Régis Pasquier, Roland Pidoux , Natacha Régnier, Robert Sadin, Pinchas Steinberg, Sonia Vollereaux, Trio Wanderer , et plus de 10000 autres personnes, à ce jour, sur le site change.org.