Autre Collegium Vocale, même Passion

Si tout le monde connaît en Belgique le Collegium Vocale de Gand, peu nombreux sont ceux qui avant le concert de ce lundi 25 mars au Palais des Beaux Arts de Bruxelles avaient déjà entendu le Collegium 1704, son homonyme tchèque. Composé de jeunes chanteurs et instrumentistes, des représentants de la troisième génération des baroqueux, cet ensemble né de projets spécifiques en 2005 (Bach) et 2007 (Zelenka) a réalisé depuis lors, sous la direction de Václav Luks un parcours remarquable. Sa vision de la Passion selon Saint-Jean, rapide, juvénile, bouillonnante de vie, en aura surpris plus d’un. On attendait Markus Brutscher, mais c’est le jeune Eric Stoklossa tout exprès venu remplacer son collègue malade qui chante l’évangéliste, avec une simplicité et un sens du texte déconcertants, entièrement au service de la partition. Dans la même veine, la soprano Nuria Rial, dont la virtuosité n’a d’égale que la fraîcheur fait triompher la musique de Bach dans sa limpide évidence. Très remarqué également par un public exigeant et habitué aux meilleurs, le baryton Tobias Berndt chante le rôle de Jésus avec juste ce qu’il faut de gravité, Christ à la voix jeune et chaude comme la braise, soulignant le double caractère cérébral et sensuel de la partition. Parfois un peu trop agité, le chef entraine ses troupes (orchestre réduit et chœur limité à quatre chanteurs par voix) dans des tempi largement plus vifs qu’à l’ordinaire, avec une précision remarquable, privilégiant le caractère narratif de l’œuvre sur son côté contemplatif. L’émotion est bel et bien au rendez-vous et la passion paraît plus humaine que jamais. [Claude Jottrand]